Aux champignons, Camille Allessandroni, le diplodocus, 2024, 14€50
Je suis sûre qu’en cet automne au climat morose je ne suis pas la seule a rêver d’une promenade en forêt.
Enfiler une tenue bien chaude pour aller fouler les feuilles mortes, avant de rentrer dans une maison douillette.
C’est exactement ce que va faire la petite Louison, en compagnie de son papi. Équipés de bottes et blousons, ils ont pris le panier et vont aux champignons.
Il faut aller jusqu’au grand chêne, mais c’est surtout l’occasion d’une promenade. Avec un texte entièrement dialogué qui n’est jamais trop bavard, on suit les protagonistes qui apprécient leur ballade en pleine nature.
Une rencontre avec un escargot, une cabane improvisée. Pas de renards, ni de chouettes, car ce sont des animaux nocturnes, mais, chut, qui vient par ici? Un lapin ici, une biche là, c’est plein de vie ce bois!
Une cueillette de feuilles mortes, des châtaignes pour le gouter, on en oublierait presque qu’on était venus pour les champignons, qu’on ne trouvera pas cette fois… Mais ce n’est que partie remise.
Sur les images les couleurs automnales se superposent, comme s’entassent les feuilles mortes sur le chemin. Elles provoquent des sensations sur le lecteur, on devine leur épaisseur, leur texture.
C’est un album très réconfortant, que me ferait presque aimer cette saison !
1, 2, 3… sommeil ! Bernadette Gervais, les grandes personnes, 2024, 16€50
1, 2, 3… Le soleil se couche couche couche. 1, 2, 3… la lune monte monte monte. 1, 2, 3… La nuit tombe tombe tombe.
À chaque page le texte répété s’estompe, comme s’efface peu à peu le réel derrière les petites paupières qui irrésistiblement se ferment ferment ferment, malgré la volonté de l’enfant qui lute pour rester éveiller encore un peu.
Chaque page est comme une petite marche qui rapproche le jeune lecteur du moment où il va réellement perdre contact avec son environnement pour glisser vers le sommeil.
Ce n’est pas toujours aussi facile de lâcher prise, mais dans cet album tout nous conduit en douceur vers le monde des rêves, sans heurts ni rupture.
Alors que la nature au dehors passe du jour à la nuit, à l’intérieur les rituels quotidiens sont accomplis dans une totale quiétude.
Le pyjama enfilé, les dents brossées, le doudou enlacé.
Les images au pochoir sont rassurantes, elles disent la chaleur du foyer, tout en faisant un focus sur les objets bien connus des enfants, façon imagier un brin rétro.
On le sait, les tout-petits sont sensibles aux rythmes, aux sonorités, ils sont attirés par la prosodie d’un texte peut-être plus encore que par son sens.
À la lecture de cet album, une petite musique se joue, dans laquelle les images font pleinement partie de la partition et contribuent au rythme.
On se dirige tranquillement vers l’endormissement, à tout petits pas, plus sereinement que jamais.
Alors on ferme l’album et on ferme les yeux, 1, 2, 3… sommeil , nous voilà apaisés, prêts pour une bonne nuit.
C’est beau, c’est doux, et ça berce les bébés aussi sûrement qu’une chanson.
Peur à peur, Chiara Mezzalama, Mariachiari Di Giorgio, éditions des éléphants, 2024, 15€
C’est un album avec deux narrateurs, qui racontent chacun à la première personne, alternativement, l’histoire qui les réunit.
D’abord elle. Une fillette qui habite Venise. Elle y va à l’école, sauf quand l’eau monte trop haut, y fréquente les vieux cafés pour boire du chocolat chaud quand la brume envahit la ville, se promène sur les passerelles et regarde les poissons.
Puis lui. C’est un pigeon, il vit à Venise, vole au-dessus des palais et se fait nourrir par les touristes.
Mais la vie n’est simple ni pour lui ni pour elle.
Parce qu’elle a peur des pigeons. Parce qu’il a peur des enfants.
Venise est pleine de pigeons. Venise est pleine d’enfants.
Et l’un comme l’autre ne subissent pas une simple inquiétude ou une peur enfantine comme celle du noir ou du grand méchant loup. Non, ils sont sujets à une véritable phobie, et c’est très compliqué pour eux d’y faire face au quotidien.
Jusqu’au face-à-face inévitable entre l’un et l’autre, où, chacun étant pétrifié par sa propre peur, ils sont obligés de s’observer. Rien ne bouge. Et ils reconnaissent chacun dans le regard de l’autre quelque chose de trop familier. Cette terreur qui les envahit, elle est aussi en face.
L’un à droite de la page, l’autre à gauche, le temps est suspendu alors que leurs regards se confrontent, puis un petit élément perturbateur tout à fait inattendu vient détendre l’atmosphère, et le tour est joué, la rencontre peut avoir lieu. On est toujours moins effrayé par de ce que l’on connaît, n’est-ce pas ?
J’ai beaucoup aimé cet album pour son histoire très originale et parce qu’elle permet d’aborder très clairement la différence entre une peur et une phobie (sujet bien moins traité en littérature enfantine).
Et puis, les images! Oh, comme elles sont belles les rues de Venise, comme ils sont beaux les canaux! Avec un traitement assez cinématographique, de jolis travellings au fil de l’eau jusqu’à la vue plongeante finale, les illustrations nous font superbement visiter la ville.
Betty, Marie Norin, Elisabet Ericson, l’étagère du bas, 2024, 15€
La narratrice est une jeune femme, aux cheveux qui tombent le long de son visage. Dans sa posture on sent quelque chose d’empêché chez elle. Ce n’est pas de la rigidité, ça ressemble plutôt… Je ne sais pas, un sens trop aigu de ce qui se fait et de ce qui ne se fait pas, comme une bonne éducation excessive, comme s’il n’y avait pas beaucoup de place pour la fantaisie.
Elle vit à la campagne, une vie solitaire que l’on imagine sans grandes joies. Jusqu’à l’arrivée de Betty.
Toute en rondeur, en mouvement, elle est séduisante par sa joie de vivre, elle a beaucoup voyagé et a plein de trucs dans sa voiture. On la devine volubile, elle prend sa place dans l’espace, à l’opposé de la narratrice elle n’est jamais gênée, ne s’excuse pas.
À la faveur de la bonne éducation de son interlocutrice, elle s’installe dans la maison, la rempli de ses objets, de sa vie à elle, réduisant à peau de chagrin l’espace restant.
Combien de temps sera-t-elle tolérée?
C’est drôle, la première fois que j’ai lu cet album j’ai pensé qu’il évoquait des préoccupations d’adultes. Pourtant à bien y penser, les amitiés toxiques sont légion dans l’enfance (et l’adolescence).
C’est un livre à avoir en maternelle et même plus tard, les enfants y trouveront matière à réflexion.
Sans morale excessive, sans insister sur la supposée gentillesse de l’une ou méchanceté de l’autre, cette histoire montre qu’on peut renoncer à une amitié quand on n’y trouve plus son compte. Et même peut-être qu’il n’y a pas de regret a avoir. Quand la narratrice se débarrasse enfin de Betty, elle semble avoir gagné en assurance, mieux profiter de sa vie, aussi solitaire soit elle. D’ailleurs, elle y a gagné la présence d’un chien.
L’histoire est très bien menée et donne à penser, elle s’adresse à la capacité des enfants à penser le monde, je pense que ça vaut le coup de faire connaitre cet album.
Un bisou pour mon frère, Adrien Albert, l’école des loisirs, 2024, 13€50
On le sait depuis son voyage en Antarctique, le petit lapin Simon aime bien se remémorer les bons moments qu’il vient de passer. La dernière fois, ça l’empêchait de dormir, cette fois, ça va lui faire oublier l’heure du bus que doit prendre Tobold, son frère.
C’est qu’ils sont tellement heureux du temps passé ensemble. Vous vous souvenez, Simon avait gravi une montagne de nuit pour rendre visite à Tobold, c’est dire s’il l’aime. Là, ils boivent une menthe à l’eau, tranquille, en se remémorant la journée qu’ils viennent de passer. Je vous la raconte pas, vous la découvrirez en images, mais sachez qu’il y avait un tractopelle, de la vitesse, un peu de gourmandise (avec des fraises sur le dessus), un manège, un film en 3D, bref, tous les ingrédients d’une journée bien remplie. En une double page, tout ça est raconté en 17 vignettes, comme dans un film à ellipse, avec la petite musique qui va bien et tout.
Mais voilà le bus, il faut filer, vite, ah oups, trop tard pour le bisou, Tobold monte à bord juste à temps.
Et c’est là, dans le bus du retour, que l’aventure commence. Avec les rebondissements les plus inattendus, le rythme effréné que l’on connaît chez cet auteur, des péripéties qui ne cherchent pas à être crédibles mais des sentiments toujours très justes. Et puis, cette tendresse qui unit les deux frères, tellement touchante. Parce qu’il faut le dire, la fratrie ce n’est pas que rivalité, il est bon de montrer aussi de temps en temps qu’avoir un frère c’est chouette.
Ça m’a fait drôlement plaiz de retrouver la petite bouille de Simon, et les mouflets aussi adorent découvrir une nouvelle aventure de ce très attachant petit lapin.
Le livre extraordinaire des bébés animaux, Simon Treadwell, little urban, 24€
Ha ha, ça y est, je l’ai, LE livre qui va faire de moi la star des bibliothèques hors les murs, la vedette des lectures dans les écoles, la dealeuse officielle de livres documentaires pour les mouflets, bref, j’ai le livre accroche ultime pour les enfants de maternelle et au-delà. Car s’il est difficile de résister aux images d’animaux de cette collection, il est carrément impossible de ne pas craquer devant ces bébés animaux ! Vous les avez vus les grands yeux ronds de l’ourson ? Hé bien, dedans, vous trouverez aussi des guépardeaux qui se chamaillent, un zébreau qui fait ses premiers pas, un blanchon qui nous regarde dans les yeux, et un suricate qui fait la commère, comme il se doit. Et encore plein d’autres animaux, une quarantaine en tout, avec leurs caractéristiques, une fiche d’informations précise, leurs lieux de vie. Car nous avons bien affaire à un vrai documentaire, et non à un simple imagier, qui présente donc des espèces variées (oui, bon, j’ai choisi les plus racoleuses, mais il y en a aussi qui ressemblent moins à des peluches, comme la tortue plate ou la salamandre tachetée) et des précisions de qualité. Je suis persuadée que plus on connaît et comprend les animaux et mieux on les respecte donc je suis toujours très heureuse quand les enfants me demandent de lire le texte. Mais ça n’est pas toujours le cas et je ne m’en formalise pas. Ils piochent selon leurs centres d’intérêt ou leur capacité d’attention, et pourront continuer d’apprécier cet album en grandissant (la collection a toujours beaucoup de succès quand je travaille en école élémentaire, et je l’imagine aussi assez bien dans un CDI de collège). Comme toujours dans cette collection, les images sont impressionnantes de réalisme au point que certains peinent à croire qu’il ne s’agit pas de photos, mais bien de dessins. Et le grand format bien sûr attire immanquablement le regard. Bref, voilà qui va remplacer dans mes séances de lecture le tout aussi joli livre extraordinaire des chats, qui a mystérieusement disparu de mon fonds (un enfant a dû l’aimer tellement qu’il n’a pas pu s’empêcher de partir avec, je ne vois que ça comme explication.)
Le roi est occupé, Mario Ramos, Pastel, 1998, 16 €.
Je poursuis mon exploration de l’œuvre de Mario Ramos, toujours en vue de cette intervention (que vous pouvez suivre en visio si ça vous branche). À vrai dire, mon texte est prêt, mais, étant contrainte par le temps, il y a plein de livres dont je ne vais pas parler. Dont celui-là, pour lequel j’ai pourtant de chouettes observations de terrain avec les enfants.
C’est un livre jeu interactif, l’enfant est invité à chercher sous des rabats les passages secrets qui mènent vers le roi. L’objectif est de trouver le souverain pour lui expliquer « tout ce qui ne va pas dans le royaume ».
On en profite pour visiter cet archétype de château-fort, avec son vocabulaire spécifique. Partout sont cachées des créatures vertes plutôt joviales.
En fin d’album, on découvre enfin le roi, qui a délaissé son trône pour s’asseoir sur… Les toilettes ! Désolée pour le spoil, mais les réactions des enfants tournent quand même beaucoup autour de cette page. Ils sont ravis de voir que les puissants aussi font caca, et une des réactions qui revient souvent c’est « même la maîtresse va aux toilettes ! » (mes observations proviennent pour beaucoup d’une bibliothèque de rue qui se tient devant une école, le contexte explique sans doute la récurrence de cette remarque.)
On se rapproche de l’album Chhht, lui aussi basé sur des caches à soulever dans un château mais avec beaucoup moins de tension narrative, ici c’est plus doux, on peut s’adresser à des enfants plus jeunes ou plus craintifs. Le roi est occupé nécessite aussi moins de théâtralisation, et quand je le lis les enfants prennent volontiers la parole. Ils me racontent qu’ils n’ont pas peur des monstres (ou alors juste un tout petit peu), ils mémorisent les caches qui mènent au passage secret sur chaque page et sont fiers de me montrer qu’ils l’ouvrent du premier coup, ils commentent les actions des sujets. Aucun enfant n’a relevé que le roi était un chat alors que tous les autres personnages sont des souris. Pour ce que j’en ai vu les enfants sont assez peu inquiets de la salle des tortures où le bourreau chauffe ses instruments. Par contre, ils manifestent un vif intérêt pour la salle du trésor, et certains préféreraient faire main-basse sur les coffres que poursuivre le chemin en direction du roi. Un enfant m’a dit « hop, je prends ce coffre, hop, je remonte l’escalier, hop, je ressors comme je suis venu. » Il a tourné les pages en sens inverse pour revenir à la première et s’est ravisé « en fait, j’y retourne et je prends tous les coffres, sur mon dos ! »
Il a tout de même accepté qu’on aille jusqu’au bout du livre « pour voir ». À la dernière page, découvrant le roi sous le cache, je lui dis « alors, qu’est-ce qu’on lui dit maintenant qu’on l’a trouvé ? » Il m’a répondu « moi c’est bon, j’ai les coffres maintenant, j’ai plus de problème à lui dire ».
Mais quand un petit groupe d’enfant se constitue autour de cet album, en général les discussions vont bon train quant à ce qu’il faut dire au roi. C’est assez marrant de voir comment les gamins de maternelle ont des idées de ce qui ne va pas dans leur royaume personnel. Les revendications tournent beaucoup autour du menu de la cantine ! J’aime bien la façon dont Mario Ramos prend l’enfant par la main pour le rendre acteur et lui donner un pouvoir d’agir. En lui faisant ouvrir les caches, il l’invite à agir, et en lui proposant cette histoire, il l’invite à réfléchir. D’une façon générale, les livres de cet auteur se veulent émancipateurs, ils font confiance à l’enfant, le reconnaissent dans sa capacité à comprendre et à penser le monde. C’est tout simple, c’est ludique, c’est accessible, et en même temps c’est futé et juste assez subversif. Et en plus, c’est drôle, que demander de plus?
Les gens de la plage, Maële Vincensini, Cédric Abt, Thierry Magnier, 2024, 18€50
Sur la plage de Ty Anquer, une baleine est échouée. Les habitants du village veulent spontanément lui venir en aide, ils s’arment de pelles et de seaux. Mais déjà une barrière est dressée devant la baleine, un policier s’interpose entre elle et les gens de la plage. Personne ne passe, c’est interdit.
Seuls les pompiers peuvent tenter quelque chose. Consternation et impuissance du côté des villageois, qui regardent avec inquiétude les pompiers tenter maladroitement des soins peu appropriés.
Voilà qu’arrive une pirate. Elle fait figure d’autorité, sait sauver les baleines et l’a déjà prouvé. Elle fait jouer ses relations et obtient le droit de passer, mais se rend rapidement compte que seule elle n’y suffira pas.
Face à l’urgence, les gens de la plage décident finalement de passer outre les consignes et forcent le passage. Ils aident la pirate juste à temps, avant que la marée ne redescende.
Il y a quelque chose de très apaisant dans les grandes illustrations en pleine page, en particulier dans celle, en fin d’album, qui montre la baleine libre dans les eaux. On trouve aussi du réconfort dans la solidarité dont font preuve les villageois, le naturel avec lequel ils choisissent ce qui est juste plutôt que ce qui est légal.
Mais c’est tout de même la peine et la colère dominent tout au long de la lecture de cet album. Colère à l’idée des règles, aussi réelles qu’absurdes, qui imposent des barrière meurtrières. Peine à la pensée des naufragés qui ne reçoivent aucun secours.
Heureusement, les gens de la plage ont su s’unir, dépasser leur sentiment d’impuissance, se rebeller et agir. Car c’est bien de notre pouvoir d’agir que parle cet album. Heureusement, la littérature enfantine nous offre une vision de l’humanité plus optimiste que les nouvelles du monde. Heureusement, il reste un espoir et les valeurs telles que la solidarité ne sont pas encore totalement criminalisées. Heureusement, on a encore le droit de montrer que pour sauver ceux qui échouent sur nos plages (baleines ou personnes) il faut parfois braver l’autorité.
Un brouillamini, Karen Hottois, Vincent Pianina, Albin Michel jeunesse, 2024, 18€
Chaussons nos lunettes et allons ensemble observer la petite société du jardin, bien vivante au cœur de l’hiver. Cela va nous demander de l’attention, on ne rentre pas si facilement dans l’intimité du petit peuple minuscule.
D’emblée, on comprend que ver de terre, mite ou sauterelle ont des aspirations bien humaines. Et que la communication entre eux n’est pas plus facile que la nôtre, elle a son lot de quiproquos et malentendus ! Et puis, c’est compliqué, le jardin enneigé est vaste, avec des petites pattes ce n’est pas si simple d’aller de chez l’un à chez l’autre (et sans patte du tout comme pour l’escargot, je n’en parle même pas).
C’est qu’ils n’ont pas internet, eux, ils communiquent à l’ancienne. Les lettres sont convoyées sur la neige par le facteur sans gambettes, l’escargot justement. Il fait ses allers-retours entre les protagonistes qui eux-mêmes se mettent en mouvement pour aller se rencontrer, qui cherchant l’amour, qui cherchant l’amitié. Cela fait plusieurs histoires parallèles, qui se croisent parfois, se ratent souvent, créent des opportunités des plus inattendues, parfois à la faveur d’une méprise.
La mise en page matérialise ces histoires qui se jouent dans le même temps, avec l’usage de bandes parallèles qui s’additionnent sur la page blanche comme neige. C’est comme plusieurs petites scènes qui s’allumeraient tour à tour et parfois toutes en même temps.
Quelques images pleines pages replacent les petits espaces dans le grand, les maisons de chaque personnage dans le cadre plus large du jardin.
Notre regard fait des allers-retours entre les différentes scènes et notre attention passe d’un personnage à l’autre, la narration est complexe, comme l’indique le titre.
Un brouillamini est de ces albums qui se savourent d’autant plus à la relecture. Les choses se positionnent les unes par rapport aux autres, prennent sens, l’histoire se tisse quand on a dépassé la première impression un peu déstabilisante. On s’attache de plus en plus au destin de ces minuscules personnages, leurs aspirations sont touchantes, leur maladresse émouvante.
C’est un album auquel je reviens avec plaisir mais qui nécessite de prendre le temps. Pas toujours facile à proposer dans le cadre de mon travail, il se prête par contre parfaitement à une lecture familiale, plus intime.
Le meilleur de tous les papas, Peter Horn, Jessica Meserve, Didier jeunesse, 2024, 13€90
Un peu de tendresse, ça peut pas faire de mal. Surtout en automne (j’aime pas l’automne, c’est une saison qui créé chez moi un gros besoin de réconfort). Ici la douceur s’exprime dès la couverture, ce bisou de nez entre papa tortue et son petit respire la complicité.
Le texte est un dialogue entre eux. Seb, le petit, demande à son père ce que savent faire les papas. Mais tous sont différents et ont leurs propres aptitudes.
Au gré d’une promenade dans le jardin, ils observent ensemble, dans un jeu de devinette, les dyades père/enfant. « Un papa ça peut gazouiller, et dire à ses petits qu’il est temps d’apprendre à voler »
« Ce papa là, quand ses petits savent marcher, il leur montre comment sautiller et faire des bonds. Qui c’est? »
Ça fourmille dans ce jardin, et les familles sont souvent nombreuses. Une ribambelle de chauves-souris, une nuée de lucioles et une chorale de grenouilles côtoient lapins, ou mille-pattes.
Des images pleines pages pour les plans d’ensemble ou des petites vignettes pour faire un focus sur une des familles nous montre des animaux souriants, aux bouilles expressives.
L’air de rien, on se dirige vers la fin de journée, papa tortue et son petit Seb vont s’installer pour dormir dans une sérénité totale. Car sans surprise aux yeux de son petit, le meilleur de tous les papas, c’est bien celui-là !