Tom et Sim s’aiment, alors ils aménagent ensemble. Un soir, ils partagent une pomme d’amour et lancent le trognon dans le jardin. Il n’en faut pas plus pour qu’un petit pommier pousse, un petit pommier d’amour. À ce stade c’est déjà une histoire toute tendre et la clarté des illustrations, qui jouent sur la transparence soutient parfaitement le propos.
Un matin, les deux amoureux trouvent leur maison dans un désordre total. Mais qui a bien pu venir ainsi chambouler leur vie? La scène se reproduit alors ils décident de veiller une nuit pour en avoir le cœur net. Ils découvrent alors deux petites fillettes, aux joues rondes et roses comme des pommes, des friponnes qui s’amusent à tout chambarder sur leur passage. Mais ce sont elles les plus effrayées quand elles se retrouvent nez à nez avec Tom et Sim. Elles tentent de s’enfuir et trébuchent. Alors, les deux hommes prennent les petites dans les bras, ils les câlinent et les consolent, que pourraient-ils faire d’autre? Les mouflettes s’endorment très naturellement et c’est le début d’une nouvelle aventure, une histoire d’amour bien sûr, et de famille, et d’adoption.
J’adore les deux gamines qui ressemblent à des lutins facétieux, le texte comme l’image rendent tellement bien l’énergie débordante des petits quand ils sont d’humeur friponne! On trouve dans le texte de Praline Pay-Para (qui est conteuse) des formules et des péripéties qui évoquent les contes: la graine magique qui permet une naissance miraculeuse, l’adresse directement au lecteur/auditeur dans la formule de fin et bien sûr le travail sur le rythme qui rend les phrases très agréables à lire à voix haute.
Le bouleversement lié à l’arrivé de non pas un mais deux enfants dans une famille est aussi très bien amené, tout comme la tendresse de la relation pères-filles. Un bien bel album, vraiment.
Jardin d’hiver, Marie-Noelle Letellier, Anja Klauss, éditions des éléphants, 2023
J’ai tout de suite été attirée par l’image de couverture et les illustrations intérieures sont plus belles encore.
Je ne m’attendais pas à ce que cet album traite de la PMA mais il est vrai que la métaphore de la graine fonctionne parfaitement sur ce thème.
Il s’agit donc d’un couple qui veut plus que tout au monde avoir un enfant. Ensemble, l’homme et la femme plantent de nombreuses graines mais aucune ne pousse, ils demandent donc l’aide d’un jardinier.
C’est un spécialiste qui analyse la graine à planter, la terre qui va l’accueillir, l’eau qui va l’arroser. Il modifie l’un ou l’autre pour créer les conditions favorables.
Plusieurs essais sont infructueux avant qu’une fleur pousse enfin. Une fleur qui va grossir et dans laquelle un bébé va apparaître.
Le texte est doux et concis. Les illustrations parviennent à concilier l’esprit scientifique de la PMA et la métaphore botanique.
Elles enrichissent l’histoire et apportent de la poésie à l’histoire. On y aperçoit un chat botté par ici, une famille escargot par là, des fleurs et des feuillages magnifiques partout. Le changement de gamme chromatique montre aussi les saisons qui défilent, le long temps nécessaire au processus.
L’ensemble fonctionne, même si le lien de la fleur au bébé manque un peu de fluidité, en particulier en début d’album. L’enchaînement: Ils veulent un bébé: ils plantent une graine est donné tel quel comme s’il relevait de l’évidence. Mais quand on admet ce postula de départ la suite en découle avec naturel.
À chaque adulte qui accompagne les enfants dans la lecture de décider jusqu’où il pousse les explications. Il peut préciser ou non que la graine symbolise l’ovule, la terre l’utérus, le jardinier le médecin etc.
Sans ces explications annexes, il reste une belle histoire, douce et poétique.
Ma maman est bizarre, Camille Victorine, Anna Wanda Gogusey, la ville brûle, 2020, 15€
Est-ce que tous les enfants trouvent leur mère un peu bizarre parfois? Ou est-ce qu’au contraire, ils trouvent tous une certaine normalité dans le modèle familial qui est le leur?
Je me pose souvent la question et je pense que la réponse dépends plus de l’âge de l’enfant que de la supposé normalité parentale.
Quoi qu’il en soit, la mère représentée dans cet album est effectivement assez atypique.
Mère célibataire que l’on pourrait qualifier de queer (transgenre peut-être, mais ne lui collons pas une étiquette, elle n’a pas l’air du genre à aimer ça), elle partage avec sa fille une vie originale, entourée d’amis tout aussi hors normes qu’elle.
Manif féministes, performances artistiques et concert de rock s’intercalent entre des loisirs beaucoup plus habituels: promenade à vélo ou café en terrasse. Les activités se mêlent de façon harmonieuse et chaleureuse.
Mais finalement ce que l’on retient de l’album c’est surtout une relation mère/fille assez complice et douce, dans laquelle chacune peut s’épanouir. Quelle que soit l’étrangeté de cette mère, elle est traversée par des sentiments tout à fait universels à l’égard de sa fille.
Les images aux couleurs éclatantes sont pleines de pep’s, en parfaite harmonie avec le propos.
Ma maman est bizarre ne prétend pas donner un modèle de maternité, mais sans doute plutôt d’ouvrir les possibles.
C’est une belle réussite, qui permettra à certains enfants de se reconnaître et à d’autre de découvrir une altérité salutaire.
Éduquer avec bienveillance, Outils et pièges de la relation parents-professionnels
Auteur : Frédérique Hirn
Editions : Philippe Duval
Prix : 9.50€
Pages : 134
Frédérique Hirn nous présente un ouvrage, pas un énième manuel de bienveillance, mais traitant de la relation parents-professionnels. Pourquoi et comment vit cette relation, avec comme premier outil, la qualité de cette relation mais aussi ses pièges. D’autres outils y sont développés, comme le cadre et les postures d’accompagnement ainsi que d’autres actions pouvant être mises en place.
Afin de savoir de quoi on parle, quelques définitions…
La « bienveillance », mot très tendance dans notre société depuis quelques temps, est définie dans le dictionnaire comme « la capacité àse montrer indulgent, gentil et attentionné envers autrui, d’une manière désintérèssée et compréhensive »
La « bientraitance » est : la démarche visant à reconnaître et à permettre l’expression du sujet désirant ».
« La parentalité », telle que la définie Didier Houzel (pédopsychiatre et psychanalyste) en trois axes : l’exercice, l’expérience et la pratique.
Reprenons la fameuse phrase de D.W Winnicott en 1943 « un bébé ça n’existe pas » … On n’accompagne pas que des enfants mais des familles. Deux phénomènes s’y jouent : l’affect des parents et le besoin de reconnaissance des professionnels. Il n’existe pas de bon modèle éducatif, chacun a le sien et cela nécessite de prendre du recul pour comprendre l’autre. C’est une relation à 3, comme, si bien décrit par F.Hirn : une construction de ponts. Les professionnels de la petite enfance sont avant tout des hommes (bon oui, je sais…) et des femmes qui ont leur propre vision de l’éducation, ce qui leur demande une distanciation dans leurs pratiques au travail.
Nous savons qu’un écart trop important entre ce que l’enfant vit à la maison et dans sa structure accueillante est déstabilisant et met à mal « le sentiment continu d’existence de l’enfant » (toujours de notre cher D.W Winnicott) dont il a tant besoin pour s’épanouir.
L’environnement dans lequel l’enfant évolue un rôle fondateur, en termes de repères et de contenance, pour participer à la base essentielle de construction de soi et doit donc amener un climat de confiance entre parent et professionnel.
Dans une relation de confiance, F.Hirn nous indique qu’il y a deux types de savoir : le savoir expérientiel (la connaissance véritable de la personne) et catégorielle (les représentations que l’on s’en fait). Ces deux approches doivent se compléter sans empiéter l’une sur l’autre. L’individualité de chaque enfant, de chaque parent demande d’y apposer nos connaissances tout en les ajustant.
Équilibre si délicat, que Didier Houzel définit la pratique de l’accompagnement comme un ART.
F.Hirn souligne que faire ensemble c’est bien mais PENSER ensemble est le vrai socle d’un partage de qualité. Elle met le doigt aussi sur ce que nous connaissons tous : les parasites des relations. Quels sont-ils ? Les représentations, les projections, l’incompréhension… Toute une alchimie !
Une fois ces bases posées, F.Hirn définit cette fameuse qualité comme premier outil de la relation. Une relation se construit petit à petit, et demande d’être attentif aux besoins de l’autre, d’avoir le désir d’aller à sa rencontre. Ceci engage des notions de distanciation, d’énergie, d’engagement. C’est une démarche PARTICIPATIVE, une action coopérative.
Pour être attentif à l’autre, elle nous montre une belle image : mettre en pause son monologue intérieur.
Mais alors, quels sont les pièges de ces liens tissés ? L’Autre n’est pas soi et ainsi, penser et se mettre à sa place court-circuite la relation. Pour accéder à l’autre, il faut le laisser exprimer ses besoins, ses envies et ses ressentis, ce qui entraîne de laisser une place à l’insaisissable.
De par nos formations, nous avons tout un tas de « phrases boucliers » ex cité : « on ne réveille pas un enfant qui dort » et de certitudes, qui peuvent parfois passer pour l’avis d’un EXPERT. Or, quelle place laissée à la complexité des relations et de la co-éducation ? Laissons entrer les nuances et l’humilité, le dialogue des différences et des cultures…
Le conseil est un outil d’accompagnement sauf s’il se transforme en injonction ou parole sainte.
F.Hirn attire l’attention sur l’importance du CADRE posé dans nos institutions, elle en fait même un outil de relation. On le sait tous, la réalité est plus complexe que les représentations. C’est un grand enjeu car il y a à la fois les demandes des familles et le fonctionnement des collectivités. Il y a une nuance entre réponse aux besoins (oui !), et écouter les désirs sans forcément les satisfaire systématiquement. Sans oublier aussi qu’il y a les très exigeants et ceux entrés dans une relation de « client-prestataire », tendance qui peut avoir tendance à se développer de par le fonctionnement des structures actuellement qui doivent être de plus en plus gestionnaire financière.
Pour poser ce cadre, les outils écrits comme le règlement de fonctionnement sont une base de respect des pratiques. À condition de le regarder ensemble et non de le signer en cinq minutes dans un bureau !
Comme troisième outil, les postures d’accompagnement en elles-mêmes. Qu’est-ce qu’accompagner ? « Se joindre à quelqu’un pour aller dans la même direction en même temps que lui » Maela Paul (Docteur en sciences de l’éducation). F.Hirn attire notre attention sur la sollicitude, qui peut nous venir naturellement mais qui peut être violente si elle n’est pas voulue. Également, ne parle t’on pas trop DES parents mais rarement DU parent ? Piste de réflexion…
Le guidage c’est laisser l’autre trouver lui-même les solutions car l’accompagnement n’est pas une RÉPONSE. Mais une capacité à ajuster nos positionnements en fonction des besoins. C’est donc une capacité aidante d’écoute.
Si l’Autre arrive à exprimer ses difficultés, besoins, émotions c’est déjà un pas en avant car exprimer c’est accepter de reconnaître et active l’effet « miroir ».
D’autres outils peuvent être développés : les transmissions, les réunions à thèmes, les groupes de paroles… Il ne tient qu’à chacun de se les approprier…ensemble.
En conclusion, nous nous interrogerons toujours sur nos relations car elles demeurent complexes, déjà notre propre « moi » ne nous est pas complétement connu et maîtrisable alors celui d’autrui…
Le tout est préserver sa CAPACITÉ DE QUESTIONNEMENT.
Pour aller plus loin:
« Heureux en crèche, un projet de coéducation parents-professionnels » Deroo A
« Bien-traitance, un trait d’union à conquérir » 1001 BB n°135
« Peut-on vivre sans lien? Non, parce qu’on ne peut pas exister seul. On a besoin de l’autre pour se construire et se conquérir, pour se rassurer parfois, et pour partager des moments, des idées et des désirs. » La force du lien
Il faut se séparer pour avoir une chance de devenir soi…
Dès que l’on touche à l’affectif, la psychologie, la question du lien apparaît. Marcel Rufo rend, une fois de plus, abordable de grands processus psychologiques, avec sa simplicité habituelle.
La vie est faite de séparation, de retrouvailles, d’attachements et de détachements plus ou moins douloureux. C’est ainsi que l’on se construit, que l’on apprend sur soi, sur les autres. Dans le milieu professionnel de la petite enfance, nous avons l’habitude d’entendre et de dire qu’il faut être bien attaché pour bien se détacher… Facile sur le papier…
Marcel Rufo dresse des portraits à partir de situations rencontrées dans sa vie professionnelle, mettant en exergue la difficile alchimie de ce jeu de distanciation. Il nous parle ainsi de la fusion que nous avons tous connu, à l’essence même de notre origine, et des complications qui existent parfois. Grandir passe par la séparation, avec le rôle du père notamment -ou d’un tiers- du sommeil, déjà une petite séparation en soi, puis de l’école. Il nous fait également part de situations où tout est fait pour prolonger cette fusion ou lorsque la séparation est « empêchée » par une maladie ou un handicap. Il aborde également le poids de la séparation sans retour: la mort et le travail qu’elle demande, et l’importance des souvenirs via notre mémoire de fixation puis d’évocation. L’adolescence, période souvent redoutée, dans sa richesse de détachement est un bel exemple de ce sujet également.
Au détour d’un Raphaël ne voulant plus parler correctement, qui, par le bégayage grappille des moments précieux auprès de sa maman hospitalisée. Ou de Léo dont la maman en prison avec sa petite sœur, exprimera son incompréhension de cette absence par l’agressivité envers les autres enfants, le processus de séparation dans ces contextes entraînent des somatisations. C’est un échec de la mentalisation ou de la compréhension. Le psychisme fonctionne comme un révélateur ou un accélérateur des possibilités organiques, il ne créé par la maladie, mais, sur un terrain sensible et prédisposé, la réveille.
Ces observations ne datent pas d’hier, René SPITZ en 1945 a mis en avant ce que l’on appellera l’hospitalisme. Il recouvre « l’ensemble des troubles physiques dus à une carence affective par privation de la mère survenant chez les jeunes enfants placés en institution dans les dix-huit premiers mois de la vie. » Il a été observé chez ces enfants placés, un repli sur soi de plus en plus intense, allant jusqu’à un arrêt du développement psychomoteur. Ces constats ont permis de faire évoluer sur les pratiques et ont mis en avant les conséquences, parfois irréversibles, de séparations précoces et insécures.
Impossible de ne pas citer Ronald Winnicott lorsqu’il s’agit d’attachement. Il parlera de « 100 jours de folie amoureuse » après la naissance du bébé dans la relation mère-enfant. On parlera de mère mais cela est valable pour toute figure d’attachement. Grâce à la préoccupation maternelle primaire, résumant l’ensemble des pensées maternelles pour le confort de l’enfant, avec le holding (l’art de porter physiquement et psychiquement le bébé) et le handling (le réel contact avec le bébé, notamment par les soins) le premier lien d’attachement du nourrisson va construire. De la naissance à 6 mois il parlera de dépendance absolue, de 6 à 18 mois de dépendance relative et à partir de 2ans d’indépendance. Bien sûr, il ne va pas mettre la table et ranger sa chambre, il s’agit bien d’indépendance psychique, l’enfant commence à avoir conscience de lui et sait que sa mère répondra à ses besoins.
Marcel Rufo pointe à travers des cas concrets, la difficulté de se séparer d’un parent malade (physiquement ou psychologiquement). L’ambivalence « je t’aime je te hais, je ne peux pas me passer de toi comme toi de moi » bat ici tout son plein. Comment se séparer d’un parent si la crainte de l’éloignement culpabilise? Se détacher en ayant la crainte que l’autre ne soit pas assez solide et entraîne un doute sur la capacité de « résistance ». Le pédopsychiatre nous éclaire sur ces questions qu’il a appris à traiter au fur et à mesure de son expérience. Un parent doit rassurer, encourager et rendre plus fort, or un parent malade entraîne un inversement des rôles où c’est l’enfant qui se doit d’être fort. Le parent n’a alors pas son rôle de « héros » dans la période que Marcel Rufo qualifie de « château fort » qu’est la petite enfance.
Quand à la mort, angoisse universelle et séparation ultime et irréversible, l’auteur citera Sigmund Freud, parlant du deuil de sa fille » on sait qu’après une telle perte, le deuil aigu s’atténuera mais on reste toujours inconsolable, sans trouver de substitut (…). C’est la seule façon de perpétuer cet amour, qu’on ne veut abandonner à aucun prix ».
Je vous invite également à jeter un œil aux travaux de Janusz Korczak et ses orphelinats.
Marcel Rufo est pédopsychiatre, professeur d’université, praticien, écrivain et auteur. C’est un spécialiste de l’enfance de renom, intervenant essentiellement dans le bassin méditerranéen.
Pour aller plus loin :
Marcel Rufo : « Tu réussiras mieux que moi »
Isabelle Filliozat : « J’ai tout essayé »
Corinne Morel : « ABC de la psychologie de l’enfant »
Mélanie Klein : « Le complexe d’Œdipe »
Jean Bergès et Gabriel Balbo « Psychothérapies d’enfants, enfants en psychanalyse »
Porter un regard bien-traitant sur l’enfant et sur soi, « Sois sage, obéis! »
Éditions: la Chronique Sociale
Collection: Comprendre les personnes, l’essentiel
Prix: 10.50€, 92 pages
Préface d’Olivier Maurel
« Près de l’enfant, la méfiance s’évanouit, nous devenons doux parce que, réunis autour de lui, nous sentons se réchauffer en nous la flamme de vie qui subsiste là où la vie a ses origines » Maria Montessori.
J’ai eu l’immense privilège de bénéficier des interventions d’Arnaud Deroo lors de ma formation d’éducateur jeunes enfants. Vif, dynamique, touchant là où c’est sensible, c’est un plaisir de se remettre en question via ses réflexions. Le fait qu’il les ait couchées sur le papier dans différents ouvrages est un joyau que je voulais partager avec vous.
La bien-traitance est un concept aujourd’hui très en vogue, mais il s’agit ici de ne pas y mettre tout et son contraire. Arnaud Deroo part de la question éducative, sans se voiler la face derrière le « les enfants sont plus difficiles qu’avant » (c’est sans compter sur les perceptions de l’enfant par la bible, Kant, Saint Augustin, Socrate ou Freud!) et en regardant le vrai problème derrière lequel se cachent nos histoires personnelles, notre enfant intérieur, les jeux de pouvoir, les croyances et principes éducatifs, les attentes purement adultes…
Il tord le cou au fameux « SOIS SAGE! », qui ne l’a pas entendu, dit, cru en le disant? Il nous éclaire sur la non-efficacité de ce principe, sur le fait qu’il existe une autre forme de sagesse, à travers les connaissances neurologiques actuelles, le stress engendré, la non-compréhension d’une émotion trop forte et le poids du culte de l’obéissance.
Finalement, après avoir vu tout cela, la question à se poser est : comment alors grandir heureux? Arnaud y répond, vous vous en doutez, en évoquant… l’estime de soi! Et oui, encore celle-là, elle est partout hein?
À travers des scènes que vous avez peut-être vécues, il nous éclaire sur les différents comportements à adopter, et on se rend compte que le changement tient en peu de choses, et pourtant, avec tant de conséquences!
Enfin, pour terminer cet ouvrage, l’auteur présente les ressources dans lesquelles chacun peut puiser, parce que oui, vous avez le droit d’être à bout, personnellement ou professionnellement, mais il y a toujours des solutions!
Petite parenthèse…Arnaud Deroo pointe avec finesse que nous n’avons pas de ministère de la petite enfance mais nous en avons un pour les anciens combattants… Le petit d’homme n’est-il pas assez important??
Il part du postulat que le sens de la vie est d’aimer l’autre, de l’aider à grandir, à épanouir sa personnalité. Nos réflexes premiers ne vont pas forcément dans ce sens, impulsivement face à une colère nous avons envie de dire « arrête ça tout de suite » au lieu de » c’est bien, laisse-la sortir ».
« Tendre à l’allant devenant de l’enfant » (une belle phrase de Françoise Dolto qui mériterait d’être encadrée ou « mise en cadre » comme on le voit beaucoup ces derniers temps) et se consacrer à l’instant présent sont là des bases de l’accompagnement bienveillant de l’enfant.
Arnaud repose les bases, l’enfant doit se sentir aimé, respecté et ressentir un amour lui donnant une base de sécurité indispensable. L’enfant ne s’éduque pas, il apprend par imitation. Une relation parent-enfant satisfaisante engendre désir, lien, empathie, expression personnelle, responsabilisation, bien loin de la « planète parasitage ».
Les apports théoriques et scientifiques vont en ce sens, repenchons-nous sur les trois zones du cerveau de l’enfant: reptilien, limbique et le cortex, qui permettent de comprendre sa gestion (ou non-gestion) des émotions. Ou encore, le triangle d’estime de soi composé de la conscience, la spontanéité et l’intimité.
Alors oui, vous avez sans doute reçu une éducation autre et n’en êtes pas mort, mais si on sait que l’on peut mieux faire pourquoi s’en priver? N’est-il pas plus gratifiant et porteur pour tout le monde d’éduquer par responsabilisation et non par soumission?
Arnaud Deroo est éducateur jeunes enfants, responsable d’un service petite enfance à Lambersart, consultant en éducation, formateur, avec comme bases de travail l’analyse transactionnelle, la communication non-violente, la gestion mentale, la bien-traitance. Il anime de nombreuses conférences et de nombreux ateliers parents et est auteur de plusieurs ouvrages ainsi que d’une chronique. Il a également mis en place une troupe de théâtre amateur, avec des spectacles-débat autour de la relation parent-enfant.
Pour aller plus loin:
Livres:
« Loczy ou le maternage insolite » Appell G, David M
« Au cœur des émotions de l’enfant » Filliozat I
« J’ai tout essayé » Filliozat I
« Heureux en crèche, un projet de coéducation parents-professionnels » Deroo A
« La cause des enfants » Dolto F
« Pour une enfance heureuse » Gueguen C
« Bien-traitance, un trait d’union à conquérir » 1001 BB n°135
Deux sujets qui m’intéressent: le handicap et la musique. Barbara Rosenstiehl les fusionne avec brio. Quiconque ayant travaillé avec des personnes en situation de handicap s’est déjà posé la question de la communication. Celle-ci ne peut pas toujours être verbale, elle passe donc par le corps, et tout un tas d’outils. C’est à partir de là que l’auteure s’est posé trois questions:
« – Pense-t-on à évoquer les personnes polyhandicapées à travers leurs potentialités et leurs aptitudes relationnelles?
– Peut-on entendre la musique autrement qu’en termes de tempo, notes, tonalité etc…?
– Envisage-t-on une thérapie basée sur la communication avec des individus qui n’ont pas accès au langage? »
En plus de m’apporter des réajustements dans mon accompagnement auprès de ces personnes et dans ma relation à l’autre d’une manière plus générale, j’ai également appris à envisager la musique (une de mes passions!) d’une autre façon.
Barbara Rosenstielh pose le contexte de la thérapie d’une manière générale dans le handicap, avant de mettre en lien la musique comme médiateur et la place du mouvement. Reposer les bases de ce qu’est la communication était également essentiel.
La musique
est «l’art de combiner des sons»,
la musicothérapie est une des composantes de l’art-thérapie qui consiste à
utiliser la musique comme outil thérapeutique, pour rétablir, maintenir ou
améliorer la santé mentale, physique et émotionnelle d’une personne.
La musique
est du point de vue scientifique un phénomène physique d’ondes vibratoires qui
viennent littéralement toucher le corps et plus particulièrement les tympans.
Pour les
musiciens, c’est un moment de plaisir, d’échanges, de jeu, d’expression.Il s’agit
de goût de vivre, de mieux-être, d’aide à vivre, d’intégration et de
socialisation.
Le but est d’ouvrir les canaux de communication,
redécouvrir le plaisir et le désir de communiquer. Ce qui implique une vocation
d’écoute, de présence, d’observation et permet d’agrandir l’espace d’expression
émotionnelle. La musicothérapie estun système
de relation moi-autrui-environnement.
Cette citation de Barbara
Rosensthiel met en exergue ce qu’il peut se passer pour le corps: «ce résonateur
qu’est le corps, contenant et contenu d’une communication, a besoin d’espace,
d’espace sonore, de lieu entre lui et les autres pour s’exprimer».
Dans ces
ateliers, ce c’est pas le contenu qui compte mais la capacité à communiquer,à
donner du sens expressif. Cette communication spécifique est porté par les
éléments constitutifs de la musique: vibrations, rythme, son, mélodie,
harmonie.
La musique
est alors un médiateur, dans une relation qui se doit sécurisante,
enveloppante, gratifiante et plaisante. C’est une
intervention non intrusive dans le domaine relationnel non verbal, composée de
sons et mouvements.
«Jouer de la musique c’est mobiliser
l’imaginaire, la créativité et l’affectivité». La créativité est l’action de
faire ou d’organiser quelque chose qui n’existe pas. C’est unique , vient de la
personne mais tourné vers l’autre.
Pour
Winnicott, la créativité est une façon de percevoir les choses qui donne au
sujet le sentiment que la vie mérite d’être vécue. Il est acteur. Ce qui
renvoie à une notion d’identité, de savoir-faire.
Ces outils nous permettent d’entrer
en relation avec l’enfant, de lui offrir la possibilité de faire des choix. Ils
ont un objectif pour l’accompagnement présent de l’enfant, mais également en
vue de l’orientation future des enfants. En effet, le but est d’établir des
codes stables afin de pouvoir les élargir ensuite, les agrandir au cercle moins
privé de la famille, aux futurs professionnels qui accompagneront l’enfant mais
également à l’extérieur, dans les autres lieux où l’enfant est accueilli, dans
une démarche de continuité pour l’enfant, de progression, d’apporter des moyens
de communication adaptés et ne pas recommencer tout le travail fait en amont.
Barbara Rosensthiel n’hésite pas à nous faire partager ses séances avec ceux qu’elle a accompagnés, ce qui rend son expérience concrète pour nous lecteurs.
La musicothérapie est un espace/temps, où il est indispensable d’être disponible et d’être avec l’autre et c’est une expérience à vivre en équipe.
L’accordage affectif, le langage, la motricité, le miroir sonore, la créativité, éveil des sens, Palo Alto et les rituels sont tant de sujets abordés dans ce livre.
Si vous êtes sensible à la musique, à la communication non-verbale, n’hésitez pas! Nous utilisons tous les jours notre communication gestuelle, quel que soit notre interlocuteur et dans toutes les situations!
Barbara Rosensthiel est éducatrice jeunes enfants, musicothérapeute (formation à la musicothérapie active CF l’Atelier de Musicothérapie de Bordeaux), elle a travaillé en crèche puis au sein d’un institut médico-éducatif pour enfants et adolescents polyhandicapés.
Pour aller plus loin:
« Eléments de musicothérapie » Ducourneau Gérard
« Des musiciens et des bébés » Bouteloup Philippe
« Premiers gestes, premiers mots » Van Der Straten Astrid
« Les communications non-verbales » Corraze Jacques
« Il est un rêve, le premier au Panthéon des illusions et des
espoirs des parents, l’essentiel objet de leurs désirs : faire en sorte que
leur bébé, jamais, ne pleure ».
Le bébé humain est, parmi les
mammifères, l’être le plus immature à la naissance, il lui faudra des mois, des
années pour se développer complètement.
Ce nouveau-né, qui vient de vivre l’un
des plus gros traumatismes de sa vie en passant de la vie in-utéro à
l’environnement extérieur, va devoir trouver des stratégies pour s’adapter et
se faire comprendre. Pour cela, le bébé va créer du lien avec ce et ceux qui
l’entourent pour ensuite pouvoir en créer avec lui-même.
Qui dit lien dit attachement. Deux
grands modèles théoriques ont largement été débattus à ce sujet, à la fois dans
la complémentarité et l’opposition. Sigmund Freud (médecinneurologueautrichien, fondateur de lapsychanalyse) avec son approche psychanalytique mettant
l’importance du lien en second plan et plus récemment John Bowlby (psychiatreetpsychanalystebritannique), qui a prouvé l’essentialité de l’attachement à
travers ses expériences.
Tout cela pour aboutir au postulat
suivant : « un bébé tout seul n’existe pas », comme si bien
dit par notre ami Donald Winnicott (pédiatre,psychiatreetpsychanalyste).
Pourquoi ce charabia
psychologique ? Pour en arriver au choix du livre d’aujourd’hui
« bébé, dis-moi pourquoi tu pleures ». Ce fameux nouveau-né a trouvé
le moyen d’entrer en relation avec son environnement : le pleur.
Qui n’a jamais voulu faire demi-tour
en rentrant dans un restaurant dans lequel un bébé hurle ? Qui n’est
jamais rentré dans une crèche en se disant « je ne pourrais pas travailler
dans un lieu aussi bruyant » ? Et personne n’est à blâmer.
Ces cris, à la fois redoutés et
presque « attendus » (car moyen d’expression principal) composent le
premier langage de l’enfant. Ils sont à la fois signe, signal et symptômes.
Leurs fréquences, intensités, variabilités en font une communication à part
entière, que parents et professionnels, apprendront à décrypter au fur et à
mesure de la relation.
Jacky Israël dresse dans son ouvrage
un large panel des significations de ces manifestations. Du premier cri
« de la vie », aux pleurs d’appel, de faim, de sommeil, de douleur,
d’inconfort des premiers jours de vie aux pleurs plus diversifiés (réveils
nocturnes, pleurs de refus, colère, accident, maladie) qui vont peu à peu se
mettre en place avec le développement du bébé.
Il aborde également les différentes
situations que les parents peuvent rencontrer : déplacement professionnel,
changement de nounou, vacances chez les grands-parents, séparation etc…Loin d’un dictât sur l’éducation, cet ouvrage
permet de se rendre compte que tout le monde passe par les mêmes étapes, et
ainsi de se sentir moins isolé, et surtout, il déculpabilise !
Riche de connaissances sur le
développement de l’enfant in-utéro, Jacky Israël balaye avec brio l’éveil des
sens durant la grossesse et tout ce qui se joue lors de l’accouchement et juste
après (peau à peau, mise en place de l’allaitement etc..).
Les places du père, du pouce, de la
tétine, du doudou et de l’autorité sont également abordées.
Si vous êtes jeune parent ou
professionnel accompagnant un nourrisson, si vous êtes perdu dans les ouï-dire
des psychologies de comptoir « laisse-le pleurer il fait un
caprice », «si tu le prends trop dans les bras il va s’habituer et tu ne
pourras plus rien faire », ce livre est fait pour vous.
Rappelons-nous que le bébé a passé
neuf mois (ou moins) à l’intérieur même de sa mère, qu’il va encore croire
pendant de longs mois qu’il ne fait qu’un avec sa mère (ou autre figure
d’attachement !), qu’il arrive dans un monde où tout paraît agressif (les
bruits, la luminosité, les températures), qu’il doit s’adapter à beaucoup de
choses en même temps (son corps qui n’est plus flottant, l’alimentation, le
sommeil, le mouvement autour de lui) et éloignons-nous des notions de caprice
pour un si petit être.
Nous pouvons résumer tout cela
simplement en une phrase, pour le bébé « je pleure donc je suis ».
Jacky
Israël était un pédiatre reconnu,
néonatologiste, auteur de nombreux ouvrages notamment sur le bébé. Il était
également membre du Groupe
de recherche et d’études de la naissance et du nouveau-né ainsi que responsable de la rubrique « Quoi de
neuf docteur » de la revueSpirale,
la grande aventure de Monsieur Bébé. Jacky Israël nous a quitté en 2015.
Pour aller plus loin :
« À la recherche du temps gagné,
comment l’olfaction participe à l’adaptation du nouveau-né » et
« L’audition prénatale, quoi de neuf ? » L’aube des sens 2,
coordonné par J.Israël et D.Rapoport
« Trente ans
d’intranquilité », L’aube des sens, coordonné par J.Israël et D.Rapoport
« Le sommeil de l’enfant »,
M-J. Challamel
« Entendre la douleur du
nouveau-né : aux confins de l’oubli », O.Fresco
« Les empreintes
sensorielles », Revue des auxiliaires de puériculture, N°16, J. Israël
« Maman, pourquoi tu
pleures ? », Les désordres émotionnels de la grossesse et de la
maternité, J. Dayan
Des réponses de pédopsychiatres, de psychologues, de pédiatres… adaptées à chaque cas. 200 témoignages. Sous la direction du Dr Patrick Ben Soussan (pédopsychiatre).
Devenir parent, c’est se retrouver responsable d’un petit être, entièrement dépendant de soi, qui nous ouvre mille et un champs. Les notions de sommeil, alimentation, déplacement, propreté, langage, éducation etc… prennent alors une toute autre ampleur.
Et non, vous n’êtes certainement pas seuls à avoir des « difficultés » dans l’un ou l’autre domaine. Chaque être humain est unique, et l’enfant, être le plus immature à la naissance de toutes les espèces vivantes, va être confronté à des obstacles qui lui sont propres.
Dans cet ouvrage, pas moins de huit auteurs, apportent leurs expériences. Par des cas concrets, ces professionnels (pédopsychiatre, psychiatre, psychologue clinicien, psychomotricien, pédiatre), nous décrivent différentes problématiques rencontrées au sein de leurs pratiques. La réalité des situations évoquées permet une pleine accessibilité à leur compréhension. Des petits encadrés à la fin de certains récits, ouvrent sur quelques notions de psychologie.
Moins démunis, en tant que parents, et rassurés de voir que d’autres familles rencontrent ces situations, « Tout n’est pas (forcément) psy », permet de trouver des réponses aux questionnements, que ce soit sur la manière d’aborder les choses ou pour évaluer si un accompagnement extérieur est nécessaire ou non.
En tant que professionnelle, ce livre m’aide à trouver des réponses, à mieux comprendre les comportements de l’enfant quand il est notamment accueilli en collectivité, et aussi à accompagner et aiguiller les parents, rôle essentiel de notre quotidien.
Sommeil, alimentation, propreté, développement et santé, langage, comportement, relations parents-enfants, autorité, relations frères, sœurs et autres enfants, sexualité, école, loisirs, TV, internet, société, handicap, maladie et mort sont autant de thèmes abordés.
De Cédric qui se plaint d’être tout le temps fatigué, à Hugo qui fait encore pipi au lit, en passant par Sophie qui a un petit frère handicapé, en effet, tout n’est pas (forcément) psy et il ne faut pas vulgariser ce domaine, mais garder l’esprit ouvert ne peut qu’être bénéfique !