Monsieur personne, Joanna Concejo, Format, 2022, 19€90
Dans un quartier gris, aux murs et aux habitations toutes semblables, vit un homme qui n’attire aucune attention. Transparent, en apparence inactif, sans importance aux yeux des voisins, il ne suscite aucun regard, aucun intérêt, il se fait oublier.
Seuls les enfants parfois s’interrogent sur cet étrange voisin, mais c’est sans amitié ni compassion qu’ils se demandent pourquoi il est toujours à sa fenêtre, pourquoi il semble les regarder. Si de nouveaux venus posent parfois brièvement un regard sur ce monsieur personne, c’est toujours très rapidement, avant de passer à autre chose.
Il est gris, il est terne, il est invisible. Tout le jour il s’adonne à des tâches mornes et répétitives.
Mais la nuit, aux heures les plus noires, Monsieur Personne travaille. Son travail nocturne est aussi extraordinaire que sa vie diurne est terne.
Je ne vais pas vous révéler quelle est l’étrange profession de ce protagoniste, mais c’est une tâche très poétique, absolument indispensable et tout à fait inattendue. Avec elle, l’album nous invite à deviner la beauté cachée sous la grisaille ambiante, à réserver notre jugement aussi sans doute.
Monsieur personne est de ces albums subjuguants et étranges. Les illustrations au crayon sont d’une grande finesse, et semblent chercher à donner du sens plutôt que de la beauté. Leur singularité peut étonner voire déranger. Moi je les trouve belles parce qu’elles suscitent des émotions chez le lecteur, qui peuvent aller jusqu’à un sentiment de malaise.
D’abord édité aux éditions du Rouergue en 2008, Monsieur personne est aujourd’hui paré d’une nouvelle couverture, plus intrigante que la première, j’espère qu’elle vous donnera envie de l’ouvrir car c’est un album hors du commun.