Un imagier pour jouer, Pascale Estellon, les grandes personnes. 12€50

isbn: 978-2-36193-224-4

Le titre annonce la couleur, cet album qui se déplie comme un paravent est un intermédiaire entre le jeu et le livre. On peut le poser sur un tapis, près d’un bébé. On pourra alors voir le bébé ramper vers le livre, essayer de l’attraper, le toucher, le gratter, le mettre à la bouche aussi sans doute. Le regarder dans un sens puis dans l’autre, à l’envers même. Le bébé découvre l’objet avec tous ses sens, avant de rentrer dans le contenu.

Pascale Estellon a pris la peine de paginer son album, indiquant ainsi aux parents un sens de lecteur. On commence donc avec la page du miroir. Permettre aux bébés de partir d’eux même pour s’aventurer ensuite vers l’inconnu est une très belle idée.

Après avoir observé son propre visage, le bébé découvre sur les deux pages suivantes deux visages stylisés, l’un qui sourit, l’autre qui fait la tête. Cette version très graphique de Jean qui rit/Jean qui pleure est facilement identifiable pour un tout petit, on sait que dès la naissance un bébé est capable de reconnaître une représentation de visage.

Un imagier pour jouer, Pascale Estellon, les grandes personnes

On note au passage que, pour une fois, ce n’est pas le visage blanc qui sourit mais le noir, je suis contente que la couleur noire ne soit pas (plus?) systématiquement associée à un aspect négatif.

Viennent ensuite les mains, sur lesquelles les enfants peuvent spontanément poser les leurs.Ils se mesurent, ils comparent: cette main est plus grande que la mienne mais plus petite que la tienne. Les plus jeunes grattent l’image qui est en relief.

Plus tard dans l’album, c’est un cheminement qui est proposé au bambin. On suit la route (un ruban de carton collé sur la page donc une fois encore en relief) et ses boucles, dans un geste qui préfigure déjà celui du tracé de l’écriture.

Succède un jeu de coucou et l’exploration des premières peurs puisque quand le mouton se cache, le loup apparaît et vice versa. Les bambins peuvent passer un temps infini à tourner la page dans un sens puis dans l’autre, à mettre le doigt ou à glisser un coup d’œil dans le trou pour voir sans se faire voir ce qu’il se passe de l’autre côté.

Enfin, l’album se termine sur une image plus complexe, celle d’un petit bateau qui tangue sur les vagues. Plaisir suprême on peut le faire bouger. Alors, entraîné par le rythme du balancement, on se surprend à chanter « bateau, sur l’eau, la rivière la rivière… » et l’enfant, joyeux, accompagne notre chant d’un bercement.

La fin de la chanson, quand le bateau chavire et que les enfants tombent dans l’eau clôt en beauté l’album.
Mais on peut aussi le continuer  puisque sa forme invite à revenir à la première page pour recommencer le cheminement du début.

Un joli travail d’artiste et un ouvrage très adapté aux plus jeunes des enfants, solide en plus (pour une fois la charnière est en tissus, on peut le plier dans tout les sens sans l’abîmer) en font un album qui devrait trouver sa place dans toute les sections de bébés de crèches.