Au cœur des émotions de l’enfant, Isabelle Filliozat, éditions (Poche) MARABOUT,  6,50€.

« Derrière ce que les parents nomment « caprice », derrière un comportement bizarre, déplacé, excessif ou simplement non-ordinaire, cherchons l’émotion, cherchons le besoin. L’enfant nous dit quelque chose. Les caprices sont des inventions des parents, ils surgissent lorsque les parents se prennent les pieds dans les jeux de pouvoir ».

Avec cette vision des choses, Isabelle Filliozat pose un postulat fort et déroutant: le caprice n’existe pas. Ou du moins, uniquement dans la tête des adultes. Dur d’adhérer à cette croyance, tant les images et souvenirs que nous avons- en tant que professionnel et/ou parent- des nombreuses occasions de « scènes » et crises en tout genre parsèment notre mémoire.

Quand l’enfant se roule par terre parce qu’il veut le jouet de l’autre enfant, quand l’enfant hurle à ne plus avoir de souffle parce qu’un adulte lui a refusé ce qu’il voulait, quand l’enfant s’enferme dans une bouderie intense pour une « contrariété », nous glissons très facilement dans le « un caprice de plus, au secours! ». C’est sans prendre en compte le développement du cerveau de l’enfant encore immature, notamment en terme de gestion des émotions. C’est donc sans prendre en compte que l’enfant est un enfant et non un adulte miniature.

A travers de nombreux exemples, Isabelle Filliozat nous éclaire. Non, nous ne sommes pas des monstres d’avoir pensé CAPRICE, le tout étant de s’informer, se renseigner, se poser. L’accompagnement de l’enfant passe par la compréhension de ce qu’il vit, or qui dit le comprendre dit se mettre à sa place, connaître les capacités de son corps, de son esprit à son âge, et surtout, de remettre les choses dans un CONTEXTE.prophete_redim.jpg

Il ne faut pas oublier que la vie est le mouvement, que l’émotion est le mouvement de la vie EN SOI. On ne peut le nier aujourd’hui, « dans la société actuelle, la route du succès est ouverte par trois axes: la confiance en soi, l’autonomie et l’aisance relationnelle ». Un programme bien loin de la facilité. Il est prouvé aujourd’hui que posséder ces « qualités » est au moins égal aux compétences techniques que l’on peut avoir adulte. Les professionnels et les parents ont besoin de REPÈRES et non de conseils, et cela l’auteur du jour l’a bien compris.

Isabelle Filliozat nous propose de nous centrer autour de 7 questions dans notre accompagnement de l’enfant, afin d’ajuster au mieux nos comportements.

Tout d’abord, quel est le vécu de l’enfant? Car selon les évènements passés, il ne réagira pas du tout de la même manière au présent. Elle prend l’exemple d’une petite fille rejetée dans sa nouvelle école après avoir expliqué qu’elle était arrivée là car son papa était mort, et les autres enfants l’ont évitée par crainte d’une sorte de contagion, car l’idée de perdre l’un de ses parents est intolérable.

Que dit-il? La parole de l’enfant cache parfois bien autre chose. Cas concret d’un enfant disant tous les jours qu’il refuse d’aller à l’école, au point de somatiser, avec la découverte plus tard que son instituteur était un pédophile. Attention, cela ne veut pas dire qu’à chaque enfant qui ne veut pas aller à l’école il y a une gravité mais il est toujours essentiel de s’interroger. Le comportement est un symptôme, à nous d’en trouver les causes.

Quel message ai-je envie de lui transmettre? Est-ce que lorsque l’on devient hystérique pour un objet cassé, avec toute la colère versée sur l’enfant, nous ne transmettons pas que l’objet a plus de valeur que l’attention ou l’amour que nous lui portons? Il a dessiné un terrain de foot sur le sol de sa chambre avec grande fierté, la réaction que l’adulte aura de cette « œuvre » aura des conséquences, « nos réactions fassent aux créations de nos enfants vont conditionner ses croyances sur lui-même ».

Pourquoi je dis cela? Parfois, lorsque les enfants sont tranquillement dans un jeu et ne veulent pas l’arrêter ou ne veulent pas rentrer, on s’obstine à les presser. Et puis, un jour, on se dit: mais pourquoi je veux que l’on se dépêche? Il y a bien sûr des moments où il y a un impératif mais, si l’on s’observe un peu, nous nous rendrons compte qu’il y a bien des fois où l’on se met la pression tout seul. Il est au parc et ne veut pas rentrer, mais il faut rentrer pour faire la pâte à sel prévue, en quoi est-ce mieux que de traîner encore un peu dehors? Nous agissons aussi avec beaucoup d’automatismes, comme par exemple lorsque nous refusons à un enfant de commencer le repas par le dessert. Finalement, on dit non sans même s’interroger sur cette demande. Parce que nous sommes ancrer dans des habitudes culturelles, parce que nous avons peur qu’une réponse affirmative à une demande inédite soit le début d’une série de ces fameux caprices. Un peu de remise en question face à leurs questions?

Mes besoins sont-ils en compétition avec ceux de mes enfants? Nous attendons généralement des enfants de se comporter en adulte. En plus, leurs besoins sont généralement à l’opposé des nôtres. Cependant, la coopération restera toujours la meilleure alliée et la plus efficace, plutôt que d’être deux perdants dans une relation de pouvoir. Dire « comment peut-on faire pour que ce moment puisse se passer dans le calme » sera bien plus productif qu’un « tais-toi, tu es vraiment insupportable! »…L’enfant qui accuse quelqu’un d’autre de sa bêtise a tendance à nous exaspérer, mais assumer une bêtise revient à dire que l’on est mauvais et donc pas l’enfant parfait attendu…  Nous avons tendance à calquer nos propres besoins sur les leurs, et les plus difficiles à contrôler sont ceux de notre propre petite enfance! Résolvons nos propres inachèvements et frustrations plutôt que d’entrer en compétition avec notre descendance ou les enfants que nous accompagnons au quotidien

Qu’est ce qui est le plus précieux pour moi? Comme dans l’exemple du vase cassé, les réactions fortes que nous avons transmettent des messages, même inconscients, aux enfants. Leur besoin est de savoir qu’ils sont aimés en toutes circonstances, même lorsqu’ils testent les limites.

Quel est mon objectif? Les notions de bien ou mal sont différentes pour chacun, chaque société et chaque culture. Il n’y a pas de réponse universelle, cela dépend de notre objectif avec cet enfant précis à ce moment précis.

Tout comportement exagéré et surtout
systématique, qu’il soit d’agressivité ou de passivité extrême,
de dépendance excessive à la mère ou de jalousie abusive,
d’incapacité à se concentrer ou d’opposition systématique, tout
cela a une motivation. Une émotion est bloquée, un besoin est caché

Il ne s’agit pas de « tout leur passer », mais de laisser sortir l’expression de leurs envies, sans pour autant toutes les combler mais accepter d’écouter une colère tout en faisant la différence besoin/envie. Un « pourquoi tu pleures » sera toujours moins efficace qu’un « que se passe t’il? ». L’inhibition est une PEUR ou une DOULEUR, pas une preuve d’un cerveau déficient, dont l’accompagnement doit avoir comme objectif d’éviter de blesser l’enfant et de l’amener à la confiance. La répression émotionnelle n’est pas bonne, par exemple un enfant qui dort énormément, qui ne dit rien face à un choc ou qui n’a peur de rien cherche à nous dire quelque chose…depression_redim.jpg

N’oublions pas que les enfants nous observent et apprennent de nous, autant de nos gestes que de nos paroles, et que le respect des règles s’applique à nous, et que la quantité de joie, de bonheur et d’amour dont ils sont entourés est une enveloppe affective sécurisante.

Au delà de ces questions essentielles, Isabelle Filliozat traite des grandes émotions qui nous traversent: la peur (l’écouter, la traverser), la colère (oui c’est une réaction saine, qu’il faut savoir accompagner dans la non-violence), la joie (ça s’apprend-il? quelle est la place de l’amour?), la tristesse (le pouvoir des larmes, la force de la nostalgie), la dépression (cela existe à tout âge, comment la déceler, l’échec scolaire est-il un signe?), avec divers outils: l’écoute empathique, la communication corporelle etc…

Enfin, elle nous rappelle ce que l’on sait tous: que la vie n’est pas un long fleuve tranquille car nous avons tous côtoyé des séparations, morts, maladies, bouleversements et que l’on peut y faire face, qu’être heureux, et le cultiver est la clef à bien des problèmes.  liberer_les_tensions_redim.jpg

En résumé, ce livre est pour moi une bible, je l’ai lu et relu et vous le conseille très fortement, souriez, vous êtes vivant 😉

Isabelle Filliozat est psychothérapeute et écrivain, notamment de best-seller dans le milieu de la petite enfance, elle est également formatrice, conférencière et anime des ateliers pour les parents. Elle décrit sa biographie avec détails sur son site internet.

Pour aller plus loin:

“L’intelligence du cœur” : Isabelle Filliozat

“Au cœur des émotions de l’enfant” :Isabelle Filliozat

“J’ai tout essayé”: Isabelle Filliozat

« Il me cherche »: Isabelle Filliozat

« Les chemins de la joie »: Isabelle Filliozat

‘Il n’y a pas de parent parfait »: Isabelle Filliozat

« Maman, je veux pas que tu travailles! »: Isabelle et Anne-Marie Filliozat

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