Le loir à la théière, Anahita Ettehadi, Juliette Lagrange, Sarbacane, 2022, 15€50 Lewis, le petit loir, est passionné par les marrons, il aimerait bien savoir fabriquer des objets avec comme son père.
Un jour, alors que toute la famille fuit un incendie qui ravage leur arbre, Lewis tombe et se retrouver séparé de sa famille. Avec ses marrons pour seuls compagnons, il se met à la recherche d’un abri. C’est une vieille théière abandonnée là qui va lui servir de refuge. De là, Lewis va apprendre à se débrouiller seul, mais sa quête principale sera de trouver un moyen de rejoindre sa famille.
À force de persévérance et d’ingéniosité, il trouve le moyen de retrouver les siens, à bord d’un étrange engin volant composé d’une théière, surmontée d’un ballon, s’élevant grâce à l’aide des lucioles.
C’est joli et poétique comme une envolée de lanternes en papier.
Au fond il s’agit d’un voyage initiatique, dont Lewis va sortir sauver lui même est inspirante.
Les très jolies aquarelles de Juliette Lagrange montrent une nature foisonnante et sont très agréables. J’ai un faible particulier pour la page représentant la collection de marrons du petit loir en début d’album, elle merappelle mes jeux d’enfant.
Mon petit imagier froid, mon petit imagier chaud, deux albums d’Élo, Sarbacane, 2022, 10€90
Alors que la question des températures nous a occupés tout l’été, c’est le moment idéal pour présenter ces deux petits imagiers. La graphiste Élo a déjà fait plusieurs imagiers pour l’éditeur sarbacane, souvent avec une visée éducative évidente (son album Les chats par exemple est consacré aux formes, Les oiseaux aux couleurs) tout en gardant une forme ludique (ce sont des livres à flaps)
Ici la forme est plus classique, mais la chose représentée (le chaud ou le froid, donc) plus conceptuelle. Un objet est montré sur chaque page, accompagné de son nom pour tout texte. L’autrice a choisi de s’attacher aux sensations de chaleur ou de froid plutôt qu’à la température réelle des choses.
Certes, les toilettes ou le stéthoscope ne sont pas froids, pas plus que les chaussons ne sont chauds d’ailleurs. Mais l’enfant qui s’assoit sur les toilettes ou celui sur le torse duquel on pose un stéthoscope sans précaution ressentent la fraîcheur relative de l’objet, tout comme porter des chaussons réchauffe les pieds. Le radiateur, le feu, le bonhomme de neige ou la glace, eux, émettent vraiment de la chaleur ou du froid. Ainsi c’est un petit monde de nuances et de sensations qui est offert à l’enfant. Et pour accompagner ces sensations un soin particulier a été apporté à l’objet livre, avec des pages cartonnées particulièrement épaisses et un toucher velouté qui est agréable sous les doigts.
Les couleurs très vives voire fluo (leur reproduction à l’écran ne leur rend pas hommage) sont attractives pour les tout petits qui auront sans le moindre doute le regard attiré.
“Allô maman”, c’est le nom du taxiphone de la rue de Belleville, à Paris.
Il est tenu par un couple et c’est leur enfant qui est le narrateur de l’album.
Il nous raconte, avec toute la candeur de son jeune âge, la petite communauté hétéroclite qui vient régulièrement.
Ici se croisent des enfants et des plus tout jeunes, des gens très censés et des un peu fous, des hommes, des femmes, des très pauvres et des pas bien riches.
Les cultures, les langues, les habitudes de chacun se rencontrent et parfois se télescopent.
En faisant le portrait des clients habituels, le garçon nous donne aussi à voir une vie de quartier, sans caricature.
C’est ainsi que nous faisons la connaissance de monsieur Wang, qui vient régulièrement pour chanter une berceuse au téléphone à sa fille restée au pays. Sa fille a 37 ans, mais il n’y a pas d’âge pour écouter les chansons de son père.
Il y a aussi la petite Simona, qui dépense tous ses centimes pour appeler la Géorgie (celle qui est au bord de la mer noire précise-t-elle, pas celle qui est en Amérique). Quand elle vient, le petit narrateur rougis facilement en la regardant.
Ou encore Frangio et ses gâteaux, Assante qui a besoin d’aide pour remplir ses papiers.
Ici on peut aussi acheter des bonbons, envoyer de l’argent à l’étranger ou faire des photocopies. Et même parfois venir juste pour se reposer, quand dehors il fait trop froid pour y dormir.
Mais l’essence de la boutique, c’est avant tout d’être un lieu d’échange de mots, et c’est cet aspect qui tient à cœur au petit garçon.
C’est aussi ce que j’ai apprécié dans Allô maman taxiphone, ces personnages réunis par les mots au delà de leurs différences de langues. Il est bon de savoir qu’on peut toujours se parler, se rencontrer, s’apprécier, grâce à nos différences plutôt que malgré elles.
Super bande de potes, Smirti Halls, Steve Small, sarbacane, 2022, 14€90
Ours et Écureuil sont amis pour la vie, cela nous le savons depuis leur première aventure, Super potes.
Bon, certes, Écureuil a montré dans l’opus précédent qu’il avait parfois besoin d’un peu d’air mais au fond il ne peut pas se passer très longtemps de son ami de toujours. Au point qu’ils se suffisent, leur camaraderie ne laisse pas de place à un tiers. Dommage pour Poule.
Elle aimerait pourtant tellement faire partie de la bande, jouer à l’unisson avec les deux autres, entonner la même chansonnette!
Elle se fait insistante, c’est un peu le genre à revenir par la fenêtre quand on l’a virée par la porte.
Mais rien à faire, les deux comparses refusent fermement de l’intégrer dans leur groupe, ce n’est qu’en duo qu’ils se produisent.
Poule, forcément, cherche alors compagnie ailleurs, et c’est sans méfiance qu’elle se rend au cœur de la forêt… L’image, devenue brutalement sombre, avertit pourtant le jeune lecteur du danger, mais la protagoniste, trop solitaire sans doute, ne s’aperçoit de rien. Heureusement, Ours et Écureuil ne sont pas aussi égoïstes qu’on aurait pu le croire jusqu’ici, ils ne vont tout de même pas laisser poulette en danger.
Le texte, entièrement dialogué, se lit sur un rythme vif, les illustrations sont expressives et drôles, et l’histoire est des plus sympathiques. Peut-être retrouvera-t-on la super bande de potes dans d’autres aventures, les personnages s’y prêtent tout à fait.
Bol d’eau, Stéphanie Richard, Julie Guillem, Sarbacane, 2022, 14€50
Il est joli et fleurit, avec le rayon de soleil qui se reflète à sa surface, ce bol d’eau qui est posé là. Au centre du monde nous dit le texte. Dans un jardin en bord de mer nous informe l’image.
Telle une marre au milieu du désert, il va accueillir les animaux des environs qui ont besoin de se désaltérer. C’est un petit point de rassemblement autour duquel il n’y a pas de conflit.
Dans un rapport d’augmentation (ça, c’est pour mes étudiants qui ont parfois du mal à mémoriser les différents rapports texte/image), dans un rapport d’augmentation, donc, l’image raconte plein de choses qui ne sont pas mentionnées dans le texte (c’est même la définition, de la chose, pour ceux qui n’ont pas suivi en cours)
Nous voyons donc une fillette qui, chaussée de ses bottes de pluie, vaque à ses occupations. Elle arrose les plantes, cueille les cerises, dessine. Il n’est pas nécessaire qu’elle soit mentionnée pour que les enfants comprennent qu’elle est un personnage central de l’histoire.
On devine même que c’est probablement elle qui a rempli le bol d’eau et l’a posé là.
Sur la première page, qui montre un plan d’ensemble, on peut voir de nombreux animaux et insectes. Ce sont eux qui viendront boire dans les pages suivante. Cela permet aux enfants d’anticiper sur la suite du récit, mais deux manquent à l’appel (je vous laisse le soin de chercher vous même de qui il s’agit).
Certains ne prélèvent qu’une goutte mais quand c’est au tour du chien, il ne reste plus rien.
Pas de panique, bientôt la pluie arrivera et le bol sera de nouveau plein.
L’image est épurée et très lisible, le texte minimaliste et à la première lecture on peut avoir l’impression qu’il ne se passe pas grand chose.
Mais au fil des lecture, les enfants repèrent la richesse de cet album où l’on peut s’amuser par exemple à retrouver tous les animaux à la dernière page (alors que l’escargot était encore introuvable à la précédente) ou le petit insecte supplémentaire qui va probablement prolonger l’histoire.
Et j’apprécie aussi l’ambiance calme et douce de cette journée en bord de mer.
Moi j’attends, Davide Cali, Serge Bloch, sarbacane, 2005, 15€
Est-ce que la vie est faite d’attente? De promesses que l’on espère, de moments plus douloureux que l’on redoute?
Cette impatience qui nous donne envie de tourner la page, pour savoir de quoi demain sera fait est le prisme choisi par les auteurs pour nous offrir un récit de vie.
Il y a d’abord l’attente joyeuse de l’enfant, cette pulsion vitale qui le pousse vers l’avenir: Il attend de grandir. Puis le bisou du soir, puis que Noël arrive, puis une rencontre…
Avec un long format à l’italienne, l’album évoque un traveling cinématographique, dans lequel le personnage grandit au fil des pages.
Il est esquissé d’un trait de plume noir, dans un décor minimaliste mais fortement évocateur.
Un fil de laine rouge offre une continuité à l’ensemble. Il est doudou, gilet, écharpe. Il créé du lien quand il est cordon ombilical ou qu’il relie le protagoniste à sa bien aimée. Il s’effiloche parfois, mettant la fragilité du personnage en avant mais devient au contraire solide et épais quand il le rattache fermement à la vie, par exemple quand l’image s’accompagne du texte J’attends… Un bébé.
L’histoire ne nous épargne pas les moments sombres, les disputes, le deuil, la solitude. Car ainsi va la vie. Et quand soudain les mots manquent, l’image seule, porte l’histoire. Mais les mots reviennent, et le cycle de la vie continue.
Moi j’attends est un livre d’une grande justesse, très subtil et chargé en émotion. Comme pour compenser cette pesanteur, l’image et le texte se font tout légers, laissant une large place au blanc de la page. Dans cette légèreté se niche de la tendresse et de l’humour.
C’est ce que l’on appelle dans le jargon des libraires ou bibliothécaires un “livre de fonds”. C’est à dire un livre que l’on va garder en rayon au delà des modes et des périodes, que l’on ne va cesser de faire connaitre, qui correspondra très souvent aux demandes des lecteurs.
Pourquoi certains albums comme celui là vont ainsi résister au temps? Sans doute en partie en raison de l’universalité de l’histoire, et d’une illustration intemporelle. Depuis sa création, il a été réédité plusieurs fois (avec des modifications de couvertures) et il rencontre toujours son public.
Des enfants mais aussi beaucoup des adultes. C’est un album que l’on apprécie à tout âge.
Moi j’attends est est également une application et un film d’animation, réalisé par Claire Sichez, avec la voix d’André Dussolier.
Le visiteur, Didier Lévy, Lisa Zordan, sarbacane, 2021, 15€90
Le petit peuple de la jungle semble prompt à se moquer. Quand, dans le désert tout proche, ils voient arriver cet étrange pingouin, dont on se demande bien ce qu’il fait si loin de la banquise, les railleries vont bon train.
Il s’agite sous son ombrelle, il déplace des choses et des machins. Et ce n’est même pas pour se construire une maison. Complètement zinzin le pingouin, non seulement ce qu’il fabrique n’a aucun sens mais quand la chose est terminée, il a photographie et la détruit aussitôt. Chaque pierre, chaque branchage utilisé est remis soigneusement à sa place.
Quel sens peuvent bien avoir ces œuvres, inutiles et éphémères?
Pourtant, tranquillement, avec constance et humilité, le pingouin poursuit ses pingouineries.
Qui finissent par inspirer des pulsions créatrices chez d’autres. C’est ainsi que l’art fait son entrée dans la jungle.
L’art qui rassemble, qui permet de surmonter la peur de l’inconnu, qui est propice à la rencontre. Qui permet aussi de communiquer, par delà la barrière de la langue. Le visiteur finit par se lier d’amitié avec les singes, et fait désormais partie de la famille.
Le grand format met en valeur les réalisations du pingouin, la beauté de la nature mais aussi les expressions des protagonistes.
Le texte est raconté à la première personne, par un des singes qui, comme il l’avoue lui même, n’est pas le dernier à se moquer de l’étrange visiteur. Mais il est le premier à revenir sur son jugement, à se laisser tenter par l’envie de créer.
Ainsi l’album permet aux enfants de réfléchir à leur capacité à penser par eux-mêmes, à se désolidariser d’un groupe si nécessaire. L’importance de l’art, la rencontre de l’autre, la peur de l’inconnu ou encore le caractère délétère des moqueries, les sujets de réflexion sont nombreux dans cette histoire.
De papa à maman, Delphine Chedru, sarbacane, 2021, 13€90
C’est un album conçu à la façon de la chanson trois petits chats, chapeau de paille.
Un imagier dans lequel chaque mot commence par la syllabe qui terminait le mot précédent.
Le lien d’une page à l’autre est donc sonore et évident à repérer.
Il en existe un autre, visuel, moins évident, qui occupera les enfants qui apprécient les livres jeux.
Un élément de l’image, différent à chaque page, que l’on retrouve sur la page suivante.
Vous le voyez, sur la double page “papi/pipi”?
Oui, c’est bien le journal.
En tournant la page, on arrive sur Pita, et on retrouve le chien au pelage bicolore. Vient ensuite tata, avec une fillette sur l’image qui est présente sur une bonne partie du livre.
C’est d’ailleurs elle le personnage principal de cet album qui n’est pas une histoire. Les différentes pages montrent sa famille, son environnement, ses actions.
Car oui, certains mots présentés sont des verbes, et même des verbes conjugués, ce qui ajoute de la richesse et de la complexité.
Ainsi le mot “déroba” succède à “iodé” et précède “battu”. Des mots qui prennent sens grâce aux images qui les contextualisent.
C’est donc un livre qui offre plusieurs niveaux de lecture. On peut le parcourir comme un imagier, se laisse porter par les images épurées et très lisibles, ou comme un livre jeu et chercher ensemble le lien graphique d’une page à l’autre (parfois c’est très facile, d’autres fois il faut beaucoup d’attention), on peut aussi se raconter des histoires, faire des hypothèses sur cette petite fille au pull rayé que l’on retrouve à plusieurs reprises, ou sur les autres personnages.
Chaque lecture sera donc singulière (oui, je sais, avec les enfants c’est toujours le cas, mais certains livres offrent plus de variations possibles).
C’est assez amusant de voir ce que les enfants peuvent en faire et c’est très variable aussi selon l’âge. Un bambin qui est en plein apprentissage de la lecture y trouvera le plaisir de la maîtrise, dès qu’il comprend le principe il peut anticiper sur le mot suivant.
Un plus jeune pourra également être attiré par cette petite comptine qui lui permet de jouer avec les mots.
Et avec son grand format et ses couleurs vives, on peut aussi le montrer à des bébés.
(encore un livre sur lequel je suis incapable de mettre une notion d’âge précise, donc…)
Combinaison enfilée, casque, ok, camion, rutilant. Tout est prêt, voilà un pompier qui peut faire sa tournée.
D’abord, il rend visite aux personnes qu’il a déjà aidées, pour être sûr que tout va bien. Monsieur Éléphant n’a plus le trompe bouchée, Monsieur Serpent à la queue démêlée, c’est parfait.
Soudain, une urgence, ça brûle dans la boutique de bonbons de madame Girafe.
Capitaine bébé ne se laisse pas impressionner, il faut arroser copieusement l’incendie. Il est tout mouillé lui-même mais qu’importe.
Son travail accompli, et après avoir reçu maintes félicitations, notre petit pompier en combinaison rouge retourne à la base.
Mais quand il arrive au pied de son lit, traînant derrière lui son camion de bois, maman l’attend avec sa tête des mauvais jours. Les jours où il a mouillé son lit.
Ce n’est tout de même pas de sa faute, il fallait bien sauver madame Girafe…
Maman et papa n’en veulent pas à leur petit pompier, mais il faut bien trouver une solution.
Un nouveau pyjama, tout aussi rouge que la combinaison de pompier mais bien plus facile à retirer. Et un pot-pompier sera placé au pied du lit, pour mieux le trouver une petite lumière restera allumée.
Capitaine bébé s’endort, en serrant son camion contre lui. Cette nuit encore, il peut accomplir sa mission, et demain sûrement, son lit sera sec.
L’histoire s’arrête à et on ne sait pas si la stratégie parentale va fonctionner ou non. C’est d’ailleurs une bonne chose à mes yeux. Ainsi l’enfant qui écoute cette histoire n’est pas mis face à un “bon comportement” dont on entend qu’il s’inspire. Il ne s’agit pas d’appuyer sur la réussite du petit héros, qui a su, lui, aller sur le pot, vas-y mon grand, prends-en de la graine.
Non, il s’agit de raconter une histoire, qui montre que mouiller son lit la nuit est une chose qui arrive, gênante sans doute, mais pas dramatique.
Les enfants seront sans doute attirés par cet album pour la thématique du pompier bien plus que pour celle de la propreté. Il faut avouer que c’est un sujet bien plus intéressant pour les bambins.
Les illustrations font références à une iconographie des années 50. Elles sont très dynamiques et attractives, autant pour les enfants que pour leurs parents. Le texte est parfaitement mené, on passe sans transition du rêve (ou jeu?) de l’enfant à la réalité de façon étonnamment naturelle.
Il est rare que le thème de la propreté soit amenée avec autant d’humour. Cet album est un véritable petit bijou qui à mon avis mérite de devenir un classique en crèche.
Le doudou des bois, Angélique Villeneuve, Amélie Videlo, sarbacane, 15€50
Georgette est haute comme trois pommes. Mais, manifestement, elle n’a pas froid aux yeux. Elle se promène seule dans la forêt, avec son ciré jaune et son doudou à la main. Au milieu des arbres aux magnifiques couleurs automnales, elle respire l’air du temps. La forêt n’a rien d’hostile, on sent que c’est son terrain de jeu. Elle se régale à sentir les odeurs de la terre mouillée et admire les couleurs chatoyantes qui l’entourent. Et les images de l’album rendent magnifiquement bien cette ambiance colorée et sereine.
Mais de retour chez elle, au moment de s’endormir, elle se rend compte qu’elle à oublié son doudou dans le bois.
Dès le lendemain la voilà de retour sur les lieux de sa promenade, mais le doudou gris tant aimé reste introuvable.
Haute comme trois pommes vous disais-je, mais pas sans ressources la petite. Elle décide de trouver sur place un nouveau doudou. Et pour cela, elle fait appel à tous ses sens. Elle hume, elle caresse, elle scrute pour dénicher ce qui fera l’affaire. Il faut que ce soit doux, bien sûr, mais aussi que ça soit gris, que ça sente bon, que ça soit tout chaud. Un peu mystérieux aussi ça serait bien. Elle cherche, teste, mais rien ne fait l’affaire: la feuille n’est pas assez molle, la châtaigne pique et la flaque, bon, d’accord, elle est grise et de la bonne taille, mais elle file entre les doigts.
Georgette trouvera finalement son bonheur et ramènera à la maison le plus inétendu des doudous.
C’est un vrai bonheur de se promener avec Georgette dans les couleurs ocres, jaunes, rouges de la forêt, entre les plantes délicates et les troncs majestueux. Les cadrages alternent gros plans intimistes et plongées éloignées qui mettent le décor en valeur. On apprécie alors le grand format de l’album qui permet de savourer la beauté et la précision du trait.
Si le thème de la perte du doudou est souvent abordé en littérature enfantine, c’est la première fois que je lis un album dans lequel l’enfant trouve en lui-même les ressources suffisantes pour faire son deuil de l’objet aimé. D’ailleurs l’absence totale de parent dans le livre met en avant l’indépendance et l’autonomie de la fillette.