Le secret des sables, Levi Pinfold, Kléidoscope, 2023, 13€50

Est-ce que la littérature doit être confortable? Est-ce qu’on doit se sentir bien à la lecture d’un livre?

Je n’en suis pas convaincue et parmi les œuvres artistiques qui m’ont le plus marquée nombreuses sont celles qui créent pourtant le malaise.

Des films, des tableaux, des livres m’ont subjuguée et même attirée tout en me dérangeant. Ce sont souvent ceux-là qui restent en mémoire, ceux qui nourrissent le plus ma pensée et ma compréhension du mode. Même quand ils sont mystérieux. Surtout quand ils sont mystérieux.

Dès les premières pages on est happés par les incroyables dessins de cet album. Très vite il s’en dégage une étrangeté qui fascine. Malgré l’inquiétude qui s’installe rapidement on est avide d’en savoir plus.

La narratrice est une fillette. Avec ses frères elle traverse le désert en voiture en chantant une comptine de leur enfance, qui n’a rien d’enfantin ni de rassurant. Il y est question d’oracle, de mort, de prison.

Quand ils s’arrêtent pour cueillir des fleurs, elle sent le danger mais n’est pas écoutée. Manifestement, ils ne sont pas arrivés là par hasard. Quelle force les y a conduit?

La fillette sera alors actrice d’une aventure presque onirique, dont ses frères sont de simples figurants.

Les images aux couleurs de sable et de poussière figent des scènes extraordinaires peuplées de créatures étranges et inquiétantes. Pour compenser l’insouciance de ses frères, qui semblent hypnotisés par la magie du lieu, la jeune fille doit montrer sa persévérance et affronter un oracle inquiétant.

Des références bibliques côtoient des allusions aux contes (il y a une influence certaine de la belle et la bête), des renvois visuels vers des tableaux célèbres, liés dans un monde fantastique cohérent et très cinématographique. On sort de cette lecture émerveillés et décontenancés et on en redemande.