Petite enfance et neurosciences (re)construire les pratiques
Auteur(s) :
Christine Schuhl-Josette Serres
Editions : Chronique sociale
Collection : Comprendre les personnes
Prix : 14.5€
Pages :143
Lorsque l’on travaille auprès de jeunes enfants,
nous mettons en pratique nos connaissances, et mélangeons une dose d’instinct
et de projection de notre vécu.
Auteur(s) :
Christine Schuhl-Josette Serres
Editions : Chronique sociale
Collection : Comprendre les personnes
Prix : 14.5€
Pages :143
Lorsque l’on travaille auprès de jeunes enfants,
nous mettons en pratique nos connaissances, et mélangeons une dose d’instinct
et de projection de notre vécu.
Nous savons qu’il est essentiel de se remettre
régulièrement en question pour ne pas tomber uniquement dans des automatismes,
nous faisant basculer facilement dans les fameuses douces violences.
Cette prise de recul peut se faire via des
documentaires, des cours, des lectures (c’est pour ça que vous lisez ma
chronique ) mais aussi, sans doute moins connu et évident, grâce aux
connaissances évolutives en neurosciences.
En effet, si on ne prend pas en compte le
développement psychique de l’enfant comment peut-on le comprendre et l’accompagner
au plus juste ?
Nous entendons régulièrement « il veut se
faire remarquer », « il ne sait pas attendre », « il ne
sait pas gérer ses émotions ». Et bien oui, rien de plus normal, son cerveau
n’est pas assez mature pour ces gestions, le petit enfant vit à 200% ce qu’il
ressent, de manière presque viscérale, et ne peut que gérer un à un les
évènements auxquels il assiste. Nous avons comme réflexe la plupart du temps, de
transposer nos capacités aux leurs, sauf que notre cerveau d’adulte est « fini »
(enfin pour la plupart d’entre nous :-D). L’emploi de mots trop complexes
n’aura aucun sens pour l’enfant, ce sera la posture de l’adulte qui primera sur
les paroles. L’enfant sent avant tout les appréhensions de l’adulte.
Dès la naissance, le bébé peut ressentir 5
émotions : la détresse, la surprise, le contentement, le dégout et l’intérêt.
À cela s’ajoute la capacité d’imiter, grâce aux « neurones miroirs ».
Le bébé va pouvoir imiter, puis s’approprier les choses et ainsi développer sa
conscience de lui et des autres. « L’imitation apprend à faire, et plus
même, apprend à être » nous rappelle Jacqueline Nadel.
L’ocytocine libérée à la naissance permet la
création et le renforcement du lien affectif mère/enfant, ainsi que la
libération des opioïdes : les hormones donnant le sentiment de bien-être.
La nature est donc bien faite !
La compréhension du monde qui l’entoure va se
réaliser au travers de deux phénomènes : l’attirance vers l’humain et le
traitement statistique des évènements. Plus son monde va être stable (rituels,
répétitions), plus l’exploration sera sécurisée, et plus les modes de communication
du bébé vont s’élargir.
Les situations insécures, passent dans le cerveau
par l’amygdale puis l’hypothalamus et déclenchent les hormones du stress. Elles
sont gérées par le néocortex une fois adulte, mais son fonctionnement se bâtit
dans l’enfance.
Dans les collectivités, la première source « d’angoisse »
est généralement l’adaptation. Christine Schuhl et Josette Serres, nous
donnent des idées pour sortir des automatismes, afin de ne pas être focalisé sur nos fiches-type. Préparer les supports à l’avance, ne pas s’attarder sur
une « check-list », s’attacher aux détails que l’enfant aime sont des
outils favorisant un accueil serein, raconter son enfant n’est ni facile ni
anodin. Lorsque l’on sait qu’il faut 9 mois pour constituer une figure d’attachement,
cela en dit long sur l’importance de la stabilité dans un lieu de vie petite
enfance. Une adaptation qui n’est pas réduite pour les parents à passer 1H le
premier jour dans la structure, est vouée à favoriser cette stabilité.
Elles attirent également notre attention sur des moments de la journée où
tout peut basculer. En fin de journée, les professionnels sont happés par les
transmissions, le rangement, le ménage, l’enfant perd alors le contact physique
et visuel de l’adulte, il ne peut plus se réguler et vit alors un chaos intérieur.
Ranger avec les enfants, accueillir les parents ensemble sont des petites
astuces pour ne pas perdre cette continuité.
Le nom des espaces, qu’attend-on d’un groupe de « ouistitis » ou
de « guimauves » ? Qu’est-ce qu’un enfant perçoit de ce qui l’entoure
si les pièces dans lesquelles il évolue possèdent des meubles centraux de plus
de 70cm ? C’est là tout le concept de Josette Serres de « l’adulte
phare » qui éclaire l’espace de l’enfant.
Il faut également veiller à ce qu’il y ait des jouets identiques, un camion
rouge n’est pas un camion bleu…lorsque l’on craque sur un sac marron, on ne
veut pas du gris !
Etiqueter les espaces de rangement peut aider à sa mise en œuvre, tout comme
avoir suffisamment de jouets pour pouvoir être dans une réelle imitation
(peut-on mettre une table pour 4 avec 2 couteaux et 3 assiettes ?).
Christine Schuhl et Josette Serres nous invitent également à penser le jeu « libre ».
Cela n’a aucune signification pour l’enfant, qui pour lui, est libre de jouer.
Tout comme la représentation de l’espace qui est pour l’adulte bien défini, la
crèche est pour l’enfant un vaste terrain d’explorations. Les repères dans le
temps se feront uniquement par la répétition et la redondance, tout comme la
conscience d’autrui, il lui faudra avoir déjà vécu beaucoup de fois la scène pour comprendre que lorsqu’il monte le toboggan à l’envers il peut gêner celui
qui veut descendre. L’enfant vit dans le moment PRÉSENT.
Plein de petits actes constituent des paramètres sécurisants ou angoissants,
compréhensibles ou non dans le quotidien d’un petit enfant, mettre à tout prix
du vert dans le sapin n’aura pas de sens si le jaune est très attirant,
attendre pour manger alors que quelques petits camarades ont commencé leur repas et sans être occupé à autre chose est insoutenable, tout comme avoir une grosse
faim même si le biberon du matin a été pris « tard » comme écrit sur
le cahier de transmissions. Comment s’endormir dans un lit au milieu d’une
pièce ? Sous l’œil d’un adulte un peu trop pesant ? Comment manger correctement si nos pieds ne touchent pas le sol?
N’oublions pas que le meilleur accompagnement de l’enfant passera avant tout
par l’observation et par la considération de ses capacités propres.
Christine
Schuhl est polyvalente et intervient dans différents champs. Éducatrice de
jeunes enfants de formation de base, puis montessorienne et diplômée d’études
appliquées en Sciences de l’éducation. Elle est aussi aujourd’hui rédactrice en chef de la revue Les
métiers de la petite enfance, elle anime des séminaires et des conférences
destinés essentiellement aux professionnels de la petite enfance. Également
conseillère pédagogique, elle travaille avec des équipes, à partir
d’observations “participatives” et des groupes d’analyse des
pratiques professionnelles.
Josette
Serres est docteure en psychologie du développement, ingénieure de Recherche au
CNRS, spécialisée dans le développement cognitif du nourrisson. Elle est
formatrice petite enfance et de nombreuses publications scientifiques.
Pour aller plus loin:
“Loczy ou le maternage insolite” Appell G, David M
“Au cœur des émotions de l’enfant” Filliozat I
“J’ai tout essayé” Filliozat I
“Heureux en crèche, un projet de coéducation parents-professionnels” Deroo A
“La cause des enfants” Dolto F
“Pour une enfance heureuse” Gueguen C
“Bien-traitance, un trait d’union à conquérir” 1001 BB n°135