Comment poussent les pastèques, Eizô Hirayama, les grandes personnes, 2023, 18€
Il n’y a pas à dire, le noir et blanc donne toujours une certaine classe aux illustrations.
On peut s’étonner de ce choix pour un album sur la pastèque, tant ce fruit se caractérise graphiquement par le contraste du vert de l’extérieur et du rouge de l’intérieur, rehaussé par les graines noires.
Et pourtant, cela fonctionne bien et l’ouvrage est très beau.
Il raconte avec précision le cycle de vie de la pastèque.
Les insectes ont bien sûr leur rôle à jouer. On peut les repérer dans l’image, à condition d’en faire une lecture attentive (ce que font les enfants, ils sont très doués pour voir le détail qui nous avait échappé)
Après la naissance et la croissance du fruit il est cueillit et dégusté par un gourmand invisible. Une nouvelle graine promet une prochaine pousse. Le texte, concis et descriptif fait de Comment poussent les pastèques le plus poétique des documentaires.
Publié pour la première fois au Japon en 1974, cet album frappe par la force de ses illustrations, qui n’ont rien de désuets et la qualité de son texte, épuré et agréable à lire à voix haute.
Ses imagiers où des caches en noir et blanc recouvrent une photo ont toujours un succès fou auprès des enfants.
Il a déjà exploré plusieurs thématiques, les engins d’abord, puis les animaux, et les objets.
Les formats aussi ont variés, aux albums format moyen du début ont succédé des petits cartonnés.
Mais la patte de l’auteur est toujours là, et les enfants reconnaissent sans peine la série.
Dans Imagier des outils, il y a des instruments très connus et d’autres un peu moins. Une petite phrase explique la fonction de chacun.
Je ne sais pas si tous les enfants retiendront que la grelinette sert à aérer la terre, mais je suis convaincue qu’il seront, comme moi, séduit par le mot lui-même.
Pour les tout-petits, il y a le plaisir du contraste et du noir et blanc, pour ceux qui maîtrisent tout juste leurs mains le jeu de soulever les caches, pour les plus grands le plaisir de connaitre la fonction de chaque objet. Et les adultes apprécieront la qualité des photos.
Moi j’ai bien aimé y voir une fillette qui répare son vélo.
Bref, chacun y trouvera ce qu’il cherche et tout le monde appréciera ce petit album.
Après le très joli Hue !Colette, sorti l’an dernier, nous retrouvons ici les gravures de l’illustratrice Catherine Louis dans un nouvel album tout carton en petit format.
Ici ce ne sont pas des animaux mais des fruits et des légumes qu’elle nous propose de découvrir.
Chaque double page montre deux états d’un même végétal.
De face ou en coupe, entier ou coupé en rondelle, seul ou en quantité.
Les images sont en noir et blanc, mais un mot coloré indique de quelle couleur est la chose représentée. Cela fait un drôle d’effet au lecteur, on imagine spontanément la silhouette noire colorée. C’est presque frustrant et en même temps, le noir et blanc donne une grande élégance aux images.
Et puis, tiens, une petite fantaisie, à la page de la pomme, qui comme nous le savons peut être de plusieurs couleurs, le procédé change légèrement. Ce qui annonce la chute de l’album, qui se décline sur trois doubles pages et transforme cet imagier en petite histoire, avec son héroïne (dont la présence était annoncée dans le titre) et son lot de surprise.
La couleur advient enfin sur les dernières images très joyeuses.
Depuis Tana Hoban, les livres en noir et blancs sont plébiscités pour les jeunes enfants (en raison entre autre d’une idée fausse selon laquelle ils ne percevraient pas les couleurs). Il est vrai que les petits yeux sont particulièrement sensibles aux contrastes et que les bébés apprécient ce type d’image. Ici ils regardent également avec une grande attention les éléments colorés qui se détachent de la page.
A titre personnel, je suis toujours sensible à la valeur esthétique de la linogravure, qui donne une grande force aux images.
Nuit blanche, Alice Brière-Haquet, Raphaële Enjary, les grandes personnes, 2021, 15€
Vous le voyez, sur la couverture? Juste sous la pleine lune, il est là, le héros de l’histoire.
On le devine à peine, mais la forme évocatrice de ses oreilles ne laisse pas de place au doute. C’est un chat. Gris, comme il se doit, car la nuit, tous les chats sont gris.
Il se faufile sur les toits, agile dans le froid de l’hiver. On reconnaît sa silhouette, qui se détache à peine dans les pages sombres. Tantôt gris sur gris, dans des images toutes en nuances où le jeu de découpe de la page rend les formes visibles. Tantôt noir sur le blanc de la neige, le contraste laisse apparaître un morceau du corps du félin.
Des pages toujours très élégantes et travaillées.
On joue au chat et à la souris. Elle qui est toute blanche se voit beaucoup dans la nuit, mais quand il se met à neiger, la voilà presque invisible.
Le chat saura-t-il lui mettre la patte dessus? Et si, finalement, c’était elle, la véritable héroïne de cette histoire?
La petite souris qui, narguant le chat, se glisse dans la chambre à coucher. Elle a une mission, et le chat, finalement endormi, ne la voit pas glisser une pièce d’or sous l’oreiller.
Chaque découpe, chaque mot du texte, chaque tache de couleur dans la page est pensée et sert la narration. Mais l’ensemble est d’une grande fluidité qui donne une illusion de simplicité.
L’histoire parvient à créer une attente puis une surprise en quelques phrases ciselées.
La réalisation est impeccable, les pages épaisses et solides sans avoir la rigidité du carton. Un vrai livre d’artiste qui reste accessible (par sa solidité, par la simplicité de l’histoire et par son prix qui reste abordable, ce qui n’est pas évident compte tenu des coûts de production de ce type d’ouvrage).
Et comme je suis sûre que vous brûlez d’envie d’en voir plus, je vous propose cette vidéo faite par l’éditeur (attention, vous entrez sur la chaîne youtube des grandes personnes, vous risquez d’y passer des heures à découvrir toutes ces merveilles, je vous aurai prévenus)
J’ai d’abord accueilli la nouvelle plutôt froidement. Ah, tiens, un nouvel album sur ce sujet tellement à la mode. Bon, ça aura au moins le mérite de mettre un peu de diversité, parce que voir tous mes étudiants (en école d’éducateur de jeunes enfants) mais aussi tous les professionnels qui ne jurent que par “La couleur des émotions” depuis plusieurs années, j’avoue, ça me lasse.
Le sujet est tellement souvent demandé que j’ai fini par me décider à en faire un mot clé sur ce blog, mais sans grand enthousiasme. Si l’idée c’est d’apprendre aux enfants à bien identifier, bien nommer et in fine surtout bien maîtriser leurs émotions, alors disons-le tout de suite, je ne suis pas pour. La littérature n’a pas vocation à prescrire un bon comportement ni à servir de manuel de développement personnel. Je vois d’ici les utilisations dites pédagogiques qui peuvent être faites de ces albums. Pages photocopiées, enfants sommés d’en choisir une le matin au regroupement, ateliers organisés et groupes de paroles pour les maternelles. Voir la littérature enfantine réduite à cette fonction me chagrine et je trouve que les enfants méritent mieux.
S’agissant de ce nouvel album, j’ai tout de même assez confiance dans l’auteur pour me dire qu’il mérite sans doute qu’on s’y attarde.
Parce que des émotions justement, Rascal arrive très bien à en transmettre dans la plupart de ses livres.
Je peux être profondément émue par une image de Au monde par exemple.
En adaptant sa technique d’illustration au fond ce son propos, il suscite chez moi tour à tour un frisson de plaisir, de peur ou d’impatience et il transmet toutes sortes d’émois.
Ici, c’est la sobriété qui prime. Un trait noir traverse la page (on pense bien sûr au dessin animé de notre enfance la linea) et se transforme pour représenter (ou faire ressentir?) les différentes sensations.
“Au fil des jours… je suis calme
Colérique
Effrayé
Surpris”
L’inventaire se poursuit, un mot par page, une image, assez symbolique, pour l’accompagner.
Quelques pages sont un peu compliquées pour les enfants qui n’ont pas toujours les codes iconographiques pour les comprendre. Mais la plupart fonctionnent très bien, et parfois la rencontre entre le texte et l’image sont vraiment saisissantes.
Preuve en est que ce qui fait la qualité d’un album ce n’est pas tant le sujet que le talent de l’auteur!
Alexander mène une vie qu’il faut bien qualifier d’étriquée.
Certes il a un “bon travail”, qui devrait lui conférer le statut d’homme important mais il s’y ennuie.
Son existence semble répétitive, sans fantaisie.
Quand un matin, sur son trajet habituel, un ours géant que lui seul peut voir lui barre le passage, il ne reconnaît pas tout de suite celui qu’il a tant dessiné étant enfant.
Mais l’ours revient, il s’est donné pour mission d’ouvrir les yeux d’Alexander sur la platitude de sa vie. Il doit bien rester quelque chose de ses rêves d’enfant, il n’était pas fait pour se contenter d’une vie de bureau, il devait devenir dessinateur. Que s’est-il passé?
“-Rien, il ne s’est rien passé. Il ne se passe rien.” Répond l’homme en costume.
Ours appelle Foxi, le doudou d’Alexander, à son secours. Ensemble, ils vont réussir à allumer une étincelle, à donner des envies de réalisations à Alexander. Ils lui montrent qu’un autre chemin est possible.
Les images, qui se déploient sur un grand format, réalisées au feutre noir sont à la fois réalistes et étranges, elles incitent à porter un regard critique sur la vie quotidienne citadine et monotone du protagoniste.
On peut penser que cet album s’adresse d’abord aux adultes, puisqu’il joue sur leur nostalgie du temps de l’enfance.
Mais les enfants y trouvent un réel intérêt.
Il est peu habituel qu’on leur propose des héros adultes. Je ne pense pas qu’ils s’identifient au protagoniste, mais ils peuvent avec cet album comprendre ses sentiments et ses émotions.
Je ne crois pas que le but de la lecture soit nécessairement l’identification. Au contraire, se projeter dans les pensées d’une personne qui ne nous ressemble pas, c’est faire l’expérience de l’altérité, c’est la possibilité de mieux comprendre l’autre et le monde.
Et puis Ours à New-York est un hymne à l’enfance et à ses potentialités. Le jeune lecteur peut être pleinement satisfait de cette histoire qui qu’il est encore à l’âge où tout est possible, où tous les chemins s’ouvrent à lui.
Parfois, c’est sur le long terme qu’on peut vraiment évaluer l’intérêt d’un album. Particulièrement avec ces livres un peu ovnis, ces atypiques qui peuvent à la fois susciter notre emballement ou nous laisser perplexe. C’est à l’usage et surtout en observant ce que les enfants en font qu’on saura s’ils sont destinés à devenir des “classiques” ou à être oublié en quelques mois.
C’est la raison pour laquelle je présente aujourd’hui le livre “Caché” avec quelques années de recul sur son usage.
Présenté comme “le premier roman pour bébé”, il se compose de chapitres, est accompagné d’une préface et il est paginé. Il ne contient pas d’image, uniquement des mots, imprimés en noir sur fond blanc, et il a un format rectangle à la française. Pour toutes ces raisons, il s’apparente donc bien à un roman plus qu’à un album, genre dans lequel l’image est supposée être prépondérante. On peut le rapprocher de deux autres ovnis, “Le livre sans image” et le magnifique “On dirait qu’il neige”, mais ces trois ouvrages ne se ressemblent en rien, ils ont chacun leur singularité.
Et l’histoire ?
Un jeu de cache-cache entre un narrateur et son complice très bien dissimulé.
L’invention de cet album c’est d’utiliser les mots comme image. Ils structurent l’espace de la double page, l’aménagent, la subliment.
La mise en page est aussi un accompagnement à la lecture à voix haute. Spontanément, on ne lit pas de la même façon un mot écrit en gros ou en petit, des lettres dont le contour s’estompe ou qui se détachent en noir profond sur la page blanche.
Des phrases qui zigzaguent, qui s’enroulent, qui tombent vont aussi induire un rythme ou un ton chez le lecteur.
Quand on lit ce livre à voix haute à un bébé, il va s’appuyer sur notre voix, nos mimiques et la mise en page autant que sur le texte lui-même pour comprendre le sens.
Le livre devient même un accessoire de l’histoire, que l’on va tourner à certaines pages. Le récit n’est plus seulement dans le livre, il est partout autour. C’est assez étonnant et il faut vraiment l’expérimenter pour en être convaincu.
La première fois que j’ai compris que “Caché” n’était pas un simple album gadget c’est quand je l’ai présenté au cours d’un relais d’assistantes maternelles (dans le cadre de mon travail pour l’association LIRE). J’ai dit aux assistantes maternelles présentes que j’allais leur lire un livre, profitant que les enfants étaient occupés avec l’éducatrice de jeunes enfants. Quand j’ai commencé à lire, j’ai eu tout de suite l’attention des adultes présentes. Mais très rapidement, celle des enfants a été sollicitée aussi, ils ont interrompu leurs jeux et se sont approchés, à quatre pattes pour certains, pour voir de quel étrange livre sortaient ces mots.
Depuis son succès ne s’est pas démenti et s’il créé souvent un certain trouble en formation avec les adultes, il emporte presque toujours l’adhésion des enfants sur le terrain.
Noir sur blanc, Blanc sur noir, Tana Hoban, Kaléidoscope, 1994, 6€10
Ces deux petits albums cartonnés se sont imposés au fil des années comme des incontournables dans les crèches.
Il est vrai qu’ils ont toutes les qualités requises pour cela.
Très faciles d’accès et d’utilisation, ils sont simples à manipuler et attirent le regard des petits.
La photographe Tana Hoban les a conçus à la façon de photogrammes, cette technique qui consiste à poser un objet directement sur le papier réactif et à l’exposer à la lumière. Mais ici ce sont des silhouettes aux formes franches, aux bords nets.
Les objets se détachent sur la page, la partie noire est recouverte d’un vernis sélectif, ce qui ajoute un jeu de texture et de reflets.
L’artiste a vraiment pensé ces ouvrages pour les mains et les yeux des bébés. A l’époque, on pensait encore qu’ils ne percevaient pas les couleurs, d’où son choix du noir et blanc. On sait aujourd’hui que c’est faux (même si cette idée reçue circule encore énormément) mais qu’ils sont tout de même sensibles aux contrastes. Beaucoup de livres (et de jouets premier âge) utilisent le noir et blanc pour cette raison.
Les silhouettes qui se succèdent sont facilement identifiables, mais certaines laissent tout de même une petite place à l’interprétation: est-ce un bébé? Une poupée? Un pantin? Toutes les réponses sont valables et avec des enfants qui parlent déjà no peut les laisser faire leurs propres suppositions.
Je montre souvent ces deux albums à des bébés très jeunes, quelques mois à peine. Ils écarquillent les yeux avec gourmandise et dès que leur motricité le permet, tendent les bras vers le livre pour l’attraper et enfin le suçoter.
Je les laisse expérimenter un peu mais rapidement je retire délicatement l’album de leur bouche pour revenir aux images.
Puisqu’il n’y a pas de texte, on peut bien sûr montrer ces livres en silence. Cependant, j’ai remarqué que les bébés ont souvent besoin de notre voix pour y poser leur attention.
Je nomme alors les objets et je m’autorise quelques digressions, en faisant le lien avec l’enfant (des phrases qui s’adressent directement à lui, comme par exemple “ah tiens, un biberon, tu connais ça? Et la tétine, tu en as une aussi?) par exemple, ou en chantonnant une petite comptine en rapport avec l’image (un petit canard au bord de l’eau ou bateau sur l’eau).
Avec les bébés, j’aime bien lire des récits, parce qu’ils sont attentifs et se laissent porter par le texte.
Mais Noir sur blanc et Blanc sur noir sont deux incontournables parce qu’ils ont toujours du succès et qu’ils sont rassurants pour les adultes qui les trouvent faciles à utiliser.
Paradoxalement ceux qui sont souvent déstabilisés par les albums sans textes pour les plus grands (j’ai d’ailleurs donné quelques pistes d’utilisation pour ce type d’ouvrages ici) savent spontanément utiliser ces albums avec les bébés.
La maison dans la nuit, Susan Marie Swanson, Beth Krommes, éditions le genévrier, collection Caldecott.
“Voici la clé de la maison. Dans cette maison brille une lumière”. Une structure en randonnée qu’on retrouve dans beaucoup d’albums, comme Dans la petite maison verte ou encore Un cœur qui bat. Une structure classique qui laisse toute la place à l’illustrateur pour raconter l’histoire en image.
Ici, Beth Krommes a choisi le noir et blanc rehaussé seulement de jaune d’or. Jaune, comme la clé, le soleil, la lumière dans la maison. Dans la maison vit la famille d’un petit garçon, mais aussi trois chats et un chien. On peut les retrouver de pages en pages quand l’histoire se situe dans le foyer. Aucun n’est pourtant jamais mentionné par le texte.
Dans cette maison, il y a aussi un livre. C’est par les pages de ce livre, plutôt que par la fenêtre qu’on s’échappe vers l’extérieur, dans les cieux, jusqu’aux étoiles.
Mais, bien sûr, l’histoire est symbolique. L’enfant, livre à la main, est resté dans la sécurité du foyer, entouré des animaux.
L’histoire terminée, il est temps de se coucher.
Le graphisme singulier et la forme poétique du texte font de La maison dans la nuit un livre d’art.
Un imagier pour jouer, Pascale Estellon, les grandes personnes. 12€50
isbn: 978-2-36193-224-4
Le titre annonce la couleur, cet album qui se déplie comme un paravent est un intermédiaire entre le jeu et le livre. On peut le poser sur un tapis, près d’un bébé. On pourra alors voir le bébé ramper vers le livre, essayer de l’attraper, le toucher, le gratter, le mettre à la bouche aussi sans doute. Le regarder dans un sens puis dans l’autre, à l’envers même. Le bébé découvre l’objet avec tous ses sens, avant de rentrer dans le contenu.
Pascale Estellon a pris la peine de paginer son album, indiquant ainsi aux parents un sens de lecteur. On commence donc avec la page du miroir. Permettre aux bébés de partir d’eux même pour s’aventurer ensuite vers l’inconnu est une très belle idée.
Après avoir observé son propre visage, le bébé découvre sur les deux pages suivantes deux visages stylisés, l’un qui sourit, l’autre qui fait la tête. Cette version très graphique de Jean qui rit/Jean qui pleure est facilement identifiable pour un tout petit, on sait que dès la naissance un bébé est capable de reconnaître une représentation de visage.
On note au passage que, pour une fois, ce n’est pas le visage blanc qui sourit mais le noir, je suis contente que la couleur noire ne soit pas (plus?) systématiquement associée à un aspect négatif.
Viennent ensuite les mains, sur lesquelles les enfants peuvent spontanément poser les leurs.Ils se mesurent, ils comparent: cette main est plus grande que la mienne mais plus petite que la tienne. Les plus jeunes grattent l’image qui est en relief.
Plus tard dans l’album, c’est un cheminement qui est proposé au bambin. On suit la route (un ruban de carton collé sur la page donc une fois encore en relief) et ses boucles, dans un geste qui préfigure déjà celui du tracé de l’écriture.
Succède un jeu de coucou et l’exploration des premières peurs puisque quand le mouton se cache, le loup apparaît et vice versa. Les bambins peuvent passer un temps infini à tourner la page dans un sens puis dans l’autre, à mettre le doigt ou à glisser un coup d’œil dans le trou pour voir sans se faire voir ce qu’il se passe de l’autre côté.
Enfin, l’album se termine sur une image plus complexe, celle d’un petit bateau qui tangue sur les vagues. Plaisir suprême on peut le faire bouger. Alors, entraîné par le rythme du balancement, on se surprend à chanter “bateau, sur l’eau, la rivière la rivière…” et l’enfant, joyeux, accompagne notre chant d’un bercement.
La fin de la chanson, quand le bateau chavire et que les enfants tombent dans l’eau clôt en beauté l’album. Mais on peut aussi le continuer puisque sa forme invite à revenir à la première page pour recommencer le cheminement du début.
Un joli travail d’artiste et un ouvrage très adapté aux plus jeunes des enfants, solide en plus (pour une fois la charnière est en tissus, on peut le plier dans tout les sens sans l’abîmer) en font un album qui devrait trouver sa place dans toute les sections de bébés de crèches.