C’est ma journée! A. Sol éditions La Bagnole 8 euros.
isbn: 978-2-89714-008-3
Comme dans mon imagier, la photographe Anne Sol semble nous faire rentrer dans l’intimité d’une famille.
La page de gauche montre des moments de la vie quotidienne d’un enfant de deux/trois ans. Le texte, à la première personne, est descriptif: « je bois mon biberon. Je suis capable d’enfiler mon pantalon » etc. Sur la page de droite, un objet est mis en valeur, à la façon d’un imagier, photographié en gros plan, encadré d’une couleur vive. Le doudou, les
chaussures, la brosse à cheveux.
Si j’ai d’abord été un peu refroidie par l’aspect didactique de cet album, j’ai finalement été séduite par la chaleur qui s’en dégage, au delà d’un support d’apprentissage c’est surtout un livre miroir où les enfants se reconnaissent avec plaisir.
Dans la même collection, l’album « c’est les vacances! » est tout aussi réussit, il nous invite à passer des vacances en famille en Bretagne, dans une ambiance simple et joyeuse.
A quoi tu joues? M-S. Roger A. Sol sarbacane 15,50€
isbn: 978-2-84865-275-7
C’est bientôt Noël. Et on est tous plus ou moins préoccupé par la même question: qu’est ce que je vais lui/leur offrir? » Et beaucoup de gens en ce moment me demandent conseil: « tu aurais un livre à me conseiller pour une fille de 5 ans? » « Pour un p’tit gars de 2 ans? » Toujours, on me précise le sexe de l’enfant. On ne me dit pas si sa couleur préférée est le vert, on ne me dit pas si il aime se laisser emporter par de longues histoires, ni si il est sensible à l’art, pas même si il préfère les chats ou les ours. Mais son sexe, on ne manque jamais de me le donner.
Et moi, à peine consciente de ce qu’induit ma réponse, je propose « pour ton fils? Pourquoi pas sur le chantier? Pour ta nièce? Tu as pensé à Guili lapin? »
C’est incroyable quand même, à quel point certains clichés ont la peau dure…
Mais au fait, en réalité, à quoi ça joue une fille? Et un garçon? La couverture de cet album nous donne déjà un élément de réponse. on y voit un garçon avec une poupée dans les bras, devant lui, une fillette joue avec un avion.
A l’intérieur, chaque page aborde un stéréotype sur les enfants: « les garçons, ça ne joue pas à la dinette », en effet, on voit une petite fille préparer consciencieusement son plat en plastique. Puis, on soulève le rabat et une autre photo dément le propos: Un cuisinier, un vrai, adulte, se concentre sur la préparation d’un plat. « les garçons, ça ne joue pas à la poupée »Mais les hommes, ça donne à manger à de vrais bébés. Ainsi de suite jusqu’à la page centrale: « et surtout, les garçons ne pleurent jamais », démentie par une photo de Y. Noah qui pleure de joie dans les bras de son père, après avoir gagné à Rolland Garros.
De la même façon la seconde partie explore les idées reçues concernant les filles, avec entre autre « les filles ça peut pas piloter des avions » puis une photo de Claudie Haigneré dans une fusée.
Pas besoin de grand discours, le message passe très bien: vouloir cantonner les enfants dans un rôle est finalement peut-être déjà dépassé, la réalité est totalement différente, d’ailleurs les adultes le savent bien… Dans les actes, si ce n’est dans les mots.
Des couleurs et des choses T. Hoban Kaléidoscope 10€50
isbn: 2877670201
C’est un imagier photo, maintenant il en existe plein mais quand la
photographe Tana Hoban l’a fait, en 90 c’était bien plus novateur. On y
reconnait le fil conducteur de tout ses albums: « ‘inciter les enfants à
ouvrir les yeux et à regarder autour d’eux, de ne rien laisser passer
sans y prêter attention. »
L’objectif est atteint, cet album constitue une véritable initiation au regard pour les enfants.
Sur chaque page, un cadre en couleur vive découpe l’espace en quatre. On retrouve sur les objets la couleur dominante (la photographe ne retravaille jamais la couleur après avoir pris les
photos mais il lui est arrivé de peindre des objets avant de les
prendre). Un « intrus » se glisse pourtant dans la page, il n’est pas dans la teinte des autres photos.
Les enfants s’approprient cet album de mile façon différentes. Ils désignent l’objet qui n’est pas à sa place, ou cherchent à retrouver dans les pages les éléments de la frise sur les pages de garde, font des liens d’une image à l’autre, miment la dégustation de ce qui se mange (la glace au chocolat en particulier à un grand succès). Un album qui aide à regarder et qui fait parler. Très réussit.
Chantiers en cours C. Achache édition Thierry Magnier 18€
isbn: 2844203167
Un jeu des sept erreurs tout en photo avec dedans des grues, des camions, des palissades.
Sur les pages de droite et de gauche, deux photos, presque identiques.
Le lecteur est invité à trouver les différences et les réponses dont données dans un petit texte, sur chaque double pagé, rédigé à la première personne ce qui donne une impression de dialogue avec la photographe que je trouve assez sympa.
Au-delà du jeu les photos nous plongent dans un décor très urbain que beaucoup d’enfants affectionnent.
Et puis moi j’aime bien les livres qui démontrent que une photo ne dit pas toujours la vérité et qui « éduque » l’œil du jeune lecteur.
Un bébé, un livre, une voix. I. Chavepeyer, I. Gillieau, P. Papadimitriou Editions grandir F.R.A.J.E.
« Lire… Entourer, porter, se rencontrer. S’imprégner. Savourer. Se laisser bercer par la voix, porter par les sonorités. »
Le centre de Formation permanente et de Recherche dans les milieux d’Accueil du Jeune Enfant à élaboré cet album pour montrer à tous ce qu’est la lecture aux jeunes enfants. Des photos très parlantes d’enfants captivées l-par les livres et des mots très simples, très justes disent bien mieux que bien des discours ce qu’est mon travail, c’est sans doute pourquoi quand je l’ai ouvert j’ai eut l’impression de m’y reconnaître.
Les photos ont été prises dans des familles, des bibliothèques, des consultations O.N.E. (équivalent Belge de la PMI) et des crèches.
Les attitudes des enfants lecteurs ont été captées par l’appareil et sont mises en valeur par le texte, on retrouve toutes les situations classiques: l’enfant qui tripote, essaye de tourner les pages, met le livre à la bouche, regarde ailleurs puis se concentre sur une page, tiens le livre, s’assoit, se blottit contre son voisin ou part jouer un peu plus loin, pour mieux revenir, le moment venu.
J’y ai vraiment reconnu les attitudes de lecture que je peux rencontrer dans ma vie professionnelle, quand je lis pour l’association LIRE (le Livre pour l’Insertion et le Refus de l’Exclusion).
Un bébé, un livre, une voix est à proposer à tous ceux qui ne veulent pas croire qu’on peut lire à de bébés très jeunes. Un livre à montrer aux professionnels de la petite enfance, aux bibliothécaires, aux libraires, qui tous sauront le faire connaître ensuite aux parents. Un livre à feuilleter avec son enfant aussi, pourquoi pas, les enfants apprécient de se retrouver dans les albums.
Circulo Cuadro, Colores sabores, rojo verde et Rayas flechas Jill Hartley Petra Ediciones
ou encore des rayures, des flèches (isbn:9782278054787) et des ronds des carrés (isbn:9782278054794) Didier jeunesse
C’est une de mes collègues qui a déniché cette série de livre au salon de Montreuil. Dans l’équipe on est tous immédiatement tombés sous le charme.
La photographe Jill Hartley a fait ces 4 petits livres cartonnés en 2008, jusqu’ici ils n’étaient pas évidents à trouver en France, c’est d’ailleurs pour ça que je n’avais pas fait de billet dessus.
Mais je viens d’apprendre que Didier Jeunesse avait mis deux de ces titres à son catalogue qui seront disponibles en septembre 2009.
J’espère qu’ils vont très rapidement publier aussi les deux autres.
Dans ces livres destinés aux enfants la photographe mexicaine à axé son travail sur la couleur, ça saute aux yeux, on est attiré immédiatement par les jaunes vifs, les rouges flamboyants, les verts tendres.
J’ai un faible pour « colores sabores » (pas encore traduit en français donc, mais je ne désespère pas) qui montre des photos de fruits improbables, lisses ou veloutés, fruit du dragon crémeux ou figue de barbarie violacées, en le feuilletant on salive, on devine les goûts, les odeurs.
Et aussi pour la photo des bulles de savon dans « des ronds et des carrés« . Pour sa couverture aussi, qui donne immédiatement envie d’ouvrir le livre.
Quel chantier, François Delebecque, seuil jeunesse 10.50€
isbn: 2020530457
Les livres sur les chantiers, les camions, les grues, c’est incontournable. Si vous avez un petit garçon chez vous, vous le savez aussi bien que moi. Oui, surtout si vous avez un petit garçon, vous avez remarqué que les filles sont moins attirées par ces albums n’est-ce pas? Et vous vous êtes déjà demandé pourquoi? C’est tout simplement parce que, depuis leur naissance, « on » (les parents parfois, l’entourage souvent, la société dans son ensemble toujours) encourage les garçonets à s’intéresser aux engins et les filles aux poupées. On valorise la motricité et la force des petits gars et la gentillesse et la beauté des fillettes. On ne le fait pas exprés mais la production culturelle destinée aux enfants (livres, dessins animés, mais aussi jouets et surtout le publicité) les formate en ce sens. Bref, qu’on le veuille ou non, on transmet à tour de bras des stéréotypes de genre.
Du coup, comme je suis une fille et que j’ai été éduquée comme une fille, je n’étais pas, à priori, enclin à aimer les livres sur les camions.
Pourtant, il y a des perles, j’ai déjà parlé ici de plusieurs livres très bien dans ce genre mais pendant longtemps je n’en ai pas trouvé de livre de ce genre qui me plaisait pour sa beauté.
Il a fallu que le photographe François Delebecque sorte quel chantier pour que j’aime un livre pour ses images de tractopelle, de camion benne ou de chariot transpalette.
Quand on l’ouvre on voit une image en noir et blanc, la silhouette d’un engin, légendée par son nom. Puis on ouvre le cache et le même engin est photographié et une phrase explique rapidement ce à quoi il sert.
Un premier documentaire donc, qui fera la joie des enfants qui aiment maitriser le vocabulaire technique, ils sont d’ailleurs en général les premiers à retenir tous les noms, surtout les plus compliqués.
Et un livre d’artiste, qui ne se contente pas d’un thème vendeur, il fait aussi dans l’esthétique, pour notre plus grand plaisir.
Un album à lire aux garçons mais aussi bien entendu aux fillettes, pour essayer de compenser un peu le sexisme ambiant.
Et si vous souhaitez approfondir la question de la socialisation différenciée entre les filles et les garçons, je vous recommande cette excellente vidéo.
Quelle émotion?! Cécile Gabriel Mila édition 19,50 €
isbn:9782840065166
Dans cet album de photo les émotions sont remarquablement illustrées.
A la façon de Tana Hoban la photographe a mis en scène ses photos dans des pages découpées, qui laissent donc apparaître un détail de la page suivante.
Mais elle n’a pas utilisé pour cela un simple cache noir, la page découpée est une photo en couleur, qui donne déjà une idée de ce qu’on va découvrir ensuite.
Ainsi sur une page qui montre de l’eau trouble on peut lire « Quand je n’ose pas », la découpe nous montre des pieds d’enfant dans une position d’attente. On tourne la page et apparaît la photo entière, le petit garçon regarde de « grandes » filles jouer et le texte se poursuit « Je suis timide ».
L’utilisation de photos en noir et blanc, le choix de la photo en couleur pour la page de cache, l’emplacement de la découpe, tout est pensé et tout raconte. On reconnaît les émotions de nos enfants et les nôtres (celles de quand on était enfant et celles de maintenant aussi). Ma mouflette m’a demandé de lui relire tous les soirs depuis le jour où je suis rentrée du travail avec. Bon, à chaque page j’ai droit à une série de pourquoi, je suppose donc que 3 ans c’est un peu juste pour tout saisir.
Mais j’ai vu un petit d’un an se passionner pour ces photos, je vais le tester plus mais je ne serais pas surprise qu’il plaise beaucoup aux bébés. Cliquer pour voir l’intérieur
L’autre guili lapin Mo Willems, Kaléidoscope 12,50 €
ISBN, 2877675238
La voilà de retour, notre Trixie déjà rencontré dans sa première aventure à la laverie avec son guili lapin, le doudou sans pareil.
Elle a bien grandit, maintenant elle porte les cheveux longs et se rend pour la première fois à l’école.
Les jeunes lecteurs sont ravis de retrouver le personnage et les adultes plus encore, tant ce livre leur est aussi destiné.
Elle à toujours un sacré caractère Trixie, elle traîne littéralement son père vers l’école, son doudou dans les bras, impatiente de rencontrer de nouveaux enfants mais aussi (et surtout) de leur présenter son guili lapin.
Mais très vite elle déchante, là, devant elle il y a… Sonia. Et dans ses bras, il y a l’autre guili lapin, tout pareil à celui de Trixie! La fillette semble le vivre comme un véritable affront.
Si vous aussi vous avez un enfant qui s’accroche à une vieille peluche toute pouilleuse (ça c’est pour ma mouflette, Guili lapin, lui, est propre sur lui ) vous savez à quel point le caractère unique de la chose à de l’importance pour le mouflet, n’est ce pas?
C’est donc tout naturellement que l’auteur a traité le thème avec une forte intensité dramatique.
L’histoire est servie par un super travail d’illustration, on retrouve les photos mais cette fois on n’est plus dans le sépia mais dans le noir et blanc, ce qui nous indique déjà qu’on est dans le registre du polar.
La mise en page évoque aussi clairement le montage de film, on a l’impression de voir les mouvements de caméra, les gros plans, les travellings.
Et on retrouve l’humour très visuel de Mo Willem, on se reconnaît dans la tête du père, on s’amuse de voir Trixie « chipoter son repas, dévorer son dessert », on s’inquiète presque avec eux de la perte du doudou.
Dans cet album, tout est réussit, sur la page de titre on se régale déjà avec les photos de familles, celles du premier épisode et la nouvelle, qui permet eu jeune lecteur d’anticiper sur l’histoire qu’il va lire.
Beaucoup de beaux bébés David Elwand, école des loisirs 10.50 €
isbn: 978-2211031219
Pour moi c’est le cadeau de naissance par excellence. Un album de photos de bébés, en noir en blanc, des visages en gros plan et un miroir à la fin. C’est presque toujours avec ce livre là que je vais vers un bébé de quelque mois. Et à tous les coups le bébé réagit avec tant d’émerveillement, il montre un tel plaisir que les adultes les plus septiques sont convaincus.
Ce livre prouve à chaque parent que son enfant est capable de reconnaître un visage en photo dès la naissance, c’est frappant, il ne regarde pas ces photos de la même façon qu’une autre image. A la fin du livre il y a un miroir avec cette légende: « de beaux bébés. Et toi »
A travers un jeu de contraires, les différentes expressions des bébés sont explorées, ce qui peut permettre de mettre des mots sur leurs émotions (on y trouve un bébé qui rit, un qui pleure, un fâché etc)
Pendant longtemps l’école des loisirs à édité le livre avec un miroir déformant, ce que je trouvais très problématique, au point que je boudais le livre (ben oui, montrer une image difforme en disant à l’enfant: « et toi », bof bof, quoi) Mais il vient de ressortir, les pages sont désormais toutes cartonnées et le miroir à la fin ne déforme plus.
Au passage il est devenu un peu moins cher. Un peu plus petit aussi, ce n’est plus le grand format de la première édition. Mais il ne perd pas en qualité, curieusement les photos se prêtent bien à cette nouvelle mise en page.
Pourtant je m’attendais au pire quand j’ai vu qu’il allait sortir en cartonné mais ils ont su garder la qualité de ce livre, que je ne saurais trop conseiller.