Mon ballon, Mario Ramos, Pastel, l’école des loisirs, 2012

Pour une intervention que je prépare dans le cadre de la journée Mario Ramos (dont vous trouverez le programme ici), je me plonge ces derniers temps avec bonheur dans l’œuvre de cet auteur.

J’ai un grand plaisir à partager ses albums avec les enfants sur le terrain, ils sont souvent choisis et toujours appréciés.
Comme souvent dans mon ballon, il emprunte son personnage principal à un conte traditionnel, ici le petit chaperon rouge.

Elle n’est pas chargée d’apporter à sa grand-mère un petit pot de beurre et une galette, mais de lui montrer le joli ballon rouge que lui a offert sa mère.
Mère dont on ne voit que la silhouette quand elle lui fait signe avec insouciance en la laissant se diriger vers la forêt.

De la fillette on ne voit pas grand-chose non plus. Une petite bouille ronde en début d’album qui disparait rapidement hors-champ, pour ne plus laisser à l’image que le ballon qui se fraye un chemin entre les arbres.
Notre petit chaperon s’éloigne en chantant “promenons nous dans les bois” mais rapidement son regard (que nous ne voyons pas, donc) s’arrête sur un personnage, que nous ne voyons pas plus. “Qui se promène aussi par là? Un renard? Un autobus? une locomotive?”.

A ce stade il n’est pas rare que le bambin qui écoute l’histoire lève un sourcil interrogateur? Quel peut donc être ce personnage si difficile à identifier? Pour le savoir il tourne la page et découvre… Un lion pressé chaussé de baskets.

Ah?

Oui.

Inlassablement le petit chaperon va reprendre sa chanson et n’aura le temps d’y ajouter qu’un vers à chaque fois avant qu’un nouveau personnage n’apparaisse, toujours aussi improbable.

Les albums de Mario Ramos reposent sur la complicité qu’il établit avec le petit lecteur. Il lui donne des indices et le laisse tirer les conclusions. Ainsi quand la chanson touche à sa fin l’enfant se doute que la rencontre fatidique va avoir lieux. Mais il nous ménage encore quelques surprises pour donner plus de sel à son histoire, avant même d’en arriver à la chute (elle aussi très savoureuse et inattendue).

Les jeux de hors-champ, de non dit, d’allusions et de références sont toujours très habilement menées dans l’œuvre de cet auteur, parfaitement accessibles aux enfants mais juste assez résistants pour qu’ils aient le plaisir de s’exclamer “ah, j’ai compris!”

Car il est tout de même plus satisfaisant pour les enfants (pour nous aussi d’ailleurs) de comprendre un sens caché plutôt qu’une chose qui nous est donnée immédiatement. C’est là le signe d’une belle littérature enfantine.