Madame hibou cherche appartement, Caroline Dorka-Fenech, Géraldine Alibeu, à pas de loups, 2021, 16€50
Dans son vieil arbre, madame hibou prend la pluie sur la tête, l’hiver, il a les branches complètement gelées et il est ouvert aux quatre vents.
C’en est assez, madame hibou l’affirme, elle aspire à mieux, elle voudrait un lit douillet, des murs (peints en jaune) et une douche. Voilà.
Mais la société des hiboux n’a rien à envier à l’absurdité de la nôtre, et madame hibou va se heurter à une absurdité administrative digne de Kafka.
C’est que pour être logé dignement, il faut faire une demande, avec plein de paperasse, en vue de prouver… Que l’on existe bien. Rien que cela. Madame hibou est tenace, elle traverse les étapes vaillamment. Elle surmonte les innombrables appels téléphoniques nécessaires pour comprendre la marche à suivre, réunit les nombreux papiers, se rend devant le grand bâtiment gris où sont traitées les demandes.
Et y découvre une queue de plusieurs milliers de hiboux, tous munis de leur dossiers.
C’est lors de cette attente de plusieurs jours qu’elle va se lier d’amitié avec ses semblables, qui eux aussi espèrent un jour être logés.
L’allégorie fonctionne très bien et le lecteur comprend qu’il n’est finalement pas beaucoup plus insensé de demander à quelqu’un de prouver sa propre existence que de lui demander par exemple d’être né au bon endroit ou encore de travailler quand il n’y a pas de travail.
S’il est bien sûr question ici de pauvreté et d’exclusion, c’est surtout l’amitié et le pouvoir d’agir des individus qui est mis en avant. Quand on annonce qu’il ‘y a plus un seul logement, madame hibou prend les choses en main, elle met en place un système basé sur l’entraide et la solidarité dans lequel tout le monde peut trouver sa place.
Il m’apparaît nécessaire de traiter ces sujets en littérature enfantine, et bien sûr, s’adressant aux enfants, il faut que l’histoire se termine bien.
Madame hibou cherche appartement est un album motivant, qui incite à interroger les règles les plus ineptes, à se rebeller contre elles si besoin et à s’appuyer sur la force du collectif pour y parvenir.
Il est servi par de très belles images, chaleureuses, où le dessin au posca se mêle aux papiers découpés, ce qui leur donne profondeur et relief.