J'ai trop peur, Yves Grever, Claire de Gastold, Didier JeunesseJ’ai trop peur, Yves Grevet, Claire de Gastold, Didier Jeunesse, 2021, 13€90

Un petit cochon grassouillet, très souriant sur fond jaune. Groïnk!

Cette première page est joyeuse, on se demande si c’est un jouet ou un vrai animal. À la page suivante, changement total d’ambiance. Le cochon est en fait un dessin sur la robe d’une fillette, qui se plaint d’une faim tenace. La famine guette aussi Gérard, le tigre. Le texte, à la première personne, insiste sur la peur, le milieu hostile “la terrible nuit noire” qui les entoure et le danger qui les guette. Dans l’image se mêlent des éléments de dînette, des prédateurs plus ou moins effrayants et d’autres animaux dont on se demande bien ce qu’ils font dans cette jungle (mais que vient faire là ce chat? Et cette famille de lapin?)

À la lecture de ces pages, on ressent clairement un décalage. On veut croire cette fillette, qui nous affirme qu’elle est terrifiée, mais il y a quelque chose qui cloche, qui fait plisser les yeux du jeune lecteur. Abandonnée par ses parents, vraiment? Dans cette petite robe jaune, avec une assiette en plastique sur les genoux? Humm, c’est étrange cette histoire.

J'ai trop peur, Yves Grever, Claire de Gastold, Didier Jeunesse

C’est finalement papa qui mettra fin au jeu de la petite fille. Il soulève la couverture aux couleurs bariolées qui faisait office de jungle, les animaux restent au sol, avec la petite dînette.

Il est temps d’aller se brosser les dents et au lit.
C’est pourtant beaucoup plus amusant de jouer à être abandonnée dans la jungle, surtout quand on se sait en sécurité parce que tout cela c’est “pour de faux”.
Allez, on y retourne?

J’aime la façon dont l’image nous donne des indices dès le début et nous aiguille sur la lecture de l’album. Les enfants demandent généralement une nouvelle lecture, puis une autre, et savourent d’autant mieux l’histoire qu’ils connaissent la chute.

Encore un album qui permet aux enfants de jouer avec leurs peurs, en toute sécurité.