Bébé, dis-moi pourquoi tu pleures. Jacky Israël,
Collection 1001 bébés dirigée
par Patrick Ben Soussan, éditions Erès. 15€
Préface
de Véronique Abadie (professeur faculté Paris-Descartes Service de
pédiatrie générale Hôpital Necker Enfants Malades),
postface de Bernard Golse ( pédopsychiatre, professeur des
universités – praticien hospitalier de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à l’université Paris Descartes, chef du service de pédopsychiatrie de l’hôpital Necker-Enfants malades et psychanalyste).
« Il est un rêve, le premier au Panthéon des illusions et des
espoirs des parents, l’essentiel objet de leurs désirs : faire en sorte que
leur bébé, jamais, ne pleure ».
Le bébé humain est, parmi les
mammifères, l’être le plus immature à la naissance, il lui faudra des mois, des
années pour se développer complètement.
Ce nouveau-né, qui vient de vivre l’un
des plus gros traumatismes de sa vie en passant de la vie in-utéro à
l’environnement extérieur, va devoir trouver des stratégies pour s’adapter et
se faire comprendre. Pour cela, le bébé va créer du lien avec ce et ceux qui
l’entourent pour ensuite pouvoir en créer avec lui-même.
Qui dit lien dit attachement. Deux
grands modèles théoriques ont largement été débattus à ce sujet, à la fois dans
la complémentarité et l’opposition. Sigmund Freud (médecin neurologue autrichien, fondateur de la psychanalyse) avec son approche psychanalytique mettant
l’importance du lien en second plan et plus récemment John Bowlby (psychiatre et psychanalyste britannique), qui a prouvé l’essentialité de l’attachement à
travers ses expériences.
Tout cela pour aboutir au postulat
suivant : « un bébé tout seul n’existe pas », comme si bien
dit par notre ami Donald Winnicott (pédiatre, psychiatre et psychanalyste).
Pourquoi ce charabia
psychologique ? Pour en arriver au choix du livre d’aujourd’hui
« bébé, dis-moi pourquoi tu pleures ». Ce fameux nouveau-né a trouvé
le moyen d’entrer en relation avec son environnement : le pleur.
Qui n’a jamais voulu faire demi-tour
en rentrant dans un restaurant dans lequel un bébé hurle ? Qui n’est
jamais rentré dans une crèche en se disant « je ne pourrais pas travailler
dans un lieu aussi bruyant » ? Et personne n’est à blâmer.
Ces cris, à la fois redoutés et
presque « attendus » (car moyen d’expression principal) composent le
premier langage de l’enfant. Ils sont à la fois signe, signal et symptômes.
Leurs fréquences, intensités, variabilités en font une communication à part
entière, que parents et professionnels, apprendront à décrypter au fur et à
mesure de la relation.
Jacky Israël dresse dans son ouvrage
un large panel des significations de ces manifestations. Du premier cri
« de la vie », aux pleurs d’appel, de faim, de sommeil, de douleur,
d’inconfort des premiers jours de vie aux pleurs plus diversifiés (réveils
nocturnes, pleurs de refus, colère, accident, maladie) qui vont peu à peu se
mettre en place avec le développement du bébé.
Il aborde également les différentes
situations que les parents peuvent rencontrer : déplacement professionnel,
changement de nounou, vacances chez les grands-parents, séparation etc… Loin d’un dictât sur l’éducation, cet ouvrage
permet de se rendre compte que tout le monde passe par les mêmes étapes, et
ainsi de se sentir moins isolé, et surtout, il déculpabilise !
Riche de connaissances sur le
développement de l’enfant in-utéro, Jacky Israël balaye avec brio l’éveil des
sens durant la grossesse et tout ce qui se joue lors de l’accouchement et juste
après (peau à peau, mise en place de l’allaitement etc..).
Les places du père, du pouce, de la
tétine, du doudou et de l’autorité sont également abordées.
Si vous êtes jeune parent ou
professionnel accompagnant un nourrisson, si vous êtes perdu dans les ouï-dire
des psychologies de comptoir « laisse-le pleurer il fait un
caprice », «si tu le prends trop dans les bras il va s’habituer et tu ne
pourras plus rien faire », ce livre est fait pour vous.
Rappelons-nous que le bébé a passé
neuf mois (ou moins) à l’intérieur même de sa mère, qu’il va encore croire
pendant de longs mois qu’il ne fait qu’un avec sa mère (ou autre figure
d’attachement !), qu’il arrive dans un monde où tout paraît agressif (les
bruits, la luminosité, les températures), qu’il doit s’adapter à beaucoup de
choses en même temps (son corps qui n’est plus flottant, l’alimentation, le
sommeil, le mouvement autour de lui) et éloignons-nous des notions de caprice
pour un si petit être.
Nous pouvons résumer tout cela
simplement en une phrase, pour le bébé « je pleure donc je suis ».
Jacky
Israël était un pédiatre reconnu,
néonatologiste, auteur de nombreux ouvrages notamment sur le bébé. Il était
également membre du Groupe
de recherche et d’études de la naissance et du nouveau-né ainsi que responsable de la rubrique “Quoi de
neuf docteur” de la revue Spirale,
la grande aventure de Monsieur Bébé. Jacky Israël nous a quitté en 2015.
Pour aller plus loin :
« À la recherche du temps gagné,
comment l’olfaction participe à l’adaptation du nouveau-né » et
« L’audition prénatale, quoi de neuf ? » L’aube des sens 2,
coordonné par J.Israël et D.Rapoport
« Trente ans
d’intranquilité », L’aube des sens, coordonné par J.Israël et D.Rapoport
« Le sommeil de l’enfant »,
M-J. Challamel
« Entendre la douleur du
nouveau-né : aux confins de l’oubli », O.Fresco
« Les empreintes
sensorielles », Revue des auxiliaires de puériculture, N°16, J. Israël
« Maman, pourquoi tu
pleures ? », Les désordres émotionnels de la grossesse et de la
maternité, J. Dayan
« Le bébé et le temps », A.
Ciccone
Sur internet :
Vidéo « Thalasso
bain bébé » : https://www.youtube.com/watch?v=OPSAgs-exfQ
Article sur l’attachement :