Hourra! Juliette Binet, Rouergue 11€

isbn: 978-2-8126-0847-6

La couverture, déjà, intrigue. Quelque formes grises qui évoquent tout autant des cailloux que des nuages. Le bleu pâle, peut être celui de l’eau, à moins que ce ne soit le ciel. Alors, on l’ouvre et on pénètre immédiatement dans l’histoire. Pas de page de titre, pas de page de garde, juste un personnage de trois-quart dos qui s’apprête à passer à travers la page. Il s’aventure dans une grotte, un passage, un trou. L’image n’est pas sombre ni vraiment inquiétante, je dirais plutôt intrigante. Alors on le suit, de l’autre coté de la page.

L’épais carton des pages est découpé de formes arrondies, comme des flaques, des poches, des boyaux, on ne sait toujours pas vers quoi on se dirige.
Mais on y va, avec ce personnage, caché sous son chapeau, dont on ne peut qu’imaginer le visage. La traversée devient périlleuse, il faut faire des acrobaties, se faufiler, mais à travers les découpes on perçoit toujours une issue. Et soudain, dans tout ce gris, une tâche de bleu. On va passer de l’autre coté. On a, ensemble, traversé l’étrange. Hourra, nous voilà ailleurs.

Sans texte et avec une palette chromatique réduite, Juliette Binet partage avec les lecteurs un voyage initiatique, un moment charnière, une transition. Parce qu’elle se passe (presque) de mots, parce qu’elle n’impose aucune réponse, elle permet au lecteur d’investir ce récit avec sa propre histoire, d’y mettre ce qui résonne en lui, librement. Certains y verront une épreuve, d’autres une exploration. Moi, ce que je vois surtout, c’est qu’après un passage difficile, on se sent tout léger. Ça aide à entreprendre le prochain voyage.

En découvrant ce petit album cartonné, je n’ai pas pu m’empêcher de penser au jeu  Plus and minus, de Bruno Munari ainsi qu’aux pages intérieures de son album Dans la nuit noire.