Éduquer avec bienveillance, Outils et pièges de la relation parents-professionnels

Auteur : Frédérique Hirn

Editions : Philippe Duval

Prix : 9.50€

Pages : 134

Frédérique Hirn nous présente un ouvrage, pas un énième manuel de bienveillance, mais traitant de la relation parents-professionnels. Pourquoi et comment vit cette relation, avec comme premier outil, la qualité de cette relation mais aussi ses pièges.  D’autres outils y sont développés, comme le cadre et les postures d’accompagnement ainsi que d’autres actions pouvant être mises en place.

Afin de savoir de quoi on parle, quelques définitions…

La « bienveillance », mot très tendance dans notre société depuis quelques temps, est définie dans le dictionnaire comme « la capacité àse montrer indulgent, gentil et attentionné envers autrui, d’une manière désintérèssée et compréhensive »

La « bientraitance » est : la démarche visant à reconnaître et à permettre l’expression du sujet désirant ».

« La parentalité », telle que la définie Didier Houzel (pédopsychiatre et psychanalyste) en trois axes : l’exercice, l’expérience et la pratique.

Reprenons la fameuse phrase de D.W Winnicott en 1943 « un bébé ça n’existe pas » … On n’accompagne pas que des enfants mais des familles. Deux phénomènes s’y jouent : l’affect des parents et le besoin de reconnaissance des professionnels. Il n’existe pas de bon modèle éducatif, chacun a le sien et cela nécessite de prendre du recul pour comprendre l’autre. C’est une relation à 3, comme, si bien décrit par F.Hirn : une construction de ponts. Les professionnels de la petite enfance sont avant tout des hommes (bon oui, je sais…) et des femmes qui ont leur propre vision de l’éducation, ce qui leur demande une distanciation dans leurs pratiques au travail.

Nous savons qu’un écart trop important entre ce que l’enfant vit à la maison et dans sa structure accueillante est déstabilisant et met à mal « le sentiment continu d’existence de l’enfant » (toujours de notre cher D.W Winnicott) dont il a tant besoin pour s’épanouir.

L’environnement dans lequel l’enfant évolue un rôle fondateur, en termes de repères et de contenance, pour participer à la base essentielle de construction de soi et doit donc amener un climat de confiance entre parent et professionnel.

Dans une relation de confiance, F.Hirn nous indique qu’il y a deux types de savoir : le savoir expérientiel (la connaissance véritable de la personne) et catégorielle (les représentations que l’on s’en fait). Ces deux approches doivent se compléter sans empiéter l’une sur l’autre. L’individualité de chaque enfant, de chaque parent demande d’y apposer nos connaissances tout en les ajustant.

Équilibre si délicat, que Didier Houzel définit la pratique de l’accompagnement comme un ART.

F.Hirn souligne que faire ensemble c’est bien mais PENSER ensemble est le vrai socle d’un partage de qualité. Elle met le doigt aussi sur ce que nous connaissons tous : les parasites des relations. Quels sont-ils ? Les représentations, les projections, l’incompréhension… Toute une alchimie !

Une fois ces bases posées, F.Hirn définit cette fameuse qualité comme premier outil de la relation. Une relation se construit petit à petit, et demande d’être attentif aux besoins de l’autre, d’avoir le désir d’aller à sa rencontre. Ceci engage des notions de distanciation, d’énergie, d’engagement. C’est une démarche PARTICIPATIVE, une action coopérative.

Pour être attentif à l’autre, elle nous montre une belle image : mettre en pause son monologue intérieur.

Mais alors, quels sont les pièges de ces liens tissés ? L’Autre n’est pas soi et ainsi, penser et se mettre à sa place court-circuite la relation. Pour accéder à l’autre, il faut le laisser exprimer ses besoins, ses envies et ses ressentis, ce qui entraîne de laisser une place à l’insaisissable.

De par nos formations, nous avons tout un tas de « phrases boucliers » ex cité : « on ne réveille pas un enfant qui dort » et de certitudes, qui peuvent parfois passer pour l’avis d’un EXPERT. Or, quelle place laissée à la complexité des relations et de la co-éducation ? Laissons entrer les nuances et l’humilité, le dialogue des différences et des cultures…

Le conseil est un outil d’accompagnement sauf s’il se transforme en injonction ou parole sainte.

F.Hirn attire l’attention sur l’importance du CADRE posé dans nos institutions, elle en fait même un outil de relation. On le sait tous, la réalité est plus complexe que les représentations. C’est un grand enjeu car il y a à la fois les demandes des familles et le fonctionnement des collectivités. Il y a une nuance entre réponse aux besoins (oui !), et écouter les désirs sans forcément les satisfaire systématiquement.  Sans oublier aussi qu’il y a les très exigeants et ceux entrés dans une relation de « client-prestataire », tendance qui peut avoir tendance à se développer de par le fonctionnement des structures actuellement qui doivent être de plus en plus gestionnaire financière.

Pour poser ce cadre, les outils écrits comme le règlement de fonctionnement sont une base de respect des pratiques. À condition de le regarder ensemble et non de le signer en cinq minutes dans un bureau !

Comme troisième outil, les postures d’accompagnement en elles-mêmes. Qu’est-ce qu’accompagner ? « Se joindre à quelqu’un pour aller dans la même direction en même temps que lui » Maela Paul (Docteur en sciences de l’éducation). F.Hirn attire notre attention sur la sollicitude, qui peut nous venir naturellement mais qui peut être violente si elle n’est pas voulue. Également, ne parle t’on pas trop DES parents mais rarement DU parent ? Piste de réflexion…

Le guidage c’est laisser l’autre trouver lui-même les solutions car l’accompagnement n’est pas une RÉPONSE. Mais une capacité à ajuster nos positionnements en fonction des besoins. C’est donc une capacité aidante d’écoute.

Si l’Autre arrive à exprimer ses difficultés, besoins, émotions c’est déjà un pas en avant car exprimer c’est accepter de reconnaître et active l’effet « miroir ».

D’autres outils peuvent être développés : les transmissions, les réunions à thèmes, les groupes de paroles… Il ne tient qu’à chacun de se les approprier…ensemble.

En conclusion, nous nous interrogerons toujours sur nos relations car elles demeurent complexes, déjà notre propre « moi » ne nous est pas complétement connu et maîtrisable alors celui d’autrui…

Le tout est préserver sa CAPACITÉ DE QUESTIONNEMENT.

Pour aller plus loin:

« Heureux en crèche, un projet de coéducation parents-professionnels » Deroo A

« Bien-traitance, un trait d’union à conquérir » 1001 BB n°135

Développement du jeune enfant, mode d’accueil, formation des professionnels, Rapport Giampino

Frédérique Hirn est psychologue clinicienne et formatrice.