Des albums de littérature enfantine qu’on peut proposer aux bébés dès la naissance. Parce qu’il n’est jamais trop tôt pour aimer écouter des histoires et regarder des images. Les enfants apprécient beaucoup ces moments d’éveil au livre.
Les petits amis de la nuit, Ilya Green, Didier jeunesse, 11€90
Ilya Green excelle dans l’utilisation de la couleur, n’hésitant pas à remplir totalement la page de motifs fleuris comme dans son tout premier album, Bou et les 3 zours, elle a prouvé qu’elle pouvait aussi exploiter le blanc avec brio dans Mon arbre mais là où je la préfère, c’est quand elle ose le fond noir, surtout pour les tout petits.
Ici, c’est le noir de la nuit, qui n’a rien d’inquiétant, au contraire, il met en valeur et sublime les couleurs du petit héros et de ses amis.
Un bambin, garçon ou fille, on ne sait pas, joufflu à souhait comme le sont les bébés de cette illustratrice, est installé sur on oreiller moelleux. Petit à petit, les personnages doudous défilent. Des petites souris, un chat tout gris, canards et tortues traversent la page.
Outre leurs couleurs qui ressortent sur le fond noir, ils sont mis en valeur par le vernis qui les rend brillants, sur le papier mat. Des petites bulles rythment et dynamisent l’image. Le texte est court et poétique.
Les petits amis de la nuit est un album parfait pour des bébés, pour un cadeau de naissance et pour accompagner le sommeil des enfants.
Vite, à la maison! Yuichi Kasano, école des loisirs, 11€50
Au Japon, quand on arrive chez soi il est de coutume d’annoncer son retour au son de « Tadaima » et on reçoit en général « Okaeri » en réponse, ce qui pourrait être traduit par « coucou, je suis là » et « bienvenu »
C’est ce rituel qui est montré ici, avec le retour d’un garçonnet chez lui. Il va saluer, non les gens comme le veut la coutume mais les animaux de la famille et même le robot, avant d’aller rejoindre ses parents dans le salon de coiffure où ils travaillent, derrière la maison.
L’enfant est très joyeux de rentrer chez lui et il reçoit un accueil chaleureux: « Wouf! Wouf! », « bloub… bloub… » , jusqu’au Biip biip du robot, chacun lui répond à sa façon.
On le suit à travers les différentes pièces de la maison, typiquement japonaise, et on partage avec lui la bonne humeur paisible de ce retour au bercail.
C’est avec bonheur que l’on retrouve ici Yuichi Kasano s’adressant aux plus petits, avec toujours la même évidence qui fait la qualité de ses albums. Comme toujours, il va à l’essentiel et soigne particulièrement les cadrages, la place du texte dans l’image, les traits des personnages.
La forme très répétitive n’est pas sans rappeler le classiqueBonsoir Lune, mais ici il ne s’agit pas d’accompagner l’enfant vers le sommeil mais de l’émerveiller devant cette petite joie du quotidien: retrouver les siens.
Un chouette album qui se prête très bien à la lecture aux bébés et qui peut aussi émouvoir des bambins de maternelle.
Et c’est avec ce livre que je vous souhaite un bel été, le blog entrant en pause estivale.
Je continue, à distance, à alimenter la page facebook, où vous trouverez tout l’été des liens concernant la littérature enfantine ou la petite enfance. Et je suis aussi sur twitter.
Tout le monde t’attend! Jean-Marc Létang, Charlotte Mollet, Didier jeunesse 16€
C’est une famille bien impatiente: Tout le monde est dans l’attente. Une famille de drôles de petits bonshommes, avec des visages en empruntes digitales, comme pour dire à la fois sur ressemblance et leur singularité. Ils sont tonton, cousin, tata papi et tous s’adressent directement à celui qui est tant attendu.
Texte sur la page de gauche, portrait en action de chaque membre de la famille sur la page de droite, l’album nous invite à faire connaissance avec cette famille un peu loufoque.
Pour préparer la venue d’un nouveau membre, ils inventent des gâteaux, sèment des fleurs ou imaginent des histoires. Déjà, ils donnent au bébé à venir une vraie place, ils pensent à ses goûts, ses jeux.
Je suis toujours très sensible aux images en papier découpé de Charlotte Mollet, comme à ses choix de couleurs. Mention spéciale à la factrice qui se prépare à apporter la nouvelle à tout le monde, clin d’œil au tout premier album de la collection « Pirouette » initiée par Charlotte Mollet en 1999, « pirouette cacahouette »
Avec son grand format, ses phrases courtes et ses couleurs attractives, cet album peut être lu à des bébés. Quant aux enfants plus grands, ils saisissent mieux la richesse des images, comme ce petit garçon qui a relevé: « T’as vu, Nadia (la grande sœur), elle a qu’une chaussure! » Ou encore « La cousine Julie, elle n’a pas peur des loups! »
Voilà un album qui pétille, qui scintille, qui frétille joyeusement, qui aiguise notre curiosité et parle à tous nos sens.
Avec des découpes rondes sur des pages colorées, Emmanuelle Bastien nous donne à voir, plus qu’elle ne nous montre, tout ce qu’on peut aimer. Amours gourmands d’abord, avec les petits pois ou les cerises du clafoutis. Plus contemplatif ensuite, avec les étoiles, la neige ou l’été.
Le mot « J’aime » dans son rond blanc sur fond rouge que l’on voit sur la couverture raisonne déjà bien différemment quand on ouvre le livre et qu’on le voit alors sur un fond uni blanc. De la même façon à l’intérieur chaque trou percé dans le carton va changer totalement de sens quand on va tourner la page.
Ainsi des trous sur une page verte laissent apparaître des ronds jaunes. Contraste des couleurs pleines de pep’s, on pense d’abord à du gruyère mais il s’agit des croûtons de la soupe. Viennent ensuite les mêmes découpes mais cette fois sur une page bleue pâle qui laisse apparaître une nuance à peine plus foncée. L’image est alors moins saisissante, plus délicate, ce sont les bulles de savon.
On prend plaisir à se laisser surprendre, on touche bien sûr, avec les doigts pour certains, avec la bouche pour les plus jeunes, et on tourne les pages dans tous les sens pour vérifier que ce sont bien les mêmes ronds qui produisent des effets si différents. Ici le trou se superpose à un autre plus petit et voilà un bonbon réglisse. Là ils sont nombreux à consteller la page et ce sont des étoiles.
C’est une véritable éducation du regard que cet album, qui se termine par une ouverture sur le monde.
Emmanuelle Bastien est également l’autrice du magnifique Maman renard.
Fais dodo bébé souris, Jeongwan Park, Didier jeunesse, 13€10
Je ne sais pas vous, mais moi, j’aime dormir. Beaucoup.
Et ce que j’aime vraiment, c’est ce moment, entre veille et sommeil, où je ne sais plus si je suis déjà en train de rêver ou encore en train de penser.
C’est dans cet entre deux délicieux que se déroule cet album.
Trois fillettes en chemise de nuit, doudou à la main, s’installent dans un grand lit. Dehors, la nuit tombe. On devine les paupières lourdes et l’oreiller douillet. Alors que les enfants, comme leurs doudous se sont endormis, la fillette en jaune (qui, dans l’image, est séparée des deux autres par la charnière de la page et qui, justement serre dans ses bras bébé souris) ouvre un œil. Le miaulement d’un chat, une pelote de laine qui tombe, quelque chose l’a tirée de son sommeil, très provisoirement. Bien vite ses petits yeux se referment et elle se laisse emporter par ses rêves.
Le texte qui accompagne les très belles images de Jeongwan Park ne les raconte pas, il les complète.
Entre comptine et poème, il rythme la lecture, incitant à la lenteur.
Avec cet album, j’ai eu beaucoup de succès avec des tout petits bébés, ils regardent les yeux brillants, la tête dodelinant. C’est une lecture douce et apaisante.
Avec une casserole retournée et deux cuillères en bois, une petite chouette s’en donne à cœur joie. « BIM BAM BIM BAM », sa musique envahit l’espace.
Plaisir communicatif, bien vite voilà toute une bande d’oisillons qui tambourinent joyeusement sur leurs instruments de fortune. Au Bim bam de la casserole s’ajoute alors le Zim zim des couvercles, le Boum boum de la louche sur le bol.
Chaque animal produit un son qui est matérialisé sur la page par une couleur de police.
Ça à l’air très structuré dit comme ça mais en fait c’est un vrai tintamarre et bien vite un adulte doit intervenir.
Hop, embarqués tous les instruments. Mais les petits ne vont pas rester dépités bien longtemps, apparemment c’est l’heure du goûter. Mais manifestement une bande de mouflets tout contents qu’on leur propose un gros gâteau ça fait autant de bruit que leur orchestre improvisé.
Bon, rassurons nous, comme le montre la chute, les jeunes enfants peuvent aussi rester silencieux… Mais ce n’est pas forcément une bonne nouvelle.
J’apprécie toujours beaucoup la douceur du trait de Frédéric Stehr et ses petits animaux tellement expressifs.
Ici, avec un texte entièrement dialogué, ponctué par les onomatopées, un dessin très lisible sur fond blanc et un format tout carton aux bords arrondis il nous offre un album idéal pour une section de moyens en crèche, dès le début d’année: Les petits déménageurs de deux ans ne peuvent que s’y reconnaître.
Ce qui m’a pas empêché de passer un très bon moment à le lire à un nourrisson de six mois qui me gratifiait de grands sourires à chaque zim bam boum.
A noter: Il existe une suite avec les mêmes personnages, L’orage.
Dans mon boulot, je suis toujours à la recherche d’albums pour les enfants les plus jeunes (j’entends par là les sections de bébés de crèches, ceux qui ont entre quelque mois et un an et demi) que je puisse lire sans m’en lasser. Si en plus c’est un album qui peut plaire aussi aux enfants plus grands, c’est mieux. Et si, cerise sur le gâteau, quand je le lis les adultes présents font des « Ohh » émerveillés, alors là c’est le top.
Déjà est un livre qui produit tous ces effets là, je travaille avec depuis quelques semaines et il semble faire l’unanimité. La simplicité du texte en randonnée et la beauté des images font mouche à tous les coups.
L’histoire est toute simple, une petite souris va réveiller tour à tour un chat, un oiseau, une grenouille, une poule et un lapin pour une mystérieuse destination. Presque imperceptiblement, le bleu nuit de la page devient bleu ciel. Alors que tous les animaux s’exclament « Déjà? » à leur réveil, le lapin créé la surprise (« Enfin! » dit-il).
Et voilà nos six amis enfin arrivés à destination, et cette fois la surprise est bien plus importante, elle se raconte par l’image dans une double page qui se déplie pour montrer un paysage en format italien. Cette double page est d’ailleurs le seul petit reproche que je pourrais faire à cet album: elle rend la manipulation compliquée avec un bébé et n’est pas absolument nécessaire: l’album aurait été une grande réussite aussi sans.
Mais il est vrai qu’elle est très belle, avec une grande maîtrise des couleurs, et les enfants qui savent déjà bien tourner les pages se régalent à la déployer.
Un album apprécié par Pépita qui, comme moi, aime bien les livres destinés aux tout petits.
A priori, je ne suis pas fan des engins personnifiés. Ça doit trop me faire penser à cars, d’emblée, ça ne me donne pas spécialement envie d’ouvrir l’album. Mais il est avéré que les bambins, eux, adorent les histoires avec des camions et qu’ils adorent tout autant voir les objets prendre vie.
Et puis quand j’ai vu la couverture de cet album, j’ai surtout été attirée par le travail graphique et par le nom de l’auteur: de Stéphen Savage je connaissais déjà Morse, où est tu? que j’aime beaucoup.
Alors je me suis dit que ça valait le coup d’aller voir de plus près.
Et j’ai bien fait! (ne dis-je pas toujours qu’il faut rester ouverts aux albums qui ne nous séduisent pas au premier regard et s’autoriser à changer d’avis?)
L’album commence par la présentation des personnages: Les différents camions qui sillonnent une ville aux grattes ciels vertigineux. Chacun à son rôle à jouer et chacun jouit d’un certain prestige. Le camion de pompier en particulier, évidemment, est tout de suite repéré par les enfants.
Et puis, il y a le vilain petit canard des camions. Celui qui est chargé de vider les poubelles.
Bon, vous et moi nous le savons, en réalité le camion poubelle est un des préféré des enfants. Peut être parce qu’il passe à heures fixes, qu’il est impressionnant avec ses mâchoires d’acier qui broient les déchets, ou tout simplement en raison du vacarme qu’il produit. Quoi qu’il en soit, il est identifié et apprécié. Et c’est justement lui le héros de ce livre. Car, quand la neige envahit la ville, lui seul peut se convertir en SUPERCAMION, le camion qui déneige.
Nous avons donc là un anti-héros le jour qui devient un super-héros la nuit, des camions qui vivent et une histoire assez simple, tous les ingrédients sont là pour séduire les enfants.
Mais pour faire un bon livre, il fallait en plus le talent de l’auteur. On reconnaît dans cet album la pâte d’un affichiste, le graphisme à la fois soigné et épuré, qui donnent envie de s’y attarder aussi pour les adultes.
Une réussite qui fait mouche à chaque fois dans mes séances de lecture avec les moins de 3 ans.
Une histoire qui… Gilles Bachelet, seuil jeunesse, 13€90
Les albums de Gilles Bachelet, vous le savez, je les adore. Cet auteur à un sens du rapport entre le texte et l’image qui provoque à la fois rire et perplexité chez les enfants. Or oui, j’aime bien que les enfants soient perplexes, et eux aussi aiment ça: ça leur donne du grain à moudre, ils réfléchissent, font des hypothèses, argumentent, changent parfois d’avis, bref, ils sont actifs dans la lecture.
C’est aussi un régal de montrer ses albums à des adultes: d’abord parce qu’on s’amuse, ensuite parce que ça donne lieu à des discussions sur « Les enfants vont-ils comprendre? », qui me permet de basculer sur « Le doivent-il? Et vous, êtes vous certain d’avoir tout compris? Et si ce n’est pas le cas, est ce un problème? » et qu’on peut facilement faire une heure de formation à décortiquer ces problèmes.
Le seul bémol c’est que je travaille essentiellement avec des moins de 3 ans et mes formations s’adressent généralement à des professionnels de la petite enfance. Donc, je n’ai pas assez d’occasions à mon goût de lire par exemple les aventures de Mon chat (le sien, pas le mien, mais il s’appelle Mon chat, c’est comme ça).
Mais heureusement, Gilles Bachelet vient enfin de publier un album destiné aux tout petits.
Pour ce faire, il utilise les ressorts qui ont déjà fait leurs preuves avec les minus: Répétitions, musicalité du texte, indices qui permettent d’anticiper sur la suite du récit, quelques références à leur univers et une touche d’humour et de loufoquerie juste bien dosée.
Les ingrédients sont là, et comme Gilles Bachelet a aussi du talent, l’alchimie fonctionne à merveille.
La structure est la même sur chaque double page: Un adulte lit à un enfant et à son doudou. Pas n’importe quelle histoire, une histoire qui fait échos aux protagonistes (Uns histoire qui fait fondre pour les phoques, une histoire qui voyage pour les cigognes etc). Comme pour souligner que chaque parent sait exactement ce dont son petit à besoin.
Quand on tourne la page, nouveau tableau, le doudou de la page précédente est devenu l’enfant qui écoute l’histoire. Ainsi, à la façon d’un jeu de domino, chaque page annonce la suivante.
Sur l’image, on remarque aussi à chaque page un jouet, jamais mentionné par le texte. Bien sûr, chaque jouet à lui aussi des caractéristiques en lien avec les personnages.
La position des mots, la mise en scène du livre sur la page de gauche, les petits plus dans l’image principale, tout est pensé et tout fait sens pour l’enfant même très jeune. Ils trouvent très rapidement des repères dans cet album qui peut vite devenir un véritable doudou pour eux.
Les pages de garde permettent de récapituler tout l’album d’ailleurs j’ai vu un petit garçon le réciter par cœur en s’aidant uniquement des vignettes des pages de garde pour se remémorer l’ordre des tableaux.
Est ce vraiment pour retarder le moment du coucher ou est ce parce qu’il veut connaître la réponse à sa question? Toujours est il que c’est juste au moment e se mettre au lit pour la longue nuit, celle qui dure tout l’hiver, que le petit panda à une interrogation de la plus haute importance: « Comment on fait les bébéééééés? » C’est papa ours qui entreprend de répondre à son petit. Une réponse en apparence plus poétique que technique, mais une réponse vraie et sincère.
Avec des images en noir, blanc et rouges, rehaussées d’un peu de vernis sur certains éléments clefs, l’histoire de la naissance est abordée en douceur.
L’évidence d’abord: Un ours, une ourse, réunis dans leur différence. Tel le yin et le yang, ils s’enlacent tendrement. Puis un tout petit point rouge apparaît, il semble être le point de rencontre des corps.
L’image est toujours centrée sur le bébé et le texte met en valeur la présence constante des deux parents.
Chaque page de cet album permet une double lecture, l’aspect symbolique et poétique, souvent mis en évidence par le texte et l’aspect très réaliste: sur l’image on peut voir le baiser des parents, le fœtus qui grandit, le cordon ombilical.
Les enfants les plus jeunes seront captivés par le contraste des images, la musicalité des mots. Les plus grands y trouveront des pistes de réflexion et de discussion autour de la naissance.
C’est un album que je propose aussi volontiers à des nourrissons (il est très intéressant à toucher, avec les pages cartonnées mates et les points vernis qui brillent) qu’à des enfants qui aiment déjà les longues histoires.
Tout de même, j’ai été interpellée par ma cadette: « Mais maman, un papa ours noir et une maman ourse blanche, ça ne fait pas un panda, ça fait un ours (gris)! ». Certes. C’est ainsi dans la vie. Mais, dans les histoires, on fait comme on veut.
Un album coup de cœur chez Pépita.
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