Ce mois ci sort le numéro 96 de la revue Spirale. Il est consacré aux habits de bébé et coordonné par Claire Mestre. J’y signe un article sur les vêtements dans la littérature enfantine.
Je vous en livre le résumé:
Dans la littérature enfantine comme dans la vie, les vêtements ont des fonctions contradictoires. Derrière un masque ou déguisé, on peut se laisser aller à ses pulsions ou à son impertinence. Mais les vêtements sont aussi parfois un carcan, un marqueur social, dont il est difficile de se défaire. Sans compter les chaussettes qui grattent et autres tee-shirts au col trop étroit, qui donnent bien du tracas aux jeunes enfants. Et si la solution était de s’en débarrasser et de se promener tous à poil ? C’est tentant, mais ce n’est pas au goût de tout le monde.
Je dois dire que j’ai pris un plaisir particulier à écrire cet article, je me suis beaucoup amusée. Ce n’est pas un sujet auquel j’aurais pensé mais il y a beaucoup de choses à en dire et j’ai du me limiter faute de place.
J’y aborde entre autre l’importance du costume de loup de Max, le masque de Blaise, les t.shirts qui coincent la tête, les canons de beauté d’Olga et sa bande, la jupe de Thomas et la grande liberté de ceux qui se promènent « tous à poil ». Et je suis loin d’avoir fait le tour du sujet.
Si vous voulez lire ça, vous pouvez bien entendu acheter la revue Spirale en version papier, mais aussi la trouver sur cairn.
Voilà le lien de la présentation générale de l’ouvrage: Les habits de bébé.
Mes autres publications dans la presse écrite sont à retrouver ici.
Dans ce cadre j’ai fait, avec ma collègue Céline Touchard, une intervention sur les livres qui se rebellent contre les discriminations.
Beaucoup nous avaient demandé à l’époque si le texte de notre intervention était disponible.
Il a fallu du temps mais c’est aujourd’hui le cas, dans le livre collectif, coordonné par Christelle Haussin, Sylvie Rayna, Marie-Nicole Rubio et Paulette Séméria Petite enfance, art et culture pour inclure.
Le livre est disponible en librairie dès le 16 de ce mois et si vous voulez vous faire une idée du contenu de mon article, je vous en livre le sommaire:
S’INDIGNER, RÉFLÉCHIR ET S’ENGAGER AVEC LES ALBUMS JEUNESSE Chloé Séguret, Céline Touchard
Les livres qui s’indignent
Une histoire de violence domestique
Mauvais genre !
La petite fille et la mère
Comment pensent les adultes ?
Le beau, c’est subjectif
Quelques albums de Mario Ramos
Les livres qui réfléchissent (et font réfléchir)
La référence
Fraternité et universalité
Noirs et héros de l’histoire
Camille et les autres
Les livres qui s’engagent
Ludiques et politiques
Résistance !
Quelles inclusions ?
Conclusion : l’album jeunesse, une littérature sans tabous
Auteurs :Sous la direction de Patrick Ben Soussan avec Yvonne Knibiehler, Michel Lemay, Marcel Sanguet
Collection : 1001 BB
Editions : ERES
Prix: 10€
Pages :133
Après plusieurs mois d’absence consacrés à diverses choses (un DEUG de Psychologie, un deuxième degré de langue, la création d’une crèche…) dont la plus importante, ma petite fille de 7 mois, me revoilà pour la chronique consacrée aux livres pour adultes !
Nouveau rythme oblige, il y aura un billet par mois et non plus deux, sortant le deuxième lundi de chaque mois !
Au plaisir de vous retrouver…
J’ai choisi pour cette reprise une valeur sûre, un ouvrage de la collection 1001 bébé : « le bébé et ses peurs ».
Colorons d’abord cette peur « c’est ainsi que la peur nous en fait voir de toutes les couleurs et le langage commun l’a fiancée à l’arc-en-ciel. Ne dit-on pas blanc de peur, ou blême comme un fantôme, un cadavre, un linge, à moins que l’on ne soit bleu de peur ou vert de trouille, qu’on se fasse un sang d’encre ? ». Étant sur un projet de création de crèche depuis 3 ans s’appelant « arcanèl », arc-en-ciel en occitan, je ne pouvais louper cet extrait 🙂
La peur est un sentiment ancré chez l’être humain et d’une manière générale, chez les êtres vivants. C’est avant tout une réaction afin de pérenniser la survie de l’espèce.
Yvonne Knibiehler fait un tour d’horizon historique de la peur, de la place de la famille et de la femme. Elle y point l’évolution de nos sociétés et ses conséquences sur la maternité. En bien ou en mal, là n’est pas la question.
La peur met en veille nos autres émotions et capacités, Patrick Ben Soussan en témoigne au début du livre lorsqu’il livre son expérience personnelle. Quand sa femme a accouché de leurs jumelles, l’une d’elle était au plus mal. Malgré son parcours et son expérience professionnelle, il est resté figé par la peur et ses connaissances sont restées inaccessibles.
Jusqu’au moment où tout cela est parvenu à se frayer un chemin jusqu’à la conscience, et il demanda à ce que la petite soit laissée près de sa mère -sur les propres conseils que lui-même donne -auprès de laquelle elle récupéra très vite.
Marcel Sanguet souligne ce fameux écart de bébé imaginaire, bébé idéal et bébé réel. Il assume le point de vue qu’un enfant docile et sage n’est pas preuve de réussite éducative. Quel parent aujourd’hui n’a pas la crainte d’entendre que son enfant est mal-élevé, malpoli ou encore enfant « roi » ? Et si on réfléchissait à cette fameuse « élévation » ?
La peur a ce paradoxe qu’elle nous inhibe et en même temps nous met en mouvement. Qui n’a jamais été paralysé à la vue d’une araignée, d’un serpent ou tout autre sensibilité ? Ou au contraire, fait un bond d’un mètre ou est parti en courant ? Elle « étreint, abat, excite, fait taire ».
Quelle est LA peur fondatrice de l’humanité ? La peur de l’abandon nous disent ces auteurs. L’abandon, cette perte de sentiment de continuité d’existence.
L’être humain la ressent tout petit, d’abord par les peurs innées et les réflexes dits archaïques (ont le réflexe de Moro et de préhension). Vous avez sans doute déjà vu, lorsque le petit bébé de quelques semaines lève très haut ses petits bras en l’air en dormant, c’est en fait car il pense qu’il est en train de tomber et essaie de se rattraper. La peur est donc présente en nous
dès la naissance. Ce réflexe, qui est celui de Moro, est en fait l’ébauche du sursaut, que l’on retrouvera chez le bébé plus grand lors d’un bruit inattendu.
Le bébé est en attente de familier ,de continuité, de « mêmeté d’être » de notre chère Dolto.
Michel Lemay va même plus loin, argumentant que la peur s’installe dès l’envie de conception (est-ce qu’on va y arriver ? Quand ? Sera-t-il en bonne santé ? L’accouchement ?).
L’arrivée de l’enfant renvoie à nos propres origines et réveille d’anciennes peurs et angoisses bien enfouies. Freud ira encore plus loin, fondant la première liée à l’accouchement, inscrite dans l’inconscient.
La peur peut aller loin et se développer jusqu’à l’angoisse. L’enfant connaîtra l’une des plus fortes angoisses aux alentours de 8 mois (bien que Patrick Ben Soussan la situe de plus en plus tôt, pouvant démarrer dès 5 mois). L’angoisse dite de séparation (le second organisateur psychique selon Spitz). Le bébé comprend que sa mère et lui sont en fait deux personnes et non une seule unie, ce qui va engendrait la peur de l’étranger, qui pourrait le séparer de ses figures d’attachement. Cette peur d’être séparé, qui au final fera grandir ce petit être (et sans doute ses parents) et lui faire gagner en autonomie et construction de soi.
Il y a les peurs innées et les peurs acquises : celle d’être dévoré, du père tout-puissant, du noir, du bruit, de la solitude, du monde… En deçà de l’inné et l’acquis il nous faut prendre en compte l’aspect historique et culturel que nous portons tous et qui modifie notre rapport à la peur. Selon les représentations culturelles, elle peut être vue comme une faiblesse, une lâcheté, voire avoir un sexe (je vous laisse deviner lequel…).
Elle représente une rupture d’équilibre qui menace la sécurité, mais qui est en fait constructive dans un environnement contenant.
L’enfant va défier ses peurs grâce à l’imaginaire, c’est ainsi qu’il jouera même à se faire peur, qu’il dévorera les livres du grand méchant loup et que ses personnages ou poupées auront une vie bien aventureuse. Les supports imagés sont très importants dans le développement de cet
imaginaire.
Je vous laisse lire le livre pour aller plus loin avec notamment l’expérience du petit Albert et du rat blanc de John Watson, les trois fondements et de la psyché de Platon, les neuf émotions reconnues aujourd’hui, l’origine phylogénétique trouvée par Bowlby et les six couples de comportements de Darwin. Bha oui, il ne faut pas tout vous dévoiler non plus 🙂
Vous y trouverez aussi les références au Petit Prince, à Nietzsche, à Baudelaire, à Wallon, à Alice au Pays des Merveilles, à Sartre, à Stern, si, si je vous jure, tout ça dans le même livre.
Vous trouverez également en toute fin de livre une liste «la peur dans les albums pour les enfants de 0 à 6 ans ».
La peur nous poursuivra toute notre vie car « grandir c’est perdre…ça fait peur et c’est douloureux » et elle côtoie toujours la mort par la peur de mourir ou lorsqu’on meurt de peur…
Pour aller plus loin :
André.C « la peur des autres »
Ariès.P « l’enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime »
Filliozat.I « au cœur des émotions de l’enfant »
Winnicott D.W « jeu et réalité »
Lasalle.H « peur et passion de grandir »
Patrick Ben Soussan est pédopsychiatre, responsable du département de psychologie clinique
de Marseille, directeur de trois collections : « 1001BB », « 1001 et + » et « L’ailleurs du
corps », ainsi que de deux revues Spirale, la grande aventure de Monsieur Bébé et Cancers &
psys.
Yvonne Knibiehler est une universitaire, essayiste, historienne et féministe française.
Michel Lemay est un pédopsychiatre français et professeur émérite de psychiatrie de l’enfant
et de l’adolescent à la faculté de médecine de l’Université de Montréal.
Marcel Sanguet est psychologue clinicien et psychanalyste.
Collection : Mille et un bébés-les bébés et la culture-
Editions : érès
Prix : 9.50€
Pages :95
Un éloge au Livre est-il nécessaire? Nous sommes de nombreux amoureux des livres… pour adultes et pour enfants! Il ne vous a sans doute pas échappé que la littérature de jeunesse a connu un essor conséquent ces dernières années, auteurs, illustrateurs et thèmes se sont multipliés.
Lire des livres à des bébés serait donc une évidence? Dès tout petit? Quel âge? Dans quel but? Tout le monde doit-il être à l’aise avec ça?
Dominique Rateau nous permet de balayer l’historique de ce mouvement notamment le contexte favorable qui a permis cette émergence, tout en soulignant les bienfaits de cette pratique. Aborder ces sujets induit toujours de la subjectivité, mais c’est en cela que l’on peut y trouver un sens, et tel que le souligne l’autrice, avoir des valeurs communes tout en reconnaissant les différences de chacun, n’est-ce pas là la culture? Et une nécessité pour l’humanité?
Un peu d‘histoire…
Lorsque l’on se plonge dans le passé, on se rend compte que lire des livres à des bébés est souvent le travail des grands-parents. En effet, en contextualisant, les familles vivaient à l’époque nombreux sous le même toit, avec plusieurs générations. Ce qui était l’occasion de se raconter des histoires, des légendes, d’écouter les anciens conter des récits lointains lors de veillées. Il a été observé que certaines histoires n’étaient pas racontées aux filles (thème de la guerre, violence, tristesse etc…) et qu’il pouvait y avoir une forme d’exclusion dans la participation à ces moments.
Dans un cadre plus large, le mouvement de l’association A.C.C.E.S. (Actions Culturelles Contre les Exclusions et les Ségrégations) a joué un grand rôle dans l’accès du livre aux tout-petits dans une dynamique d’insertion sociale et culturelle. Suite aux interrogations face à l’échec de l’apprentissage, en excluant qu’il n’y ait que des facteurs psychiques, des psychiatres, psychanalystes et spécialistes de l’enfant se sont réunis autour de ces questions. A.C.C.E.S. a été créé en 1982 à la suite du colloque Apprentissage et pratique de la lecture à l’école qui s’est tenu en 1979 à Paris sous l’égide du Ministère de l’Éducation nationale. L’association a trois grands objectifs :
Améliorer les conditions d’acquisition de la lecture et de l’écriture grâce à la découverte de la langue écrite dès le plus jeune âge,
Développer d’une façon harmonieuse la personnalité de l’enfant,
Travailler à l’égalité des chances de réussite et d’insertion sociale en s’adressant aux tout-petits et à leur entourage.
Afin d’y parvenir, l’association met en place plusieurs actions : mettre des récits et des albums à la disposition des bébés et de leur entourage,former les acteurs de la petite enfance, concevoir et diffuser de outils de réflexion et de travail , réunir les expériences de chacun à travers les observatoires et les séminaires
ATD Quart Monde a également mis en place la « bibliothèque de rue », une grande première.
La bibliothèque de rue consiste à introduire le livre, l’art et d’autres outils d’accès au savoir, notamment informatiques, auprès des enfants de milieux défavorisés et de leurs familles. Cette activité est accessible à tous, car se déroulant sur leur lieu de vie : à l’air libre, dans un square, sur une place, un marché, sur le palier d’un escalier, au pied des arbres, sous un lampadaire, dans des endroits isolés en campagne ou à la montagne.
La bibliothèque de rue est un temps de partage des savoirs extraordinaires qui répond à la soif de savoir des enfants, les réconcilie avec la joie d’apprendre et les encourage à révéler et à partager leurs talents. Par sa régularité et sa durée, elle permet de tisser des relations de confiance entre les enfants, leurs familles et les animateurs, premiers pas vers une participation sociale plus large. Cet espace génère d’autres événements culturels : ateliers de lecture, soutien à l’alphabétisation, création (livres, fresques, spectacles, etc…).
Les bibliothèques de rue deviennent ainsi un pont vers l’extérieur, bibliothèques municipales, écoles, clubs sportifs ou informatiques, théâtres, afin que les enfants participent aux activités de tous et s’y épanouissent. Je vous invite à visiter leur page internet, très enrichissante!
Tout ceci est intervenu dans un contexte culturel et social favorable. A la fin des années 1980, des offres culturelles se sont développées en faveur de la petite enfance, la littérature enfantine s’enrichit, car un retard de la France par rapport aux autres pays a été observé, ainsi qu’une inquiétude quant à l’illettrisme.
De nombreux spécialistes ont traité de ce sujet, de Winnicott ( développant le concept de mère suffisamment bonne CF le billet précédent), à Spitz (CF hospitalisme) en passant par Dolto (en sensibilisant le grand public à l’importance de la parole adressée aux bébés). On distingue deux types de langue: la langue des faits et la langue du récit. La première se vit en présence de l’autre, la seconde, est une narration qui situe un environnement dans le temps et l’espace. Le temps fort de l’élaboration de la langue se situe entre 1 et 3 ans, donc très jeune. Les livres permettent aux bébés de rencontrer la forme de langue du récit, complétée par le bain langagier dans lequel il baigne lorsque son entourage s’adresse directement à lui. « Une mère allant suffisamment bien matériellement et psychiquement ne donne pas les soins en silence, elle parle, fait des confidences sur la joie d’être mère, sur les duretés de la vie, sur ce qu’elle a à faire et sur le temps qu’il fait etc… » Renée Diatkine (psychiatre et psychanalyste). Il va même jusqu’à dire qu’un enfant peut perdre ses capacités de communication dans un contexte défavorable.
Abordant la fusion mère-enfant, Arlette Pellé (psychanalyste) parle de « complétude » dans une identification totale, en miroir, captation dont il faut sortir pour pouvoir parler en tant que sujet et se constituer comme tel. Mon « je » n’est pas dans mon patrimoine génétique, le « je » vient des autres. Il est né, il a éclos, car on m’a dit « tu ». Tout est dans la rencontre, c’est l’humanité qui me fait « je »… » Albert Jacquard (chercheur et essayiste).
Pour Danielle Bouvet (orthophoniste) « la langue maternelle serait ce pont que la mère lancerait à son enfant, pour le faire passer de sa langue à lui qu’elle comprend à la langue des autres dont il pourra alors être compris ». La langue permet à la fois cette proximité et cette distanciation, tout comme la lecture d’un livre à un enfant, où l’adulte et l’enfant sont à la fois proches mais où le livre sert de support et de tiers.
Finalement ce livre est à la croisée de beaucoup d’autres sujet traités lors des précédents billets: le développement de l’enfant, le langage et l’importance du livre. Dominique Rateau n’oublie bien sûr pas de citer des grands classiques de la littérature enfantine.
Continuons à faire des projets autour du livre, à le faire vivre, à l’inviter au sein de nos foyers et de nos collectivités. Gardons en tête ces moments magiques durant lequel les yeux des enfants brillent en écoutant le lecteur.
Dominique Rateau est orthophoniste de formation, elle a exercé une mission livres-petite enfance en Aquitaine au sein du Centre régional des lettres de 1990 à 2004. Elle préside l’agence Quand les livres relient et fait partie du collège Spirale.
Pour aller plus loin:
« Guide à l’usage des parents d’enfants bilingues » Barbara Abdelilah
« Enfances plurilingues » Gilbert Dalgalian
« Du langage aux langues » Ranka Bijeljac et Roland Breton
« Il est un rêve, le premier au Panthéon des illusions et des
espoirs des parents, l’essentiel objet de leurs désirs : faire en sorte que
leur bébé, jamais, ne pleure ».
Le bébé humain est, parmi les
mammifères, l’être le plus immature à la naissance, il lui faudra des mois, des
années pour se développer complètement.
Ce nouveau-né, qui vient de vivre l’un
des plus gros traumatismes de sa vie en passant de la vie in-utéro à
l’environnement extérieur, va devoir trouver des stratégies pour s’adapter et
se faire comprendre. Pour cela, le bébé va créer du lien avec ce et ceux qui
l’entourent pour ensuite pouvoir en créer avec lui-même.
Qui dit lien dit attachement. Deux
grands modèles théoriques ont largement été débattus à ce sujet, à la fois dans
la complémentarité et l’opposition. Sigmund Freud (médecinneurologueautrichien, fondateur de lapsychanalyse) avec son approche psychanalytique mettant
l’importance du lien en second plan et plus récemment John Bowlby (psychiatreetpsychanalystebritannique), qui a prouvé l’essentialité de l’attachement à
travers ses expériences.
Tout cela pour aboutir au postulat
suivant : « un bébé tout seul n’existe pas », comme si bien
dit par notre ami Donald Winnicott (pédiatre,psychiatreetpsychanalyste).
Pourquoi ce charabia
psychologique ? Pour en arriver au choix du livre d’aujourd’hui
« bébé, dis-moi pourquoi tu pleures ». Ce fameux nouveau-né a trouvé
le moyen d’entrer en relation avec son environnement : le pleur.
Qui n’a jamais voulu faire demi-tour
en rentrant dans un restaurant dans lequel un bébé hurle ? Qui n’est
jamais rentré dans une crèche en se disant « je ne pourrais pas travailler
dans un lieu aussi bruyant » ? Et personne n’est à blâmer.
Ces cris, à la fois redoutés et
presque « attendus » (car moyen d’expression principal) composent le
premier langage de l’enfant. Ils sont à la fois signe, signal et symptômes.
Leurs fréquences, intensités, variabilités en font une communication à part
entière, que parents et professionnels, apprendront à décrypter au fur et à
mesure de la relation.
Jacky Israël dresse dans son ouvrage
un large panel des significations de ces manifestations. Du premier cri
« de la vie », aux pleurs d’appel, de faim, de sommeil, de douleur,
d’inconfort des premiers jours de vie aux pleurs plus diversifiés (réveils
nocturnes, pleurs de refus, colère, accident, maladie) qui vont peu à peu se
mettre en place avec le développement du bébé.
Il aborde également les différentes
situations que les parents peuvent rencontrer : déplacement professionnel,
changement de nounou, vacances chez les grands-parents, séparation etc…Loin d’un dictât sur l’éducation, cet ouvrage
permet de se rendre compte que tout le monde passe par les mêmes étapes, et
ainsi de se sentir moins isolé, et surtout, il déculpabilise !
Riche de connaissances sur le
développement de l’enfant in-utéro, Jacky Israël balaye avec brio l’éveil des
sens durant la grossesse et tout ce qui se joue lors de l’accouchement et juste
après (peau à peau, mise en place de l’allaitement etc..).
Les places du père, du pouce, de la
tétine, du doudou et de l’autorité sont également abordées.
Si vous êtes jeune parent ou
professionnel accompagnant un nourrisson, si vous êtes perdu dans les ouï-dire
des psychologies de comptoir « laisse-le pleurer il fait un
caprice », «si tu le prends trop dans les bras il va s’habituer et tu ne
pourras plus rien faire », ce livre est fait pour vous.
Rappelons-nous que le bébé a passé
neuf mois (ou moins) à l’intérieur même de sa mère, qu’il va encore croire
pendant de longs mois qu’il ne fait qu’un avec sa mère (ou autre figure
d’attachement !), qu’il arrive dans un monde où tout paraît agressif (les
bruits, la luminosité, les températures), qu’il doit s’adapter à beaucoup de
choses en même temps (son corps qui n’est plus flottant, l’alimentation, le
sommeil, le mouvement autour de lui) et éloignons-nous des notions de caprice
pour un si petit être.
Nous pouvons résumer tout cela
simplement en une phrase, pour le bébé « je pleure donc je suis ».
Jacky
Israël était un pédiatre reconnu,
néonatologiste, auteur de nombreux ouvrages notamment sur le bébé. Il était
également membre du Groupe
de recherche et d’études de la naissance et du nouveau-né ainsi que responsable de la rubrique « Quoi de
neuf docteur » de la revueSpirale,
la grande aventure de Monsieur Bébé. Jacky Israël nous a quitté en 2015.
Pour aller plus loin :
« À la recherche du temps gagné,
comment l’olfaction participe à l’adaptation du nouveau-né » et
« L’audition prénatale, quoi de neuf ? » L’aube des sens 2,
coordonné par J.Israël et D.Rapoport
« Trente ans
d’intranquilité », L’aube des sens, coordonné par J.Israël et D.Rapoport
« Le sommeil de l’enfant »,
M-J. Challamel
« Entendre la douleur du
nouveau-né : aux confins de l’oubli », O.Fresco
« Les empreintes
sensorielles », Revue des auxiliaires de puériculture, N°16, J. Israël
« Maman, pourquoi tu
pleures ? », Les désordres émotionnels de la grossesse et de la
maternité, J. Dayan
Lire en chantant des albums de comptines, Sylvie Rayna, Chloé Seguret, Céline Touchard, Erès.
Voilà, il est sortit, le nouveau livre qui émane de l’association LIRE à Paris, pour la quelle je travaille. Et cette fois ci j’ai eu le plaisir d’en coordonner l’écriture, aux cotés de Sylvie Rayna et Céline Touchard.
Il y est question du travail auprès de jeunes enfants, avec des albums qui se chantent. Il croise le regard de praticiens, de chercheurs et de scientifiques sur ces livres et sur les pratiques multiples auxquelles ils donnent lieux.
Vous pouvez lire des extraits issus du livre ici ou encore là.
Et comme je ne peux pas en faire une analyse, je vous propose le texte de la quatrième de couverture:
Premières formes de littérature ou objets hybrides, les albums de comptines rapprochant les générations et les cultures. Ils participent à la nidation culturelle, au travail d’enracinement, dont le besoin est immense dans un monde où rapidité, mobilité, migrations sont la norme.
Les différentes contributions à cet ouvrage soulignent, dans différentes situations données à voir et à entendre, cette bulle d’intimité et de tendresse créée autour de ces albums d’un genre nouveau, où adultes et enfants se voient offrir de parvenir ensemble à un lieu originaire et profond tant en eux-mêmes que dans la relation qui les unit Cette « enveloppe », proposée à la découverte du beau, du drôle de l’inattendu, de l’émouvant…, contribue en tant qu’espace de créativité, à une alternative culturelle, éthique et politique aux injonctions consuméristes, utilitaires et normatives de la société.
En cohérence avec les missions de L.I.R.E à Paris, cet ouvrage rend compte de nouvelles pratiques de lire-chanter avec les tout petits -dans les bibliothèques, les lieux d’accueil, les P.M.I…- destinés à éveiller chez tous et en particulier ceux et celles qui sont éloignés du livre et de la lecture, le désir du livre le désir de « lire avec », dans une optique d’ouverture culturelle et de plaisir.