
Jamais, plus jamais, Natacha Andriamirado, Chloé Malard, Hélium, 2025, 14€90
Il y a un truc qui m’a toujours émerveillée chez les enfants, c’est leur capacité à passer d’une émotion très forte à une autre, tout aussi forte mais parfaitement antinomique à la première.
C’est assez frappant quand on les regarde jouer et qu’ils se disputent soudainement.
En un instant, l’amitié la plus fusionnelle devient hostilité et parfois ils ne mâchent pas leurs mots pour l’exprimer.
C’est exactement ce que raconte cet album. Plus précisément l’après dispute et le règlement de compte qui en découle.
Deux enfants se font face, leur posture ne laisse aucune place au doute, ils sont tous les deux furax. Et ils mettent les choses au clair : jamais, plus jamais, ils ne joueront ensemble. Fini aussi les rigolades et l’amitié. Pour toujours de toute la vie et tout.

L’image, en contrepoint, les montre dans leurs jeux et complicité ancienne, mettant en avant tout le bonheur auquel ils décident de renoncer.
La surenchère se poursuit, chacun cherchant à s’affirmer face à l’autre, mais petit à petit, quelques grains de sable viennent s’immiscer dans le rouage de leur dispute. Un petit malentendu, une petite erreur de prononciation, quelques interrogations, et la discorde ressemble un peu à un jeu, ou à une négociation. On sent la colère qui s’estompe, et puis se mettre d’accord sur ce qu’on ne fera plus ensemble, c’est déjà se mettre d’accord. Alors on scelle le pacte, top là, et finalement on peut peut-être repartir sur de nouvelles bases ?
Il me semble que ces disputes, qui parfois inquiètent tant les adultes, font le sel de l’enfance, qu’elles sont nécessaires pour expérimenter les relations sociales et qu’en réalité entre le conflit et le jeu, il n’y a qu’un pas, que les petiots franchissent allégrement sans même y penser.
C’est simple et efficace, je ne garantis pas que les enfants à qui on lit cet album se disputent moins que les autres mais au moins ils peuvent prendre un peu de distance avec leurs propres conflits et les dédramatiser.
Le sujet est traité à hauteur d’enfant, sans dramatiser ni sous estimer l’importance qu’il peut avoir dans la vie des bambins.
