Gruffalo, édition anniversaire 25 ans, Julia Donaldson, Axel Scheffler, Gallimard jeunesse, 2024, 14€90
Ah bon, il a déjà 25 ans le Gruffalo? Mazette, comme le temps passe! Pourtant, il n’a pas une ride sous ses yeux oranges!
Vous ne le connaissez pas encore, Alors il est temps de faire les présentations.
D’abord, il y a une petite souris. Frêle, mais drôlement futée.
Pour elle, la forêt est plein de prédateurs, mais grâce à sa langue bien pendue, elle s’en sort fort bien.
Quand elle est menacée elle prétend avoir rendez-vous avec une créature redoutable, qu’elle décrit à grand renfort de qualificatifs effrayants.
Le Gruffalo a des défenses terribles, des dents redoutables, des mâchoires terrifiantes. Face à ces propos, les prédateurs (Renard, Chouette, Serpent) préfèrent détaler.
Mais quand un Gruffalo, un vrai, débarque devant notre petite souris, on s’inquiète pour le rongeur. Va-t-elle être prise au piège de son propre mensonge?
Pas le moins du monde, les auteurs n’ont visiblement pas pour but de faire la morale aux mouflets en leur expliquant que c’est mal de mentir mais plutôt de les divertir.
J’avoue que je partage ce parti-pris. La mode des livres très normatifs, qui ne cessent de dure aux enfants comment bien se comporter me désole.
Je préfère l’humour et la fantaisie du Grufallo qui montre que l’imagination (et une bonne dose d’audace) peut compenser quand on n’est pas le plus fort.
Dans cette édition spéciale une jaquette décor et des personnages à découper complètent l’album pour que les enfants jouent avec. Il y a aussi quelques activités en fin d’ouvrage que je ne trouve pas très utiles mais qui ne mangent pas de pain.
Pour compléter on peut aussi offrir le cherche-et-trouve qui est sorti en même temps. Les images foisonnantes d’Axel Scheffler se prêtent parfaitement à ce jeu. Avec ses 14 grandes scènes et ses 120 éléments à trouver, il y a là de quoi occuper les mouflets un moment.
Parmi les nombreux livres-jeux que la production offre aux enfants, il y a un genre qu’ils affectionnent particulièrement, c’est le cherche-et-trouve.
Quand ils sont autonomes et les regardent seuls ou entre eux, c’est l’idéal, des heures de jeu s’offrent à eux et des heures de tranquillité s’offrent à nous!
Mais souvent, très souvent, ils réclament la présence d’un adulte, pour les aider ou juste pour être témoins de leur réussite, quand ils trouvent plus vite que nous.
J’ai quelques souvenirs de séances de lectures assez laborieuses en bibliothèque de rue, avec des enfants exigeant ma présence pour regarder loooonguement (très longuement) les pages de Où est Charlie, le cherche-et-trouve par excellence, qui voit défiler les générations avec toujours le même succès.
Mais il en existe de nombreux autres, et puisque notre présence est requise, autant en choisir des plaisants pour nous aussi (oui, j’ose briser le tabou, les Où est Charlieme les brisent me lassent)
Je préfère largement les deux chouettes cherche-et-trouve que voilà:
Devine, cherche et trouve ville, Manon Bucciarelli, Gallimard jeunesse, 2023, 20€
C’est un hybride, à la fois livre à chercher et livre jeu, puisque les éléments qu’il faut trouver dans l’image ne sont pas identifiés par leur simple nom mais par une description. Ainsi nous découvrons les éléments emblématiques de 16 grandes villes du monde, qui chacune sont représentées sur une large double page.
On cherche la tower eye à Sydney, le bol de ramen à Tokyo, le bus à impériale à Londres.
L’impression en 4 tons directs (violet, jaune, doré et noir) donne une grande unité graphique à l’album, mais chaque page a son atmosphère propre, qui correspond à celle de la ville présentée.
C’est sympa, ça fait réfléchir et voyager et au moins ça ne nous fait pas saigner des yeux comme un certain cherche et trouve à rayures, car ici les images sont très lisibles.
Mais il est tout de même complexe, pour bien savourer les devinettes je dirais qu’il est adapté vers 5/6 ans. Bien entendu, un enfant plus jeune peut l’apprécier aussi à sa façon!
Calinours cherche et trouve, Alain Broutin, Frédéric Stehr, l’école des loisirs, 2023, 12€
Le petit ours blanc créé par Frédérir Stehr fait le bonheur des enfants depuis les années 80.
Dans ce bel album au format généreux (il faut bien ça pour caser tous les détails des images), on le retrouve dans 8 grandes illustrations pleines pages en compagnie de ses amis et de tout un tas d’animaux de la forêt. Dans des situations du quotidien (la baignade, à l’école ou en train de s’endormir), à travers différentes saisons, de jour et de nuit, on se régale à explorer ce petit monde plein de tendresse.
On peut jouer avec deux entrées différentes, selon l’âge et l’habitude des enfants: une frise en bas de page montre les éléments à trouver et un encadré propose d’autres recherches, sous forme de questions (« Combien de grenouilles comptes-tu? » « Un oiseau est en train de perdre son bonnet. Aide-le à le retrouver »).
Il est aussi possible de se promener dans les images comme dans un grand album sans texte, imaginant les petites histoires qui s’y nichent.
Il conviendra donc aux plus petits (dès 2 ans si ça vous dit, en plus les pages sont épaisses et solides, avec les coins arrondis) et durera longtemps (j’ai passé plus d’une heure dessus avec des enfants de grande section de maternelle, ils se sont éclatés)
J’aime l’atmosphère chaleureuse et amicale qui se dégage de chaque page et pour l’instant il ne provoque chez moi pas la moindre lassitude, je suis même contente quand un enfant le choisi. C’est bon signe! De ce point de vue là je le place du côté des grands albums des saisons de Rotrault Suzanne Berner, des années que je bosse avec toujours avec le même plaisir, chaque lecture offrant de nouvelles découverte.
À la recherche du père Noël, Loïc Clément, Anne Montel, little urban, 2021, 22 €
Un très (très) grand format pour cet album hybride entre cherche et trouve et texte illustré.
Certains enfants connaîtront déjà le personnage principal, le professeur Goupil (mais il n’est nul besoin de le connaitre pour apprécier le présent ouvrage)
Il est au chômage et répond à une annonce que personne jusque là n’avait pris au sérieux: il s’agit de remplacer le père Noël, qui a mystérieusement disparu.
Accompagné d’une bande de joyeux animaux indisciplinés, il se rend donc au pôle nord. Pour bien comprendre en quoi consiste le boulot il faut qu’il visite les différents espaces de l’atelier du père Noël. C’est que c’est une véritable entreprise, avec un atelier couture, un espace dédié aux papiers cadeaux, un poste de contrôle, etc.
L’histoire est drôle, bien menée avec plein de clins d’œil sympa.
Sur chaque grande illustration, nous pouvons chercher le père Noël qui se cache, mais aussi les animaux qui accompagnent le professeur Goupil et autres lutins. Pour ces derniers, le niveau de difficulté est d’ailleurs assez élevé, tant les images sont riches et foisonnantes.
D’ailleurs, la dernière fois une petite fille a renoncé et m’a dit « sur la première page, j’ai pas trouvé le père Noël mais j’ai trouvé les trois brigands, ça vaut?
Ça vaut!
Vous y trouverez d’ailleurs pleins d’albums que vous connaissez, mais aussi un petit totoro très discret et sans doute bien d’autres références qui m’ont échappées.
On peut y passer des heures et, croyez-moi, il a un succès fou même en dehors de la période de Noël!
Mais où sont les chatons, Martine Perrin, Saltimbanque, 2022, 12€90
Frimousse, la chatte blanche, est chargée de veiller sur ses chatons pendant que son humaine va faire des courses.
Pas de problème. Pas de problème? Mais en fait, où sont-ils les fripons?
La minette se met à chercher ses petits dans la maison, c’est l’occasion de nous faire visiter son logis et ses nombreux recoins.
Martine Perrin est spécialiste des découpes astucieuses, on les retrouve dans quasiment tous ses albums.
C’est donc encore le cas ici, et comme l’histoire s’adresse à des tout petits, les pages sont faites d’un solide carton, qui rend la manipulation plus sûre. Je l’ai testé, il résiste très bien aux petites menottes et aux doigts qui s’insinuent dans les trous des pages.
Nous allons donc passer d’une pièce à l’autre, puis aller dehors, même la boite aux lettres sera fouillée.
Il règne un joyeux bazar dans l’ensemble de la maison, il faut dire qu’il y a pas mal de monde. Des petites souris, des chiens, des poissons rouges et autre oiseaux, c’est très vivant. Mais où sont les chatons? Pas si cachés que ça finalement, les enfants les trouvent facilement et poussent alors des cris de joie. Mais ils s’amusent tout autant à relever les détails de l’illustration, où il y a beaucoup de petites actions parallèles et plein de fantaisie.
Les dernières pages nous offrent d’autres pistes de lecture. D’abord elles nous indiquent que les pages portent toutes un numéro, de 1 à 10, incitant les enfants à l’utiliser comme un cherche-et-trouve. Ensuite une petite phrase prononcée par l’humaine nous aiguille vers une autre histoire qui généralement nous avait échappée. Il faut alors revenir en arrière et faire une lecture attentive de l’image pour trouver la solution.
Je vous laisse le plaisir de chercher.
Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler des éditions les grandes personnes. Incontournables sur mon blog, cette maison d’édition se distingue par son appétence pour l’art et ses livres objets souvent atypiques. Elle a été crée par Brigitte Morel à la suite de la disparition des éditions Panama et reprend une bonne partie de son catalogue (mais malheureusement pas les titres étrangers, donc le fabuleux Travaux en cours reste introuvable)
Nées en 2009, les éditions les grandes personnes éditent une vingtaine d’ouvrages par an. Oui, ouvrage, le terme est sans doute mieux choisi que « livre », tant ils sont proches parfois de la sculpture ou du jeu.
On identifie sans peine le logo, bien qu’il soit toujours différent, intégrant un élément graphique de chaque livre. De la même façon, on reconnaît la patte de la maison dans une très grande variété de formes d’album et de type d’image.
Chez les grandes personnes, on trouve des très grands formats avec par exemple les albums de Joëlle Jolivet (dont je suis particulièrement fan, elle pratique la linogravure et ses livres sont toujours magnifiques) ou de Bernadette Gervais (qui pratique plutôt le pochoir) ou de tout petits formats, comme certains albums de Martine Perrin qui tiennent dans la main d’un jeune enfant. On trouve de très nombreux pop-up, des leporellos (livres paravents), des livres à flap (avec un cache à soulever) et même des flip-books (vous savez, ces petits livres que l’on feuillette rapidement pour faire défiler les images façon dessin animé).
Et puis il y a les livres objets, souvent inclassables, comme Prendre et donner, de Lucie Félix, un hybride entre le puzzle et le livre, qui d’ailleurs fait échos à Reverso, de l’artiste japonais Katsumi Komagata, également édité en France par les éditions les grandes personnes.
Le travail éditorial est évidemment extrêmement soigné, avec de telles ambitions esthétiques c’est indispensable. L’éditrice, Brigitte Morel, suit elle même de très près tout le processus de création. Le résultat est à la hauteur, chaque album est un bel objet.
On me fait parfois remarquer que ce sont des livres pour adultes. Certes, ils sont beaux et les adultes amateurs d’art peuvent y trouver leur compte. Mais dans le cadre de mon travail je les lis aux enfants, y compris à des enfants qui ne sont pas spécialement lecteurs et ils sont souvent choisis et appréciés. Il ne faut pas penser que parce que ce sont de beaux livres ils sont difficiles d’accès, c’est même parfois exactement le contraire. Le cherche-et-trouve Où est Momo? par exemple rencontre toujours un franc succès sur le terrain. Tout comme les imagiers à caches de François Delebecque. Et l’imagier pour jouer, de Pascale Estellon fait partie de mon top 20 pour les bébés, tant il est apprécié des tout petits.
Je ne m’appelle pas Alfred, Ben Manley, Aurélie Guillerey, Little urban, 2021, 14€50
Qu’est-ce qu’ils sont terre-à-terre les adultes parfois! Tiens, par exemple, ils n’arrêtent pas de dire des trucs comme « Alfred, lève toi », « Alfred, plonge dans le grand bain », « Alfred, présente nous ton travail ».
Pff…
Mais le petit garçon sait très bien s’échapper de ces contraintes. Il part dans ses pensées.
Je ne m’appelle pas Alfred.
Mon nom est Billy la terreur, célèbre hors-la-loi, recherché par le shérif dans tout le pays.
A chaque situation quotidienne correspond un personnage imaginaire, un nom improbable et un décor qui se déploie sur une double page.
Pour oublier qu’on le met parfois en situation déplaisante, l’enfant se projette tour à tour hors-la-loi, alpiniste, inventeur de génie ou encore plongeur sous-marin.
Son monde interne fourmille de détails, et les petits lecteurs à qui on lit cet album ont plein de choses à voir dans les grandes illustrations.
L’histoire ne prétends pas qu’Alfred échappe effectivement à l’exposé devant toute la classe, ni à la séance de piscine. Mais il trouve incontestablement dans son imaginaire les ressources pour mieux vivre ces petits tracas.
C’est bien souvent par le jeu que les bambins parviennent à surmonter les petits défis de tous les jours.
Mais rassurons-nous, malgré son imagination fertile, Alfred sait très bien qui il est, et au moment d’aller se coucher, quand maman vient pour le bisou du soir, il ne s’agit plus d’être quelqu’un d’autre, il n’échangerait pas sa place!
C’est un album bien charmant, sur les pouvoirs de l’imaginaire, qui montre un personnage principal attachant et touchant.
Il puise manifestement dans ses jouets pour alimenter ses fantasmes et on peut s’amuser à retrouver dans sa chambre les différents objets qui se rapportent aux pages précédentes.
Un petit cherche-et-trouve auquel les enfants s’adonnent avec plaisir. Vous pouvez en lire un extrait sur le site de l’éditeur.
Cache cache carotte, Maria Jalibert, A pas de loups, 2020, 14€
Quand on a affaire à des jouets de pacotille, soigneusement mis en scène, en guise d’illustration on peut être à peu près sûr d’être face à un album de Maria Jalibert.
Elle a employé ce procédé d’abord pour un imagier, puis pour un abécédaire. Et, pour la 2eme fois, elle utilise ce type d’image pour illustrer un cherche-et-trouve. Il faut dire que la technique s’y prête particulièrement bien.
Ici, chaque double page représente un décor dans lequel Lapin cherche en vain sa carotte.
Mais, à défaut de trouver son légume préféré, il repère tout un tas de trésors, que nous allons à notre tour tenter de découvrir dans l’image.
Ce qu’il y a de chouette avec ce type d’album, c’est que les enfants peuvent s’y plonger longuement, ils scrutent avec une grande attention et analysent l’image mieux que jamais.
Le format carré, pas trop grand et la taille des objets rendent le jeu accessible à des enfants encore jeunes. Contrairement par exemple au grand classique Où est Charlie? qui est complexe et tout de même très fastidieux à explorer avec un petit. Cache cache carotte, lui, peut être proposé à des enfants de maternelle sans problème.
Comme il y a de nombreux objets à trouver, ils ont toutes les chances d’en repérer plusieurs avant nous.
C’est un album avec lequel on peut facilement s’amuser à plusieurs, et qui permet de collaborer. On n’est pas trop de deux ou trois pour tout trouver. Vous pouvez aussi jouer à « le premier qui trouve a gagné » si vous aimez la compétition (mais perso ce n’est pas trop ma tasse de thé).
Les plus petits, ou les moins patients, ne finiront peut-être pas toutes les pages. Qu’importe, tant qu’ils passent un bon moment.
J’ai vu aussi pas mal d’enfants chercher tout autre chose que ce qui est proposé par le texte. Les dragons par exemple (ma cadette qui est légèrement obsessionnelle des dragons en ce moment en a trouvé plusieurs). Ou prolonger le plaisir en se donnant des défis mutuellement.
Mais parfois aussi ils se contentent d’écouter sans prendre la peine de chercher les objets, ou en ne cherchant que le lapin (qui est franchement facile à trouver à chaque page).
Chacun est libre de s’approprier cet album à sa façon.
Un petit lapin se cache dans le jardin, Mathis, Aurore Petit, Milan 10€50 Mathis et Aurore Petit revisitent dans cette collection des comptines traditionnelles. Avec un humour décapant et parfois un brin subversif, ils inventent une suite aux chansons bien connues. Ici, à la suite du petit lapin, les animaux se succèdent dans le potager, dévorant en douce tous les légumes. Le fermier fait office de dindon de la farce. Obsédé par sa moustache, il semble aveugle à ce qui l’entoure. L’ambiance devient de plus en plus absurde au fil de l’histoire, et les animaux qui défilent dans les plantations sont de plus en plus improbables. (Et la moustache du jardinier sera tour à tour frisée, brossée, lissée et même tressée par le jardinier autocentré) Les illustrations pleines de peps conviennent parfaitement à cette chanson entraînante. D’ailleurs, les mouflets ne s’y trompent pas et se mettent volontiers à danser quand on leur chante. La chute, qui joue sur l’idée de la dévoration, fait le plaisir des enfants plus qu’elle ne les effraie.
Une lecture joyeuse en perspective, pas du genre « retour au calme » mais idéale pour ambiancer un groupe de mouflets. En lecture plus individuelle c’est aussi un petit jeu de cherche-et-trouve puisque les animaux sont dissimulés dans l’image.
A noter: il n’est pas spécialement nécessaire de s’être entrainé avant pour la chanter correctement, il n’y a pas de pièges ou de difficulté, ça se met bien en bouche (et en tête, oui, bon, vous l’aurez pour la journée). Un petit lapin qui a été apprécié aussi par Sophie.
Ma maison, Laetitia Bourget, Alice Gravier, les grandes personnes, 20€
En raison de sa jaquette, on ouvre cet album accordéon directement sur sa première page et on est immédiatement happé par le récit. Un narrateur invisible nous entraine sur le chemin qui mène à sa maison. Un chemin qui se fait en train, en car et à pied. Il faut prendre son temps, les grandes illustrations attirent notre regard. On ne se presse pas, il faut laisser l’œil découvrir l’écureuil ici, le geste tendre d’un bambin qui met son pouce dans la bouche là et puis les fleurs, partout, magnifiques, luxuriantes, une vraie bouffée d’oxygène.
Étonnamment, alors qu’on découvre un lieu inconnu on se sent chez soi, il y a du familier dans l’air et une atmosphère chaleureuse. Chaque personnage croisé semble prêt à nous saluer.
On tourne les pages ou on déploie le leporello, dans les deux cas la lecture est fluide, comme un traveling latéral.
Quand on arrive à la dernière page la maisonnette est là, parfaitement insérée dans son écrin de verdure.
Alors on passe de l’autre côté du paravent et on entre.
On quitte le monde très végétal de l’extérieur, même s’il est rappelé régulièrement dans l’image.
Il n’y a toujours pas de protagoniste mais la maison est pleine de vie, les personnages sont très présents, bien qu’on ne les voit pas.
Chaque double page nous montre une pièce différente, on comprend qu’on est dans une famille qui compte deux enfants, en étant très attentifs, on peut même découvrir leurs prénoms.
Je pense que si cet album est si touchant c’est parce qu’il nous convie dans l’intime. Il y a une vraie générosité dans la démarche. On est accueillis par ce narrateur invisible dont on se sent pourtant si proche.
Les enfants en font volontiers un jeu, avec ses pages cartonnées et son grand format, il peut faire une cabane, on peut alors être « pour de vrai » dans la maison, s’amuser à passer de l’intérieur à l’extérieur.
C’est aussi un cherche-et-trouve, le verso de la jaquette propose des vignettes à retrouver dans les pages. Cette précaution n’était pas nécessaire, les bambins, spontanément, s’amusent à relever les détails qui les touchent particulièrement.
Mais où est Momo? Andrew Knapp, les grandes personnes, 10€
Momo, c’est le cabot qui sur la couverture nous regarde avec sa tête penchée sur le côté. Il louche un peu Momo, mais pour jouer à cache-cache, c’est le plus fort.
Sur chaque page de droite, il est photographié dans un espace différent (librairie, jardin, cuisine, fête foraine etc), plus ou moins dissimulé dans l’image. Le jeu c’est de le trouver mais également d’y trouver trois objets, présentés hors contexte sur la page de gauche.
Un cherche-et-trouve adapté aux plus jeunes des lecteurs. Il faut dire que les bébés n’ont pas leur pareil pour dénicher le détail de l’image, ils ne se lassent pas de faire des recherches, tous sens en éveil, et de faire des liens entre les différentes choses qu’ils rencontrent. Alors mettre en relation l’image de la page de droite, et celle de gauche, c’est largement dans leurs cordes.
Ils scrutent, repèrent puis pointent joyeusement la tête du chien qui émerge d’un tas de peluches ou qui se camoufle dans les hautes herbes du jardin. Certains adorent chercher aussi les autres objets, d’autres se concentrent sur Momo, et puis il y a ceux qui lisent cet album comme un simple imagier, ils désignent, parfois nomment les objets et s’ils sondent l’image ce n’est pas pour participer au jeu de recherche.
Chacun sa démarche de lecteur, en tout cas tous apprécient.
Il faut dire que Momo est franchement attachant et que le travail photographique est de qualité. Avec un jeu de résonance entre les couleurs de la page de droite et de gauche, chaque double nous plonge dans une ambiance. L’auteur est canadien et ses photos sont juste assez dépaysantes et suffisamment familières à la fois.
Le cache-cache des animaux, Tomoko Ohmura, école des loisirs, 11€50
C’est le chien qui compte. Il devra chercher tour à tour trois autres animaux, dissimulés dans la maison.
Et ce n’est pas si simple. D’ailleurs, le petit lecteur qui cherche dans chaque image l’animal caché peut hésiter un peu. Le dessin de Tomoko Ohmura est toujours très lisible mais cette fois ci elle joue à nous perdre en mettant dans l’image différents motifs qui pourraient évoquer le pelage d’un animal.
Et puis, on a un handicap par rapport au chien: on ne sait pas exactement qui on cherche.
Quand enfin le chien a trouvé le tigre, le lapin puis le mouton, c’est l’heure du gouter. Mais, attention, une étrange créature semble se cacher dans la cuisine.
On retrouve la même évidence et la même simplicité dans la trame du récit que dans le dessin.
Tout est mis en place pour que les enfants, dès deux ans, trouvent leurs repères dans ce cherche-et-trouve adapté à leurs capacités.
Une réussite, qui n’est pas sans évoquerIl y a du monde, de la même autrice qui rencontre toujours un franc succès.