Pon pan, Katsumi Komagata, les grandes personnes, 2024, 10€50
En vue d’une conférence sur les livres d’artistes que je prépare pour fin mars dont le programme est ici, je lis beaucoup de livres assez atypiques aux enfants en ce moment. Je vais donc faire plusieurs articles les concernant en axant mon propos sur la façon dont les enfants les reçoivent, puisque telle était la demande pour ma conférence. Pon Pan est de ceux-là.

Des points orange sur la page blanche, parfois des trous, une onomatopée qui se répète de pages en pages. Voilà les éléments qui composent cet album. On ne peut pas faire plus simple.

D’abord un point orange dans l’exact centre de la page. En lettres noires il y a juste écrit « pon ». Ok. Puis à la page suivante il y a deux points et le mot est répété deux fois. Logique. Quand ils sont trois deux d’entre eux sont en réalité des trous qui laissent apparaitre les ronds de la plage suivante. Tiens, ça surprend. Puis il y a des variations de taille des ronds qui correspondent à un changement de taille de police. Logiquement, quand c’est écrit plus gros, on lit plus fort.

L’auteur, Katsumi Komagata, adresse ses livres aux enfants très jeunes, il cherche à créer chez eux surprise et émerveillement.

Quand je montre Pon Pan à un bébé, je mesure que l’effet est réussi. Les yeux s’ouvrent en grand, la bouche aussi souvent, je vois l’amusement sur les petits visages.

Je ne sais pas ce qu’ils en comprennent. Je ne suis pas sûre que la question soit pertinente. C’est un livre qui s’éprouve, se ressent plus qu’il ne se comprend.

Sur le site de l’éditeur, on peut lire « Un petit rond, nommé PON, se transforme et se multiplie au gré des pages et des découpes, faisant naître un jeu malicieux sur les sonorités ! »

C’est marrant, ce n’est pas du tout comme ça que j’avais interprété ce livre.

Pour moi le rond n’est pas un personnage, il est l’incarnation d’un bruit qui se multiplie, se répercute, explose pour devenir pan.

Pour moi ce livre est la représentation d’un feu d’artifice à portée de bébé.

Et mon interprétation est tout à fait valable. Je ne prétends pas qu’elle est « juste » et encore moins qu’elle est préférable à celle de l’éditeur.

Mais en tant que lectrice de ce livre, j’ai le droit de l’interpréter comme je l’entends (c’est même la seule chose que je peux en faire).

Et les enfants ont ce droit aussi, comme toute personne qui ouvre cet album.

Au relais d’assistantes maternelles, je l’ai lu à un petit garçon de 2 ans et demis.
Je tournais les pages rapidement, ma lecture était très rythmée, presque chantante, avec des accélérations et des moments plus calmes, qui me semblent induits par l’image elle même.
Mais lors de la lecture suivante, il a prit le livre en main et a tourné les pages lui même. Le rythme était beaucoup plus lent, il prenait le temps de passer les doigts sur les ronds, dans les trous, faisait parfois des allers retours entre les pages. Parfois, pointant un des ronds il disait « il est là ». Puis, quand les points forment un cercle il m’a dit « c’est la ronde ». Visiblement il a lui aussi sa propre interprétation de cet album, et c’est très bien comme ça!

Et vous, vous le comprenez comment ce livre? N’hésitez pas à me raconter, ça m’intéresse beaucoup.