Les rides, Julie Pugeat, JR, Phaidon, 14€95, 2019
L’artiste JR a toujours eu à cœur de sortir les œuvres des musées et de les rendre le plus accessibles possibles. Ses collages gigantesques s’affichent sur les murs des immeubles et maisons à travers le monde, et avec cet album, il propose de les adresser directement aux enfants.
C’est une très belle idée et le livre qui en résulte est une belle réussite, sur tous les plans. Un seul regret, mais de taille: qu’il ne soit pas fait mention sur la couverture du nom de l’autrice des textes. Il faut même chercher dans les petits caractères en fin d’ouvrage pour trouver le nom de Julie Pugeat, dont le texte, simple et sobre, participe pleinement à la qualité de l’ensemble.
L’album se présente comme une galerie de portraits, en noir et blanc, sur fond orange vif.
L’éclairage n’écrase pas les reliefs, au contraire, ce sont les traces laissées par la vie sur les visages qui sont mises en valeur.
La vieillesse est valorisée, les rides mises en valeur, sublimées même. JR semble toujours porter un regard tendre sur ses modèles. On est très émus de voir ces visages marqués, les sillons laissés dans la peau et les regards, tellement expressifs.
Je me demande bien ce que le photographe raconte à ces personnes en les photographiant. Comment il obtient ici un sourire malicieux, là une joie presque enfantine, ailleurs une réflexion qui semble nostalgique sans être triste. On a l’impression de lire en eux les souvenirs qu’ils racontent, on devine bien des histoires, toute une richesse. Les personnes photographiées ici n’ont pas en commun que leurs rides. Ce qui les rassemble c’est qu’ils ont l’air extrêmement présents au monde. La première fois que j’ai lu cet album, je n’ai pas pensé “ils sont vieux” mais “ils sont vivants”, je trouve même qu’ils incarnent la vie.
J’ai beaucoup apprécié de travailler avec cet album, en particulier là où je travaille avec les enfants et leurs parents (les salles d’attentes de PMI ou le salon de visite d’un foyer de l’enfance où je travaille une fois par mois).
Il a la capacité de réunir les différentes générations, il émeut beaucoup les adultes mais ne laisse pas les plus jeunes indifférents, loin de là. Je me réjouissait de l’amener bientôt au Relais d’Assistantes Maternelles, où je suis certaine qu’il sera très apprécié.
Ah, petit détail supplémentaire, la couverture est très réussie (ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas chez cet éditeur, j’en parle ici) et les pages de garde sont à la fois d’une très grande simplicité et tout à fait sublimes (je vous laisse les découvrir)