Train fantôme, Adrien Albert, école des loisirs
Je crois qu’Adrien Albert se joue de nous. Il nous emmène dans un univers très réaliste et d’un seul coup, paf, sans qu’on s’en soit rendu compte, on a basculé dans un autre monde. En tout cas, il se joue des codes. Il utilise ceux de la bandes dessinées dans un album, ça prouve.
Et puis, il se moque de nous, il fait dire à l’un de ses personnages “tout est pour de faux” il montre à ce moment là l’artifice, bien visible, du machiniste du train fantôme, et c’est juste à la page suivante qu’on perd de vue la réalité. Ce qui m’a conduit à ce dialogue improbable avec ma cadette:
“Non mais, c’est vrai ou c’est pas vrai?
-Heu, ben, c’est une histoire, c’est dans un livre (déjà, quand je commence une phrase par “heu… Ben, en général c’est que la naine m’a mise en difficulté)
-Oui mais dans le livre, c’est vrai ou c’est pas vrai?” Ma presque-cinq-ans me parle comme si j’étais légèrement débile.
Et nous voilà aux prises avec des problèmes d’histoires vraies et de vraies histoires, avec des questions sur ce qu’il faudrait croire et ce qu’on voudrait croire. C’est à ce moment là que, lâchement, je me suis dérobée “bon, on lit la suite ou bien?!”
On a donc lu la suite.
Avec Lulu, le narrateur de l’histoire, et sa grande sœur, on a visité une fois de plus la fête foraine. On a noté au passage que tel ou tel manège on le connaît, on l’a vu en vrai, le même exactement. On irait presque jusqu’à reconnaître un des gamins dessus. On est montés dans le train fantôme, manège choisit soigneusement par Lulu. On a regardé l’employé du train appuyer sur la pédale pour faire partir le wagon parce que, bien sûr, ça part pas tout seul, c’est pas magique non plus, forcément, il faut bien un bouton pour que ça marche, et de l’électricité et tout et tout. Et on est passé de l’autre côté du miroir. A pleine vitesse dans le train, là où l’imagination s’emballe et où le rail semble être le seul fil conducteur qui nous relie à la réalité. Perdu dans des images pleines pages, les personnages sont sans dessus dessous, entre peur et jubilation, on ne se pose plus la question c’est magique, d’ailleurs, ça fait peur mais on en redemande.
Parce qu’on est doublement en sécurité. Non seulement, le manège, c’est pour de faux mais en plus nous, on est bien tranquilles en train de lire un livre alors, on n’a même pas tremblé. Sauf ma cadette, qui tremblait de la tête aux pieds à la première lecture mais “c’est pour de faux maman, j’ai pas si peur”.
Alors, puisqu’on vous le dit.
Apprécié aussi dans le tiroir à histoires.